RDC: Tshisekedi et Kamerhe comme le RHDP en Côte d’Ivoire? La mise en garde de l’Eglise.
Les opposants congolais ont consommé leur division, vendredi, à 30 jours des élections en République démocratique du Congo, avec l’alliance de deux poids lourds, Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe, qui avaient fait voler en éclat un précédent accord à sept opposants.
C’est de Nairobi que l’ex-président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, a annoncé qu’il retirait sa candidature en faveur de Félix Tshisekedi dans la course à la succession du président Joseph Kabila.
Ils ont confirmé leur ticket en cas de victoire à l’élection présidentielle à un tour prévue le 23 décembre: à M. Tshisekedi, 55 ans, la présidence de la RDC, à Vital Kamerhe, 59 ans, le poste de Premier ministre.
Leur plate-forme électorale « Cap pour le changement » prévoit une alternance au bout de cinq ans (Kamerhe président, Tshisekedi chef du gouvernement).
En attendant, M. Kamerhe devient le directeur de campagne de M. Tshisekedi, fils de l’ex-leader de l’opposition Etienne Tshisekedi, décédé à Bruxelles le 1er février 2017.
« Fatshi » – son surnom – a été traité de « traître » par les supporteurs de l’autre candidat de l’opposition, Martin Fayulu, à un mois des élections prévues le 23 décembre.
Le 12 novembre, MM. Tshisekedi et Kamerhe ont dénoncé l’accord passé la veille avec cinq autres opposants pour désigner à la surprise générale l’outsider Fayulu « candidat unique de l’opposition ».
Ils avaient invoqué la pression des « bases » de leurs partis respectifs (UDPS et UNC) sur place en RDC pour se retirer de cet accord signé à Genève.
Vendredi matin, M. Fayulu espérait encore que M. Tshisekedi allait « reconsidérer sa position » et « revenir au bercail », dans un entretien avec trois médias dont l’AFP.
Originaire de Bukavu (Sud-Kivu, Est), Vital Kamerhe a appelé les électeurs, « ceux de l’Est en particulier » à soutenir Félix Tshisekedi.
Député de Mbuji Mayi, son fief familial dans le Kasaï (Ouest), M. Tshisekedi s’est engagé à ramener la paix « principalement à l’Est du pays ».
Dans l’autre camp de l’opposition divisée, M. Fayulu, originaire de Bandudu (Centre-Ouest) est soutenu par Moïse Katumbi, l’ex-gouverneur du Katanga (Est).
Il compte également parmi ses soutiens l’ex-chef de guerre et ex-vice-président Jean-Pierre Bemba, dont la famille a pour fief l’Equateur (Nord-Ouest).
M. Kabila et les « Katangais » au pouvoir ont eux désigné comme candidat l’ex-ministre de l’Intérieur Emmanuel Ramazani Shadary, originaire de la petite province du Maniema (Est).
« Ne cédons pas au tribalisme, au régionalisme, au favoritisme, à toute forme de clientélisme », a prévenu la très influente Eglise catholique en République démocratique du Congo, dans une déclaration vendredi à Kinshasa.
– « Attention aux corrompus »-
« La Conférence épiscopale nationale des évêques du Congo (Cenco) ne soutient aucun candidat », ont prévenu les évêques.
Les évêques, qui plaident pour un « vote responsable », ont tout de même esquissé le profil du bon candidat: « il nous faut (…) des personnes honnêtes et de bonne moralité qui ne s’approprient pas les richesses du pays (…). Attention aux corrompus et aux corrupteurs ».
Les évêques estiment qu’il est encore possible de « trouver un consensus sur l’utilisation ou non de la machine à voter ».
La Commission électorale nationale indépendante (Céni) veut déployer dans tous les bureaux de vote cet écran tactile pour choisir les candidats et imprimer les bulletins de vote.
Martin Fayulu refuse catégoriquement la « machine à tricher » évoquant un manque de fiabilité et de crédibilité. L’UDPS de M. Tshisekedi veut des élections « avec ou sans machine à voter ».
« Si l’usage de cette machine s’avérait inéluctable », les évêques demandent qu’elle ne soit utilisée « que pour l’identification des candidats et l’impression des bulletins de vote ».
Les évêques recommandent à la Céni « de procéder uniquement au comptage manuel des voix et d’afficher le procès-verbal dans tous les bureaux de vote et de dépouillement le même jour ».
« Autrement, elle jetterait le discrédit sur les résultats des scrutins », préviennent-ils.
La Cenco avait parrainé l’accord de la Saint-Sylvestre du 31 décembre 2016. Cet accord avait permis au président Kabila de rester au pouvoir au-delà de la fin de son deuxième et dernier mandat de cinq ans arrivé à échéance le 20 décembre 2016, moyennant des élections fin 2017 et des mesures de « décrispation politique ».
Les élections ont été reportées à ce 23 décembre. « Certains opposant sont soit en prison, soit en exil. La liberté de manifestation n’est pas acquise pour tous », ont déploré les évêques.
AFP