Aboisso-Occupation illégale d’une réserve administrative/Un cadre de la localité interpelle….

Par Ange Allah*

Le journal afriquematin.net, dans sa parution du mercredi 2 mars 2022, a fait état de la construction par monsieur Aboubakari Cissé, Directeur Général Adjoint des impôts et Député d’Aboisso commune, d’un mur sans autorisation de construire sur une réserve administrative, à l’entrée du quartier Eboikro à Aboisso, en bordure de route, non loin de la voie internationale Aboisso-Noé.

Interrogé, le mis en cause argue de ce que l’espace litigieux ne figure pas dans le plan directeur de la zone et lui dénie sa qualification de réserve administrative sous le prétexte que l’endroit serait marécageux et qu’il l’aurait aménagé pour son usage personnel.

 Il entend adresser un courrier au ministère de la construction, du logement et de l’urbanisme pour régulariser l’occupation de cette zone qui est, pour lui, un bas-fond et donc une zone non constructible qu’il considère logiquement comme son terrain. Face à cette situation qui interpelle, nous voudrions donner notre avis en tant que cadre de la ville d’Aboisso et sachant.

La posture affichée par M. Aboubakari Cissé est intrigante à tout point vue et suscite des interrogations :

Remblayer un endroit, fût-il un bas-fond proche de son terrain, donne-t-il droit à l’accession à la propriété de plein droit, d’en jouir et d’en disposer de la manière la plus absolue ?

Sait-il que l’occupation du domaine public est précaire et révocable selon les dispositions de l’article 1 du décret n° 2016-788 du 12 octobre 2016 relatif aux modalités d’application de l’ordonnance n°2016-588 du 3 août 2016 portant titres d’occupation du domaine public ?

Un citoyen, sous le prétexte qu’un endroit est un bas-fond, peut-il raisonnablement contester l’existence d’une réserve administrative à cet endroit attestée par un arrêté ministériel, en l’occurrence l’arrêté n°14-0027 du 14 mai 2014 portant approbation du plan de régulation du lotissement dénommé « Eboikro » ?

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La révocation de l’arrêté ministériel par ce dernier et sa prétention à vouloir s’octroyer la réserve administrative litigieuse en adressant à cet effet un courrier au ministère de la construction, du logement et de l’urbanisme est le signe d’un mépris des autorités et des lois de la République. Serait-il en train de dire à l’opinion publique nationale et internationale que ses entrées auprès des autorités étatiques lui donnent le droit de faire changer une décision ministérielle et les lois de la République…?

Une telle attitude est dangereuse pour la construction d’une Côte d’Ivoire où la loi est respectée parce qu’elle ne relève pas d’une négligence encore moins d’une légèreté, mais illustre bien une volonté délibérée de s’accaparer un bien de la collectivité publique. C’est un acte de prévarication d’un agent de l’Etat qui a décidé de détourner, pour un usage personnel, un domaine public.

Le caractère indu de cette occupation qui ne relève pas d’une erreur de droit doit être dénoncé avec force. Il y a bel et bien intention de subtiliser à la collectivité publique un bien public. Cela est intolérable d’autant plus qu’au moment des faits d’occupation dudit domaine public, M. Aboubakari Cissé était Directeur du cadastre chargé, entre autres, de l’expertise et des contre-évaluations immobilières et a procédé à la numérisation totale du cadastre ivoirien.

De surcroit, son curriculum vitae souligne qu’il bénéficie d’une solide formation antérieure de géomètre attachée à son brevet de technicien supérieur des Travaux Publics « Option : Sciences Géographiques ». Il n’est donc pas envisageable, avec un tel background, qu’il se soit trompé de bonne foi en occupant la réserve administrative évoquée. Tous les géomètres de Côte d’Ivoire et tous ceux ayant travaillé au cadastre savent comment se font les choses en Côte d’Ivoire.

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Par conséquent, il doit lui être notifié le caractère illicite de cette occupation du domaine public, à moins qu’il ne consente à démolir sa clôture et à restituer ce domaine illégalement occupé au titulaire du droit d’usage ou à la personne publique qui en a la charge. Dans le cas contraire, une expulsion forcée du domaine de la collectivité publique et la destruction de son ouvrage devraient lui être signifiées et appliquées.

Cette situation est d’autant plus regrettable qu’en plus d’occuper illégalement le domaine public, il a enfreint l’article 13 de la Loi n°2019‐576 du 26 juin 2019 instituant un code de la construction et de l’habitat (JO 2019‐61) qui stipule que « l’obligation d’obtention préalable du permis de construire s’impose à toute personne physique ou morale ». Les procédures en vigueur n’ont pas été respectées.

La présente déclaration se veut une interpellation du Président de la République, du gouvernement et du ministère de la construction, du logement et de l’urbanisme pour que force revienne à la République dans laquelle tous les citoyens sont égaux en droit, devant la loi. Il est attendu des agents de l’Etat un devoir de probité exemplaire.

Cette exigence est encore plus forte lorsqu’il s’agit de personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public ou exerçant des fonctions d’autorité au nom de la puissance publique. Nul ne peut et ne doit impunément et indûment occuper un domaine public en Côte d’Ivoire.

 *Fils et cadre d’Aboisso