France-Election présidentielle/ Les jeunesses africaines sont plutôt déçues voire désabusées

Emmanuel Macron face à Marine Le Pen – pour le second tour de la présidentielle. À ce stade, rien n’est joué, à en croire les sondages. Comment l’Afrique francophone appréhende-t-elle ce duel ? Le directeur de publication du think tank, Nessan Akemakou fait son analyse.

  Ce scrutin intéresse-t-il les Africains ?

Oui, ce scrutin intéresse beaucoup les Africains, notamment dans la partie francophone, évidemment. Disons que la perception des deux finalistes est assez contrastée puisqu’Emmanuel Macron est perçu comme l’équilibriste du « en même temps », c’est-à-dire qu’il est en même l’auteur du discours de Ouagadougou en 2017 porteur de promesses de rupture et- c’est celui qui a été très vite rattrapé par la realpolitik, par exemple au Tchad, où il a versé dans le marigot françafricain comme ses prédécesseurs.

Nessan Akemakou

Donc, l’on peut conclure qu’il y a une forme de déception quelque part vis-à-vis de ce candidat président ?

Oui, plutôt. Les jeunesses africaines sont plutôt déçues et disons qu’elles sont plutôt désabusées. Elles n’attendent plus grand-chose de ce président et de la France en général si l’on se fie à ce qu’on peut observer sur le continent à travers le sentiment anti-français qui est de plus en plus prégnant.

Pour vous, ce sentiment anti-français qui s’est effectivement développé depuis 2017 durant la présidence d’Emmanuel Macron marque-t-il la perception africaine de ce grand rendez-vous politique français ?

Notamment, pas que, mais notamment. Ce sentiment anti-français, il est nourri par les réminiscences du passé colonial, toujours présent à travers certaines pratiques coloniales, la fatigue des populations régulièrement endeuillées au Sahel par les attaques jihadistes, la misère, mais aussi ce qu’on entend surtout la condescendance et voire l’arrogance de certaines autorités françaises que peut incarner parfois le président Macron.

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Vous évoquez la perception du président sortant et candidat Emmanuel Macron, comment -Marine Le Pen est-elle perçue en Afrique ?

Marine Le Pen fait plutôt figure d’épouvantail puisque, pour elle, l’Afrique est d’abord synonyme d’immigration et que, selon elle, l’immigration serait la source de tous les maux de la France. Donc, elle fait plutôt figure d’épouvantail.

Marine Le Pen a cette image attachée à ses discours sur l’immigration alors que, pendant la campagne précisément en France, elle a tenté de faire oublier ce côté-là pour se concentrer sur des questions plus consensuelles comme le pouvoir d’achat. Reste-t-elle quand même attachée -à cette dominante de l‘immigration ?

Oui, tout à fait. Pendant un certain temps, son concurrent qui est encore plus à droite qu’elle, à savoir monsieur [Éric] Zemmour à travers ses propos outranciers, a pu la « gauchiser ». Mais le vernis craque rapidement et le fond anti-immigration et xénophobe du Rassemblement national est toujours là et perçu comme tel par les populations africaines.

Éric Zemmour -a obtenu finalement hier 7% des suffrages des Français. Pour sortir de ce duel Macron-Le Pen, quels sont les candidats en lice qui ont attiré l’attention en Afrique ?

Le candidat qui avait le plus la faveur des populations africaines, c’était sans nul conteste – Jean-Luc Mélenchon. Alors que ce soit pour les Français d’origine africaine qui vivent en France ou pour les Africains en Afrique. On a par exemple un sondage qui a été commandé par Jeune Afrique de l’Ifop qui nous enseignait que 36% des Français d’origine africaine comptaient voter pour Jean-Luc Mélenchon. Même en Afrique, ils sont séduits par ses propositions puisque, dans son programme, il revenait sur la réforme du franc CFA qui est plébiscitée par de nombreuses sociétés en Afrique et il préconisait le départ des troupes françaises de l’Afrique. Donc, il emportait la faveur populaire en Afrique.

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Jean-Luc Mélenchon loupe malheureusement la qualification pour ce second tour de l’élection présidentielle. Y a-t-il une attente quelconque en Afrique francophone vis-à-vis du prochain président français ? On a évoqué la désillusion vis-à-vis du mandat d’Emmanuel Macron, y a-t-il encore une attente ?

Il y a quand même une attente, au moins une abstention, cela veut dire que les jeunesses africaines entendent elles-mêmes se saisir de leur destin et elles espèrent que la France et notamment les dirigeants africains cessent et s’abstiennent de s’ingérer dans leurs affaires internes et d’être complices de certains dirigeants corrompus qui n’ont que faire de l’intérêt général de leur pays et de leur population.

Source:  rfi.fr

N.B: Le titre est de la Rédaction (afriquematin.net)