Album « Héritage »/ Voici le message poignant de Yodé et Siro envoyé à KKB

L’album « Héritage » de Yodé et Siro et la candidature de Monsieur Kouadio Konan Bertin dit KKB, voici deux des sujets les plus polémiques à la une de l’actualité politique en Côte d’Ivoire, depuis une décade. Ces deux sujets, en apparence, sans lien, entretiennent, en réalité, un rapport étroit, eu égard aux critiques à eux réservées par le public.

Les accusateurs de Yodé et Siro ayant reçu les réponses qu’ils méritent, il est inutile d’en rajouter. Il ne fait pas bon de mettre de l’huile sur le feu, en ce temps de deuil national, qui invite à l’unité dans le recueillement. Seulement au-delà des réponses, je voudrais émettre un constat : les Ivoirien(ne)s, dans leur grand ensemble, n’aiment pas l’injustice et les fausses accusations.

Ils sont du côté de la vérité et sont prêts à se battre pour elle. Voilà qui est réconfortant dans la perspective de la prochaine présidentielle. Car, les tares de la gouvernance d’Etat que décrivent Yodé et Siro, dans la chanson « on dit quoi ? », avec l’onction populaire de leurs concitoyen(ne)s, ne sont rien d’autres que les motifs du mécontentement de l’opposition significative, à l’endroit du régime au pouvoir. En défendant, bec et ongles, Yodé et Siro, le peuple de Côte d’Ivoire vient de confirmer le choix de son camp, celui de l’opposition. Il n’attend plus que le jour j pour le matérialiser.

Ce bel exemple d’unité du Peuple devant les causes d’intérêt national, général et supérieur doit interpeller les leaders de l’opposition et les guider. En ce sens, la discordance et la tonitruance du bouillant KKB sont gênantes et ne sauraient laisser indifférent. Qui est KKB ? Que veut-il ? Que peut-il ? La réponse à ces questions simples permettra au Pdci-Rda de décider de la suite à donner aux velléités de celui dont la réputation de frondeur n’est pas usurpée.

Qui est  KKB ?

Comme les deux premières questions sont répondues par lui-même dans sa profession de foi de 2015, il suffit d’en faire l’interprétation. Dans ce manifeste, l’homme dit être titulaire d’une maitrise d’allemand, option communication d’entreprise, obtenue à l’Université d’Abidjan. Après cette déclaration, il passe directement à sa carrière politique, en indiquant sa fonction de député et ses responsabilités partisanes. Aucune trace d’un quelconque cursus professionnel.

Conclusion, KKB a un beau parcours de militant, mais aucune référence professionnelle, à moins que cela ne soit une grave omission dans son propre acte de propagande. En tout cas, jusqu’à ce qu’il apporte la preuve contraire, on tient pour vérité que le sieur KKB n’a jamais travaillé, pour parler comme l’Ivoirien lambda.

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Mais, édulcorons notre propos : l’homme se présente souvent en tant que planteur. Comme Félix Houphouët-Boigny et comme Henri Konan Bédié. Une façon de dire qu’il est leur disciple. C’est d’ailleurs devenu courant de ceux qui se réclament de Félix Houphouët-Boigny et de son successeur de se présenter avec la qualité de planteur. Il n’y a pas de mal à épouser cette mode. Et puis, de toute façon, en Côte d’Ivoire, tout le monde est, peu ou prou, planteur. Mais quand on a eu ses diplômes à l’aube de la vingtaine sans jamais avoir eu la moindre activité professionnelle pour se retrouver planteur à 40 ou 50 ans passés, comme par magie, ça interroge.

A travers ce nouvel album de Yodé et Siro, un message fort est adressé à KKB et partant à toute la classe politique ivoirienne, voire africaine.

Félix Houphouët-Boigny était médecin (pas infirmier comme certains de ses pourfendeurs incultes aiment le dire). Henri Konan Bédié était directeur de la Caisse de Prévoyance sociale et des Prestations familiales (actuelle CNPS), avant d’être nommé ambassadeur, puis conseiller à la Société financière internationale, filiale de la Banque mondiale, alors présidée par Robert Mac Namara, et ministre de l’Economie et des Finances.

Ces deux illustres personnalités ont une légitimité à porter sur leur curriculum vitae la mention planteur, mais pas que. On ne fait pas une maitrise d’Allemand, option communication d’entreprise, pour devenir planteur. Il faut arrêter. Soyons sérieux. Au-delà du Pdci-Rda, Laurent Gbagbo était professeur de lycée puis d’université ; Robert Guéi était un militaire réputé compétent qui finît au grade de général ; Alassane Ouattara était banquier avant d’avoir une carrière politique.

Il faut cesser de penser, dans ce pays, que faire de la politique est un métier en soi et que c’est la voix à suivre pour tous ceux qui, pour une raison ou une autre, ne trouvent pas de travail. De ce point de vue, KKB est un faux modèle comme il en pullule dans notre pays, depuis le coup d’état manqué de 1999, transformé en rébellion, dans la foulée. Ecce homo. Voici l’homme qui veut diriger la Côte d’Ivoire et qui revendique la candidature du plus vieux parti du pays.

Que  veut KKB ?

Pour faire simple, il veut gouverner la Côte d’Ivoire. En d’autres termes, il veut que les ivoirien(ne)s lui fassent confiance pour lui confier leur destin et celui de leur pays. Plus prosaïquement, KKB veut que le Peuple de Côte d’Ivoire lui confie la construction de la nation, le chantier de la réconciliation nationale, le développement du pays, son économie, son administration, sa sécurité, ses relations internationales, l’éducation de ses filles et fils et j’en passe.

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Je dis qu’il faut que le Peuple de Côte d’Ivoire soit vraiment fou ou masochiste, pour confier son destin à quelqu’un qui ne peut revendiquer aucune carrière professionnelle. En tout cas, au Pdci-Rda, une telle forfaiture ne peut prospérer. En réalité, le fond du problème, se trouve à ce niveau : KKB estime que le Pdci-Rda lui doit, on ne sait trop quoi et pourquoi, en échange de son militantisme farouche d’antan. Il attend peut-être depuis trop longtemps un poste de ministre ou tout au moins de PCA ou de DG.

Il faut que les choses soient claires une bonne fois pour toute dans son esprit : un homme d’Etat de la dimension de SEM Aimé Henri Konan Bédié ne peut se permettre de commettre une telle erreur. Il y trop de cadres de haut niveau au Pdci-Rda, pour se livrer à une telle inconséquence.

Au Pdci-Rda, on milite par conviction et non pour des postes. Et si cela doit être récompensé par une promotion, celle-ci doit se mériter. Car, c’est la Côte d’Ivoire que le PDCI-RDA entend gouverner, pas un clan animé par son intérêt personnel. Ce prestigieux parti ne peut se permettre d’encourager la nomination des mauvaises personnes aux bonnes places. KKB sait qu’il ne sera jamais dans un gouvernement sérieux – en tout cas, pas dans un gouvernement du Pdci-Rda – et c’est là la pomme de discorde.

Sur le plan partisan, KKB vise peut-être un poste de vice-président du vieux parti. Mais quel président de parti consciencieux nommerait un individu toujours enclin à l’indiscipline, toujours en conflit avec la loyauté ?

 Depuis le rejet de sa candidature à la convention du Pdci-Rda, KKB raconte beaucoup de contrevérités, donnant le sentiment qu’il avait en tête un plan savamment orchestré pour déstabiliser le parti. Il se plaint du verdict du comité des candidatures, alors qu’il n’a pas été capable de satisfaire à toutes les conditions. Il est outré que le Président Henri Konan Bédié ait nommé les membres de ce comité et réclame un comité paritaire, en contradiction avec les statuts du parti.

 Ignore-t-il que les actes concernant les élections nationales sont initiés, pris ou promulgués par le président de la République qui, si la loi l’y autorise – ce qui n’est pas le cas pour Alassane Ouattara concernant la prochaine présidentielle (j’y reviendrai dans ma prochaine chronique) –, peut compétitionner ? Cela n’est pas nouveau.

En qualité de président du Pdci-Rda, SEM aimé Henri Konan Bédié, était légalement fondé à prendre les actes concernant le comité de candidature, ce qui ne l’empêche pas d’être candidat lui-même. Il n’y a rien d’illégal. Il ne faut pas oublier que dès lors que les membres du comité de candidature sont nommés, cet organe devient souverain. Et puis, KKB connaissait les règles. Il y croyait, sinon il n’aurait pas fait acte de candidature. Ce n’est pas parce que sa candidature a été, à juste titre, rejetée qu’il va se mettre à crier au loup, comme un mauvais perdant.

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Que peut KKB ?

Bien souvent un seul mot vaut mieux que mille, RIEN, absolument RIEN. Oui, KKB ne peut rien et je ne parle pas seulement de son incapacité à incarner le Pdci-Rda, à gouverner l’Etat ni même à conduire un ministère, voire une direction.

KKB ne peut entraver la marche victorieuse du Pdci-Rda et de ses alliés de l’opposition significative à la présidentielle de 2020. Il croit peser un âne mort, mais, en fait, il ne vaut pas un clou. Il ne peut attirer le moindre électeur de la coalition. S’il n’a même pas été capable d’obtenir le « parrainage » d’une seule délégation du Pdci-Rda, celle de son village, comment pourrait-il mobiliser le grand appareil du parti tout entier.

S’il s’en était sorti en 2015 avec 3,88% de voix, c’était en raison du report de voix de certains déçus du Pdci-Rda. Or, maintenant le parti est uni et fait bloc autour de son président et bientôt candidat officiel. Je ne lui donne même pas 0,1% de voix. Même s’il venait, finalement, à se décider à rejoindre le camp RHDP – s’il ne l’a pas encore fait ! – cela ne changera rien pour le PDCI-RDA qui, rappelons-le, a continué de poursuivre sa marche de reconquête du pouvoir, alors que son ancien président des jeunes s’en était honteusement éloigné, à l’instar d’un soldat perdu.

Alors, ma position, largement partagée par les militant(e)s et sympathisant(e)s, est que le PDCI-RDA et ses alliés gagneraient à se focaliser sur la seule chose qui compte vraiment en ce moment : la construction, pierre par pierre, jour après jour, sans relâche et sans distraction, de leur victoire pour, ensemble, sauver la Côte d’Ivoire. KKB candidat ou pas, c’est un non-événement, un épiphénomène.

Les protestations véhémentes et accusations de KKB ne sont rien d’autre qu’une diversion pour nous détourner de l’essentiel. En caravane motivée à atteindre sa destination, laissons le chien aboyer et passons. Restons concentrés jusqu’au bout. Le grand jour est proche.

Séraphin Kouamé

Maire de Brobo

Délégué départemental PDCI-RDA

Chercheur en Sciences Politique