Aide humanitaire/Des milliers de personnes vont bientôt perdre la vie …
Par voie de communiqué, l’Onu annonce que plusieurs dizaines de millions de personnes vont être privées d’aide humanitaire en 2025, faute de financements nécessaires. Le porte-parole de l’OCHA, l’agence de coordination de l’aide humanitaire de l’Onu, Jens Laerke tire la sonnette d’alarme sur cette crise qui pointe du nez.
Selon vous, quels sont les financements qui vous manquent pour assurer la continuité de vos programmes d’aide ?
Globalement, nous avons besoin de 44 milliards de dollars en 2025 pour couvrir tous les programmes nationaux et régionaux. Mais en raison des coupes financières, qui sont sans précédent, nous avons été contraints de donner la priorité aux programmes qui sauvent le plus de vies. Avec cette « hyper-priorisation » nous allons aider 66 millions de personnes de moins qu’avant, alors que le plan initial devait permettre d’apporter de l’aide à 180 millions de personnes vulnérables.

Comment allez-vous procéder pour établir des priorités ? Comment cela va-t-il fonctionner ?
Nous nous sommes concentrés sur des besoins très clairs, évidents, qui sauvent des vies. Une sorte d’action humanitaire minimale et incompressible. Nous avons donc examiné très attentivement tous les programmes dont nous disposons. C’est vraiment difficile et c’est vraiment douloureux à faire parce que nous savons que cela met des vies en danger. Des personnes perdront la vie simplement parce qu’elles n’ont pas accès à l’aide humanitaire qu’elles recevaient auparavant.
Et cela se produit à un moment où il y a de plus en plus de crises dans le monde, de plus en plus de besoins d’aide…
En effet, et c’est une ironie cruelle que de constater que les besoins humanitaires augmentent sans cesse, alors que les fonds diminuent. Et ce que nous essayons de faire maintenant, c’est de dire aux donateurs, « nous avons fait notre maximum, nous avons vraiment essayé de nous concentrer strictement sur le sauvetage de vies humaines, maintenant, vous devez intervenir parce que c’est ce qu’il faut pour sauver ces gens ». En réalité, le montant que nous demandons aujourd’hui représente environ quatre jours de dépenses pour le secteur de la défense dans le monde. Et nous demandons juste, l’équivalent de quatre jours de dépense militaire pour financer une année entière d’actions humanitaires et pour sauver des vies qui, soit dit en passant, ont bien souvent été mises en péril par des conflits armés.
Les États-Unis ont choisi de réduire leur contribution, mais vous pointez du doigt d’autres pays qui ont choisi également de baisser leurs contributions ?
Bien sûr, la décision de l’administration américaine de réduire les financements humanitaires a été un coup terrible. Parce que les États-Unis, en raison de la taille de leur économie, jouent un rôle très important dans le financement de ces programmes internationaux. Plus de 40 % environ des sommes que nous recevions proviennent des États-Unis. Et c’est le cas depuis longtemps, parce que les États-Unis ont été extrêmement généreux, ce qui a permis de sauver des centaines de millions de vies. Cette baisse de la contribution américaine a donc été un véritable coup de massue. Mais il y a d’autres donateurs très importants, en particulier parmi les pays européens, qui ont annoncé une réduction de leurs financements ou qui ont déjà commencé à le faire.
Pourquoi Donald Trump les pays européens veulent-ils réduire leurs aides ?
Eh bien, vous devriez bien sûr leur poser la question ! Mais ce que nous pouvons voir et ce que nous comprenons, c’est qu’une grande partie de l’aide va probablement au secteur de la défense. Nous comprenons que de nombreux gouvernements sont soumis à des contraintes financières et qu’ils doivent faire du mieux possible avec l’argent qu’ils ont collecté auprès des contribuables. Mais pourquoi les personnes les plus vulnérables du monde devraient-elles être les premières à souffrir ?
Les sommes dont nous avons besoin ne sont pas si élevées que cela au regard des budgets des grands États. Bien sûr, nous allons continuer à nous battre pour aider le plus grand nombre de personnes dans les endroits les plus dangereux du monde, pour aider les gens qui sont au bord de la famine, qui sont des réfugiés, qui fuient la guerre et les catastrophes naturelles.
Nous pensons que c’est la bonne chose à faire. Nous pensons que ce sont des arguments de poids et nous espérons vraiment que les gouvernements et les autres donateurs les écouteront.
Source : rfi.fr