Daloa-Immigration clandestine/Koné Wossama Marc indique la voie à suivre pour freiner le fléau

Interview réalisée par Bernard N’dri-correspondant permanent/afriquematin.net

 Avec pour mission première la sensibilisation, la promotion des Droit et Devoirs des jeunes, soutenir la réalisation de dispositifs d’aide aux jeunes déscolarisés et désœuvrés et surtout  la mise en œuvre de toute action éducative, de formation et d’insertion au sein du tissu socio -économique. Tels sont les objectifs de l’Ong Sos  Immigration Clandestine créée en Aout 2007.Son président Koné Wossama Marc nous invite dans cet entretien  les lignes à suivre pour freiner ce fléau.

 

Pourquoi avoir créée l’OngS.o.s- immigration clandestine ?

L’immigration clandestine depuis des décennies crée la désolation dans les familles africaines à cause de la mort de ces milliers de jeunes dans les mers et les déserts.Notre structure  a été créée pour éradiquer ce fléau et sauver des vies et monter la voie à suivre pour éradiquer cette expérience expéditive qui cause des pertes en vie humaine et la désolation dans les familles.

 

Votre constat sur l’impact de l’immigration clandestine en Côte d’Ivoire ?

Depuis l’avènement de la crise militaro-politique en 1990, les Ivoiriens, les jeunes en particulier sont tournés vers l’aventure à la recherche d’un lendemain meilleur, vu le chômagede plus en plus grandissant dans le monde entier, surtout en Afrique. A ce jour, l’obtention du visa pour l’Europe, principale future destination pour ces derniers n’étant pas facile, ils sont tournésde plus en plus vers la  voie clandestine. Pour étayer nos dires, il y’a eu récemment le rapatriement d’un nombre important de jeunes Ivoiriens qui étaient en situation difficile en Lybie. Cela a été possible grâce au ministre de l’Intégration africaine et des Ivoiriens de l’extérieur. Actes que nous saluons  avec beaucoup de déférence.

 

Selon vous pourquoi les jeunes s’y adonnent de plus en plus ?

Les raisons sont multiples et si nous tenons compte des raisons que ces candidats évoquent, comme la pauvreté, le chômage, l’inadéquation formation /emploi en sont les principales raisons, il est indéniable que ces derniers se volatilisent. C’est une solution, mais elle n’est pas la meilleure.

 

Dans quelle partie de la Côte d’Ivoire, on dénombre un fort taux de jeunes qui s’adonnent à ces voyages ?

Il est difficile de le dire avec précision. Toutes les villes de Côte d’Ivoire sont touchées par ce fléau. Mais les villes comme Daloa, San Pédro et Abidjan sont citées de façon récurrente. Abidjan étant la capitale économique, certains jeunes de la sous-région y viennent dans le but de travailler, de se faire un peu d’argent et entreprendre ce voyage.

 

www.afriquematin.neta relevé que la région du Haut- Sassandra était le carrefour de l’immigration clandestine en Côte d’Ivoire, où plusieurs réseaux de voyageurs opèrent en toute impunité. Que pensez-vous de cela ?

Nous avons effectivement vu cette publication. Nous avons été dans cette région et nous avons constaté que les jeunes ne jurent que par l’Europe qu’ils assimilent à l’Eldorado. Et nous avons été intrigués par leur slogan qui dit que : «  Ici nous sommes mort en ne faisant rien de la journée, alors si nous mourront en essayant de partir en Europe, ce sera une bonne mort parce qu’on aura essayé. La mort c’est la mort». Nous disons que cela est une mauvaise approche, parce qu’ils ne savent pas les dangers qu’ils courent. Ceux qui ont réussi à faire demi-tour, nous disent qu’ils ne peuvent conseiller cette voie à leur pire ennemi. Et c’est à ce niveau que nous intervenons pour dissuader ceux qui pensent qu’il suffit d’un claquement de doigt pour se retrouver en Europe. De là à dire que le haut Sassandra est le carrefour, nous ne pouvons confirmer cette assertion, mais des études sont en cours.

 

Que font les autorités pour lutter contre ce fléau ?

C’est la première fois dans l’histoire de notre pays qu’un chef d’état en parle et s’en préoccupe. Nous avons vu le Président Alassane Ouattara participer à toutes les rencontres internationales concernant ce fléau, que ce soit à Malte où au cours des différentes rencontres des chefs d’Etat africains. Nous en sommes très heureux parce que cela a toujours été notre combat, celui de voir les autorités s’investir pour trouver des solutions. La création du ministère de la promotion de l’emploi jeune en est la preuve et le ministère de l’intégration africaine et des ivoiriens de l’extérieurqui mènentaussi des actions visant à dissuader les jeunes gens. Plusieurs actions sont menées mais  nous en demandons plus.

 

Quelles sont les conséquences que cela entraine ?

Les conséquences sont énormes. L’Afrique  perd de plus en plus sa  jeunesse.  Celle-là même qui est sensée assurer l’avenir de demain. On ne s’en rend peut être pas compte, mais ce sont des bras valides qui meurent chaque jour dans les déserts et les mers. Quand on se solidarise lorsqu’il y a des morts pendant les guerres et certaines attaques, il faut en faire de même pour ces jeunes qui meurent dans l’anonymat. La récente crise a fait plus de 3000 morts en Côte d’Ivoire, nous savons les dispositions prises par les gouvernants pour que cela n’arrive plus sous nos cieux. Alors quand plus de 5000 Africains meurent dans ces voyages, on les assimile à des fous. Les familles se disloquent et l’économie aussi prend un coup ; parce que ce sont ces jeunes qui constituent la main ouvrière.

 

Quelles actions mènent donc  donc votre organisation ?

Les jeunes dans la plupart des cas ne saventpas les dangers liésà l’immigration clandestine. Depuis la mise sur pieds de notre organisation, nous ne cessons d’animer des campagnes de sensibilisations, sur les dangers réelsliés à cette forme de migration ; dans l’optique d’informer et de dissuader les candidats potentiels afin de sauver des vies.

 

Pensez-vous que les différentes actions menées ont pu freiner l’avancement de ce fléau ?

Il serait présomptueux de faire une telle affirmation puisque les jeunes continuent de mourir aux larges des côtes. Néanmoins partout où nous sommes passés durant nos campagnes de sensibilisation, nous avons été édifié par l’impact que ces actions ont eu sur cette jeunesse, à en croire les témoignages. C’est ce qui nous pousse d’ailleurs à continuer sur cette lancée. Plus la jeunesse saura moins il y aura des morts inutiles. Nous pouvons, à ce niveau, dire que nos actions ont contribué à sauver des vies. Pour nous un jeune informé, c’est une progéniture qui est sauvée. Mais nous sommes conscients que le chemin est long. Il est arrivé parfois où nous avons été interdits de mener nos campagnes sous prétexte que nous n’offrons rien en contrepartie. Alors qu’ils sont libres de choisir leur destin. C’est dire qu’il est difficile de changer les mentalités du jour au lendemain.

Empêchez-vous les jeunes à aller en Europe ?

L’immigration donne naissance au co-développement qui est l’action favorisant la contribution des migrants au développement au profit de leur pays d’origine, ce qui est une bonne action. Nous faisons la promotion d’une immigration légale dans le respect strict des lois d’immigration des pays d’accueil au détriment d’une immigration clandestine qui est à l’origine de la disparition de milliers de jeunes africains chaque année. Nous n’empêchons donc personne d’aller en Europe et nous n’en avons pas les moyens. Il y a des accords de libre circulation entre les pays qui existent  depuis la nuit des temps. Mais nous, nous disons NON à l’immigration clandestine.

 

 Quelles solutions votre organisation peut-il apporter à ces jeunes ?

Le problème de l’emploi étant au cœur de la motivation de ces jeunes, nous avons des programmes de formation à l’auto- emploi, des programmes de formation de montage de projet jusqu’à leur mise en œuvre ensuite les orientant vers le ministère de la promotion de la jeunesse et de l’emploi pour les programmes emploi-jeunes. Nous sommes constamment à leur écoute pour une meilleure orientation.

 

 Peut-on éradiquer définitivement ce fléau ?

Quand on parle d’immigration clandestine plusieurs facteurs sont pris en compte : la politique de délivrance des visas dans les ambassades, la famine, la guerre, la misère, le chômageetc. Autant il y a le chômage en Côte d’Ivoire, il y en a  en Europe. Donc, pourquoi fuir un chômage pour aller dans un autre chômage ? L’éradication de ce fléau sera possible qu’avec la sensibilisation et la prise de conscience de ces jeunes que l’Eldorado ce n’est pas ailleurs, mais plutôt dans leur propre pays. Parce que d’autres viennent faire fortune ici. L’Europe a aussi ses réalités dans le domaine de  l’insertion de sa jeunesse et  la jeunesse africaine doit le comprendre.

 

Quelles solutions proposées vous aux gouvernants ?

Au terme d’une  étude bien approfondie, la majeure les candidats à l’immigration clandestine ont un niveau intellectuel assez bas. Il faudra donc encore mettre l’accent sur la scolarisation des jeunes, leur formation à des métiers, tout en développant une  politique de mécanisation agricole à l’effet d’encourager leur retour à la terre. Suivie d’une politique de soutien aux Pme-Pmi  locales, afin de leur faciliter  l’accès aux micro- crédits pour le financement de leurs projets. La création  des centres d’écoute et d’insertion des jeunes déscolarisés et désœuvrés doit être également une priorité pour les gouvernants. Au plan politique, nos dirigeants africains doivent s’impliquer véritablement dans la lutte contre ce fléau.

Ensuite, au plan social, la mise en place  d’une structure qui va s’attaquer sérieusementà la migration clandestine en sensibilisant les populations, les jeunes en particulier sur les conséquencesdésastreuses et les risques auxquels ils s’exposent en choisissant de forcer les portes de l’Europe.

Enfin, au plan économique, il est de notoriété que l’Afriquepossède de grandes potentialités. Dès lors, nos dirigeants doivent songer à transformer nos matièrespremières avant de les exporter. Ce qui créera des emplois pour cette jeunesse gagnée par le désespoir.

Pour finir, je voudrais d’abord remercier www.afriquematin.net qui fait un excellent travail. Sachons que l’immigration clandestine est caractérisée par toutes sortes d’épreuvesdifficiles, aux nombres desquelles il y a la faim, la soif, les humiliations, les privations de liberté, la dignitébafouée. Au regard du nombre pléthorique de victimes, l’Ong Sos- Immigration  Clandestine dans le cadre de son programme national de lutte contre ce fléau, fait la promotion des droits et devoirs des jeunes quelquessoient leur nationalité et leur âgeàtraversdes conférences, des séminaires, des colloques. Elle  soutient aussi la réalisation de dispositifs d’aides aux jeunes en général à travers la mise œuvre d’actions d’éducation, de formation et d’insertion dans le tissu économique dans l’espoir de contribuer à l’éradication totale de cette gangrène.