Algérie-France/Un Diplomate assure que « la Russie peut faire avancer le dossier malien, et plus généralement le dossier sahélien ».

Emmanuel Macron s’est rendu récemment en Algérie, une visite – qualifiée de réussie par le président Algérien Abdelmadjid Tebboune et qui s’est conclue par la signature d’une déclaration commune dans laquelle les deux présidents ont renouvelé leur engagement à inscrire leurs relations dans une dynamique de progression irréversible ». L’ancien ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt analyse ce déplacement.

La France et l’Algérie ont signé récemment  une déclaration conjointe dans laquelle les deux pays promettent un partenariat renouvelé. Croyez-vous à cet engagement ? 

 Je crois qu’il y a beaucoup de bonnes paroles, il y a beaucoup de phrases auxquelles on est habitué dans la diplomatie internationale, et on peut faire un copier-coller avec d’autres déclarations précédentes.

 » On peut penser que l’Algérie qui a de bonnes relations avec la Russie qui est très présente au Mali pourra, non pas, servir d’intermédiaire, mais pourra nous permettre à nous aussi de faire avancer le dossier malien.. »

Dans ce contexte je retiens d’abord la création d’un comité militaire. Parce que ça faisait déjà un certain temps que la France demandait des échanges, des renseignements, une coopération avec l’Algérie sur les questions militaires, sur la Libye, sur le Sahel, et c’est toujours Alger qui se dérobait. Ensuite viennent les affaires de mémoire et autres et enfin, l’absence de précision en ce qui concerne ce qu’on appelle les mobilités, c’est-à-dire, en gros, l’immigration.

Est-ce une sacrée évolution de voir les deux présidents en compagnie de leurs chefs d’Etat-major ?

Oui, tout à fait, je crois que c’est le point le plus important de cette visite, pour nous en tout cas, parce que ça fait longtemps que nous demandions la réunion d’un tel comité, et il ne faut pas oublier que l’Algérie connait bien cette région, elle connait le Mali, elle connait le Sahel, son arrière-cour, et elle connait bien la Libye, donc c’est vrai que c’est important.

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De quelles façons le partenariat entre Alger et Paris peut-il être renforcé pour lutter contre la menace terroriste au Sahel ?

Il ne faut rien attendre, je pense, sur le plan militaire, c’est-à-dire qu’il n’y aura pas d’engagement militaire armé de l’Algérie au Mali. Je crois qu’il ne faut pas attendre quoi que ce soit là-dessus. En revanche, on peut penser que l’Algérie qui a de bonnes relations avec la Russie qui est très présente au Mali pourra, non pas, servir d’intermédiaire, mais pourra nous permettre à nous aussi de faire avancer le dossier malien, et plus généralement le dossier sahélien.

Par exemple, vous me demandez comment tout cela peut se traduire, vous savez qu’il y a le G5 Sahel du côté français et du côté algérien, ils ont créé ce qui s’appelle le Cemoc, qui est un comité d’État-major des pays du Sahel qui est installé à Tamanrasset. On peut penser que les choses évolueront vers un rapprochement de ces deux structures, voilà, ce sont des choses concrètes.

  La question énergétique n’était-elle pas l’un des enjeux de cette visite du président Macron ?

Non, je ne crois pas. On ne pouvait pas ne pas parler de gaz, de pétrole… de gaz, surtout avec l’Algérie. Donc ce n’était pas l’enjeu de cette visite, l’enjeu, c’était un reformatage, une refondation, je ne sais pas quel est le bon terme, de la relation franco-algérienne. Le gaz était un des sujets sans doute de discussion, mais ce n’était pas le sujet central.

 Concernant une éventuelle création d’une commission mixte d’historiens chargée de travailler sur les archives , Alger et Paris sont-ils réellement prêts – à accepter de regarder leur passé commun-?

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Ce sera compliqué, voire difficile – ce passé est complexe, parce qu’on va se pencher non pas sur la guerre d’Algérie, mais on va se pencher sur les 132 années de colonisation, c’est-à-dire depuis 1830, et entre 1830 et 1945 environ, la colonisation française n’a pas toujours été exemplaire, je dirais, donc on va tomber sur des dossiers extrêmement difficiles.

 Ce sera également difficile parce qu’il faudra trouver des historiens indépendants, compétents et indépendants des deux côtés, ça va être très compliqué à mon avis. Et puis enfin, ça va être un dossier difficile parce que derrière tout cela, il y a aussi des dossiers connexes, je dirais notamment la question des essais nucléaires.

Et donc, en ouvrant ce dossier « mémoire » au sens large, histoire plutôt, on ouvre quelque chose d’incontrôlable. Et je connais un petit peu ce dossier algérien pour vous dire que ce n’est pas demain qu’on va trouver une solution. Alors, les deux présidents se sont donnés un an pour avancer. On verra dans un an.

Source : rfi.fr