Les vieilles haines ressurgissent à l’opposition

C’était peut-être trop beau pour être vrai. Le front uni promis par l’opposition est en effet en train de se fissurer au fur et à mesure qu’on avance vers les élections législatives qui se tiendront le 6 mars prochain. Après le Cojep de Charles Blé Goudé qui a préféré généraliser ses récriminations, c’est autour des Affidés de sortir de la plateforme de l’opposition en ayant en tête les vieilles haines qui ont plombé pendant des années la réunification du FPI.

Comme à son habitude, le FPI proche d’Affi N’guessan n’a pas fait dans la dentelle. Dans un communiqué publié ce mardi 19 janvier, soit à 24 heures du dépôt des candidatures à la commission électorale indépendante, son secrétaire général, Issiaka Sangaré, assure sortir de la plateforme de l’opposition en raison de manœuvres visant à favoriser l’alliance PDCI-EDS.

Il est en effet facile de comprendre d’où part cette nouvelle tragédie. En fait l’étiquette EDS représente la partie du FPI qui ne reconnaît pas Affi N’guessan comme le président du FPI. Et comme ce dernier apparaît comme celui que reconnaît le pouvoir ivoirien, alors cette tendance s’est rabattue sur la coalition EDS qui est d’ores et déjà idéologiquement inféodée à Laurent Gbagbo, sa référence absolue comme le rappelle à l’envi le Pr. Armand Ouégnin, son président.

SUSPICION

Le problème est que pour cette raison justement, EDS est suspect aux yeux de la tendance Affi. D’autant plus que Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo ont conclu un accord politique qui le marginalise. Avant la présidentielle, le président du PDCI s’était en effet déplacé jusqu’à Bruxelles pour y rencontrer son ancien rival et faire la paix avec lui.

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Depuis ce jour, les deux partis sont en alliance. Ce qui n’arrange pas les affaires d’Affi N’guessan qui avait bénéficié d’un coup de pouce du PDCI lors des élections législatives de 2016 mais, au fur et à mesure son alliance a été phagocytée par celle de Bédié et Gbagbo. Le PDCI a en effet dû choisir entre le président légal qui continue d’avoir le logo du FPI et la signature du parti et le fondateur qui a la majorité des militants et le pouvoir de faire changer les choses.

Cela au grand dam d’Affi N’guessan qui s’en était violemment pris aux deux hommes et à leur « réconciliation de façade » lors de l’échec de la réunification du FPI.  L’ancien Premier ministre de Gbagbo avait alors dans sa ligne de mire l’élection présidentielle et sa candidature en tant que président du FPI. Ici, on fait aussi face aux mêmes fantasmes de leadership et la tendance du parti proche d’Affi se sent en danger puisqu’elle craint de devenir la dernière roue de la carrosse d’une opposition tenue par le PDCI et EDS son aile ennemie.

L’EPREUVE DES TRANGULAIRES

Alors, comme autrefois, les Affidés ont décidé de renverser la table et espère se consoler avec le leadership de l’AFD, la coalition qui se reconnaît en lui. Bref, même si ce n’est pas l’argument avancé dans la déclaration produite ce mardi, il est évident que la tendance proche de l’ancien Premier ministre de Gbagbo veut avoir la liberté de présenter tous les candidats qu’elle veut promouvoir. Quitte à faire perdre l’opposition qui ne peut plus échapper aux triangulaires dans toutes les circonscriptions électorales, et cela dans le meilleur des cas.

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Car avant cette crise des Affidés, le Cojep, le parti de Charles Blé Goudé, avait déjà coupé les ponts avec la CDRP, la coalition mise en place par le parti démocratique de Côte d’Ivoire avant l’élection présidentielle. Dr. Patrice Saraka, le président intérimaire du parti et son porte-parole a dénoncé, dans une déclaration au vitriol mais surprenante, « une désillusion amère » puisque  « les objectifs que nourrissaient les partis et organisations membres de la coalition citoyenne la VOIX DU PEUPLE en s’engageant aux côtés des autres plateformes de l’opposition n’ont été qu’une désillusion amère. Nous nous sommes engagés pour des valeurs, pour des principes, afin de contribuer à opérer un changement dans la gouvernance. Or aucun changement véritable, aucune rupture ne peut s’opérer sans conversion de mentalités, sans méthode, sans changement de paradigmes. On ne peut pas combattre une dictature à la tête de l’Etat avec une dictature interne et un esprit de domination », ont sévèrement critiqué les partisans de Blé Goudé, toujours bloqué à La Haye malgré son acquittement.

C’est aussi la même critique que formule Affi N’guessan, à ceci près que celle-ci était prévisible au regard des rancœurs et des querelles de personnes qui se sont accumulées sur la route de dix années de palabres. Le boycott de la présidentielle et la création du comité national de transition avaient momentanément réconcilié certains durs à cuir des Gor avec l’ancien Premier ministre de Gbagbo.

La visite de la tendance proche de Gbagbo au domicile d’Affi lors de sa sortie de prison avait par ailleurs fait espérer des lendemains meilleurs pour un parti qui se neutralise depuis dix ans sur le terrain politique au lieu de s’opposer à Alassane Ouattara. Mais la réalité est là, car les vieilles haines ont la peau dure.

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SEVERINE BLE

Source: http://www.aujourdhuiquotidien.net