Kobenan Tah Thomas (VP PDCI) : « Loi de Finances 2022…Nous sommes loin d’un équilibre budgétaire viable »

Kobenan Tah Thomas, Vice-président du PDCI-RDA et Coordonnateur général adjoint du Comité Politique dudit Parti anime depuis environ 2 mois sur Pdci24 une chronique hebdomadaire sur l’Actualité Ivoirienne. Dans sa chronique numéro 10, de ce mercredi 01 décembre 2021, le Vice-président du PDCI-RDA se penche sur la loi de Finances 2022.

Nous vous invitons à lire ‘’sa Chronique les Actualités Politiques Ivoiriennes’’, numéro 10 du mercredi 1er Décembre 2021.

Dans une précédente intervention, j’ai abordé avec vous le sujet du budget primitif de l’année 2022. J’ai reçu des observations de certains de nos concitoyens qui ont souhaité en savoir plus.

Très certainement, bon nombre de nos concitoyens en ignore beaucoup sur l’importance même du budget de l’Etat. Il est proposé sous forme d’une loi ; la loi de finances. Il traduit autant les intentions d’actions d’un gouvernement que la force et le droit de ce gouvernement d’agir dans tel sens ou dans tel autre. Dans les systèmes parlementaires, le rejet du budget équivaut  à la démission du gouvernement.

Si donc le peuple a le sentiment que certaines choses ne sont pas faites pour satisfaire ses besoins légitimes les plus élémentaires, qu’il se réfère donc à la loi de finances. C’est pour cela que nous estimons que c’est un sujet important.

Revenons donc à notre chapitre du jour : la question de l’équilibre budgétaire et financier du projet de Loi de Finances 2022. Pour des questions de logique, nous allons y adjoindre la question de l’endettement et du service de la dette.

D’abord, retenons que le budget d’un Etat est dit équilibré si les recettes sont égales aux dépenses. On obtient cet ÉQUILIBRE lorsque les recettes en propre (sans y adjoindre les emprunts) couvrent les dépenses budgétaires. Là aussi, il ne faut pas adjoindre les charges de la dette. Donc dans le budget, il y a ce que notre pays peut mobiliser lui-même et il y a les fonds que le pays emprunte un peu partout. Et quand on emprunte, il y a des intérêts qu’il faut payer à celui qui a donné crédit au pays. Ces intérêts-là s’appellent les charges de la dette.

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Voyons donc en second lieu si notre budget 2022 est équilibré.

  • Recettes en propre sans emprunts : 4.868,1 milliards de FCFA
  • Dépenses sans les charges de la dette : 5.971,1 milliards de FCFA

Les dépenses sont plus élevées que nos recettes ; il y a donc un déficit qui est égal à 1.103 milliards de FCFA qui représente 18% du budget.

Or, il est inscrit dans ce budget primitif 2022 que notre déficit se chiffre à hauteur de 2 119 milliards de FCFA, soit 30% quand l’on ajoute les charges financières dans les dépenses budgétaires. Cette manœuvre n’est ni correcte ni recommandable. En procédant ainsi, il aurait été bon d’inclure les emprunts dans les recettes budgétaires.

Pour assurer l’équilibre budgétaire, il faut déterminer les engagements incontournables de l’État. Ces engagements incontournables sont le remboursement de la Dette Publique intérieure et extérieure échues ainsi que les charges financières qui les accompagnent, et enfin le déficit budgétaire de l’année 2022. Le remboursement de la dette publique se compose comme suit :

  • Remboursement de la dette publique intérieure échue : 1.265,1 milliards de FCFA
  • Remboursement de la dette publique extérieure échue : 779,7 milliards de FCFA
  • Charges financières de la dette publique : 1.061,4 milliards de FCFA

Ces trois lignes totalisent un montant de 3.061,2 milliards de FCFA.

Le total à payer par l’État de Côte d’Ivoire au titre du remboursement de la dette de l’année 2022 est donc de 3.061, 2 milliards de FCFA ; soit 31% du budget global qui est de 9.901,1 milliards de FCFA.

Si nous rajoutons le déficit initial de 1.103 milliards de FCFA, la situation budgétaire se présenterait ainsi:

  • Service annuel de la Dette. 3.061,2 milliards de FCFA
  • Déficit budgétaire de l’exercice 2022 : 1.103 milliards de FCFA
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Cela donne un total des engagements incontournables de 4.164,2 milliards de FCFA.

Pour équilibrer notre budget, il faut donc rechercher un financement à hauteur de 4.164,2 milliards de FCFA. Soit 42,44% du budget.

Nous avons recours aux emprunts pour équilibrer le budget. On emprunte et on privatise pour financer notre dette et notre déficit. Cette situation se présente comme suit selon le cadrage budgétaire 2022:

  • Privatisation et vente d’actifs : 112,7 milliards de FCFA
  • Transferts des entreprises : 12,5 milliards de FCFA
  • Emprunts sur marché : 2.215 milliards de FCFA
  • Emprunts programme : 466,7 milliards de FCFA
  • Emprunts projets : 1. 357,3 milliards de FCFA

Total des Emprunts pour financer la Dette et le Déficit : 4.164,2 milliards de FCFA

Notons que notre stock de la dette va s’accroître de 4.039 milliards de FCFA ; soit une dette par habitant de 144.250 FCFA pour l’exercice budgétaire de 2022. La population de Côte d’Ivoire est de 28 millions d’habitants en 2021. Le stock global de la dette en 2022 selon le document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle 2022-2024 du Ministère du budget et portefeuille de l’État est 21.529 milliards de FCFA soit 768.893 FCFA par habitant.

Nous sommes loin d’un équilibre budgétaire viable. Et comme chacun peut le noter, ce budget contribuera à nous rendre plus pauvres et dépendants des bailleurs.

Expulsés des quartiers, déguerpis des maisons et endettés par-dessus le marché. Ce n’est pas de gaieté de cœur que je le dis ; bien au contraire.

Enfin, les spécialistes de l’Economie nous dirons les vrais risques que court le pays.

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Nous ne sommes pas loin du gouffre. Il faut éviter de faire le pas de trop. Concertons-nous sur des offres politiques qui tiennent compte de nos capacités en propre. C’est aussi cela l’idée du Dialogue national inclusif.

Merci et à mercredi prochain.