En Afrique du Sud, le grand déballage sur la corruption pendant l’ère Zuma se poursuit.
Depuis août 2018, la commission d’enquête Zonda passe au crible les deux mandats de l’ex-président sud-africain, poussé à la démission en février par l’ANC.
Un chef d’entreprise sud-africain a affirmé, lundi 21 janvier, avoir payé des pots-de-vin à une ministre proche de Jacob Zuma pendant quatorze ans, nouvel épisode du grand déballage sur les affaires de corruption qui ont fleuri durant les deux mandats de l’ex-président.
Ancien responsable de la compagnie de sécurité Bosasa, Angelo Agrizzi a affirmé qu’il avait préparé chaque semaine, de 2002 à 2016, une enveloppe contenant 50 000 rands (près de 3 200 euros) en liquide à remettre à Nomvula Mokonyane, actuelle ministre de l’environnement.
« Nous savions qu’elle était proche de l’ancien président Zuma », a expliqué M. Agrizzi devant une commission d’enquête. Cette générosité visait à éviter tout ennui judiciaire à Bosasa, sous le coup depuis 2007 d’une enquête pour avoir remporté de nombreux contrats jugés suspects avec l’Etat. L’entreprise n’a toutefois jusque-là jamais été poursuivie.
« Pour nous, elle servait de contact, a expliqué l’ex-dirigeant d’entreprise. Nous savions qu’au moindre problème, nous pouvions aller la voir et que nos affaires seraient réglées. »
Selon Angelo Agrizzi, Bosasa a gratifié Mme Mokonyane, outre sa rétribution mensuelle, de nombreuses autres faveurs comme la prise en charge des funérailles de membres de sa famille ou des frais de restauration. « J’étais personnellement impliqué, c’est moi qui donnais les autorisations », a insisté M. Agrizzi.
Successivement « première ministre » provinciale puis ministre de l’eau pendant la présidence Zuma, Nomvula Mokonyane a démenti ces allégations.
Lancée en août, la commission dirigée par le vice-président de la Cour constitutionnelle Raymond Zonda vise à faire la lumière sur les nombreux scandales qui ont terni les mandats de Jacob Zuma ((2009-2018).
Sous la pression de l’ANC, il a été contraint de quitter le pouvoir en février 2018, remplacé à la tête du pays par Cyril Ramaphosa qui a promis de tordre le cou à la corruption. Il a toutefois maintenu MmeMokonyane au gouvernement, d’abord à la communication puis à l’environnement.
Ces derniers mois, plusieurs personnalités ont exposé devant la commission Zondo les liens entre M. Zuma et les frères Gupta, des hommes d’affaires d’origine indienne soupçonnés d’avoir bénéficié de juteux contrats publics par son entremise. M. Zuma a toujours nié être impliqué dans des activités illégales.
Très disert, M. Agrizzi avait déjà révélé la semaine dernière que son entreprise avait l’habitude de débourser chaque mois entre 4 et 6 millions de rands (250 000 à 380 000 euros) en pots-de-vin et cadeaux divers pour décrocher des contrats avec l’Etat ou des entreprises publiques. Parmi eux, il a évoqué un gâteau d’anniversaire offert à Jacob Zuma pour son 72e anniversaire.
« Tout ceci n’est que la partie émergée de l’iceberg, a déploré une députée de l’opposition, Natasha Mazzone. Il faut maintenant que des gens aillent en prison. »
« Nous ne porterons pas le chapeau pour des actes individuels », a riposté un porte-parole de l’ANC, Zizi Kodwa, à quatre mois des élections générales.
Les auditions de la commission se poursuivent toute la semaine.