Politique de décentralisation/Ministres-gouverneurs, Préfets, Présidents de Conseils régionaux, Maires : qui fait quoi ?
Par Nazaire Katia*
Il y a quelques temps, le chef de l’Etat ivoirien a signé un décret portant création de douze (12) nouveaux districts autonomes, et dans la foulée a nommé quatorze (14) ministres-gouverneurs de ces districts.
Ces créations et ces nominations interviennent dit-on dans le cadre de la mise en œuvre de la politique de décentralisation et du développement local, en vue de renforcer et de suivre l’action gouvernementale et la bonne exécution des programmes et des projets.
Si dans le principe, la création des districts est dans la droite ligne de l’évolution de la politique de décentralisation, tout porte à croire que la précipitation qui a prévalu à ces créations et nominations de ministres-gouverneurs, répondent à d’autres préoccupations.
La politique de la décentralisation telle que nous la connaissons, dont les sillons ont été tracés par le gouvernement Bédié et matérialisée sous le pouvoir Gbagbo par la création des conseils généraux, devenus par la suite des conseils régionaux, ressemblent fort à une symphonie jamais achevée.
On retient que faute de textes propres, les conseils généraux ont fonctionné sur la base des textes qui régissent les communes. L’élaboration de textes propres à ces conseils était en cours, lorsque survint le changement de régime.
Voulant certainement effacer les traces de ses prédécesseurs, le nouveau régime transforma, les conseils généraux en conseils régionaux, par le regroupement de conseils généraux. Il est à préciser qu’un conseil général épousait les contours d’un département.
Pour autant, aucun texte adapté à la nouvelle configuration n’a accompagné ce changement ; et le financement de ces nouvelles entités n’a pas non plus connu une véritable évolution par rapport à ce qui prévalait, nonobstant l’élargissement de leur sphère géographique et démographique.
La décentralisation revêt toujours un caractère d’inachevé. L’Etat central est au début et à la fin de toutes les activités des collectivités. Leur budget doit nécessairement être soutenu à la Direction Générale de la Décentralisation et du Développement Local(DGDDL), qui doit les approuver avant qu’il ne soit exécutoire. Leurs recettes et leurs dépenses, gérées et régulées par le Trésor Public qui fait la pluie et le beau temps. Ces entités décentralisées n’ont en réalité, aucune autonomie de gestion.
Qu’en sera-t-il avec les districts gouvernés par des ministres ? Auront-ils une plus grande autonomie de gestion, par conséquent plus chanceux que les mairies et les conseils régionaux ?
On se rappelle que la création effective des districts autonomes, hormis ceux d’Abidjan et de Yamoussoukro, avait été différée suite à l’opposition des préfets, qui n’arrivaient pas à cerner ce qui relevait de leurs compétences et de leurs attributions, et ce qui relevait des attributions et des compétences des gouverneurs, aujourd’hui ministres-gouverneurs.
Des réponses ont-elles été trouvées aux préoccupations des préfets avec la présence effective des ministres-gouverneurs ?
Si au niveau des entités déconcentrées, aucune réponse n’est pour le moment disponible pour le citoyen lambda, il reste également à clarifier les attributions et les compétences des districts par rapport aux entités décentralisées que sont les conseils régionaux et les communes. Certainement pour les spécialistes de la décentralisation cela va de soi, mais pour le commun des ivoiriens, tout est confus.
L’ancien préfet d’Abidjan, dans une interview a tenté de donner des réponses aux préoccupations nées de cette nouvelle donne, mais ses réponses n’ont pas permis de démêler les fils. Et les interrogations demeurent.
Ces interrogations se résument en une seule question : ministres-gouverneurs, préfets, présidents de conseils régionaux, maires, qui fait quoi ?
La réponse à cette violente question, permettra de mieux appréhender demain. Demain est certes un autre jour, mais demain arrive toujours.
En attendant, on retiendra que la création des districts autonomes a permis de trouver des points de chute à de nombreux ministres éjectés du gouvernement. Ceci explique certainement cela.
« Mais s’il y a eu un matin en Eburnie, il y aura assurément un soir et l’ivraie sera séparée du vrai ».
Analyste politique*