Chefferie à Adjamé-Bingerville/Des parrains tapis dans l’ombre entretiennent la crise

Par Keren Bossouma/afriquematin.net avec sercom

Le collectif des avocats de la communauté villageoise d’Adjamé-Bingerville, représenté par Maître Latte, était face à la presse nationale et internationale, le samedi 6 août dernier à la salle des fêtes de la Chefferie pour entretenir les journalistes sur la crise de chefferie qui a cours en ce moment dans le village.

Avant d’en donner les raisons, l’homme de loi a fait un rappel historique sur le processus de désignation des chefs de villages en Côte d’Ivoire, depuis la période coloniale jusqu’à nos jours afin de permettre « aux uns et autres d’apprécier la situation qui prévaut aujourd’hui à Adjamé-Bingerville ».

Selon l’avocat, ce qui se passe aujourd’hui dans le village d’Adjamé-Bingerville est anormal pour la simple raison que cela prend à contre-pied la loi coutumière et la loi constitutionnelle. A ce propos, il rappellera que les villages existaient avant l’arrivée des colons. Et c’est justement parce que ces villages existaient que la colonisation a été possible. Il va plus loin pour dire que si les villages existaient, ce n’était pas le cas pour l’Etat de Côte d’Ivoire qui n’existait pas en ce moment-là.

« Si les villages existaient avant les colons, ça veut dire que les villages existaient avant l’Etat de Côte d’Ivoire », a-t-il fait remarquer, avant d’ajouter que durant la colonisation, ce sont les villageois eux-mêmes qui désignaient leur chef et non le colon. Les choses, montrera-t-il, n’ont pas changé à la création de l’Etat de Côte d’Ivoire.

« La loi du 14 juillet 2014, portant statuts des Rois et Chefs traditionnels, en son article 3 alinéa 1, reprend un peu ce qui se passait à l’époque coloniale. Elle stipule très clairement que les Chefs de villages sont désignés selon les Us et Coutumes dont ils relèvent. C’est dire que ce sont les communautés villageoises qui choisissent leurs chefs. Et pour cause, le village n’est pas une circonscription administrative, autrement dit, le village n’est une création de l’Etat. Ce n’est pas comme une sous-préfecture, une préfecture ou un district. Le chef du village n’est pas un fonctionnaire qu’on peut affecter ici et là. Il ne passe pas un concours pour aller faire une formation pour devenir chef de village. C’est donc la communauté qui désigne son Chef selon les Us et Coutumes en vigueur », a indiqué Maitre Latte.

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S’appuyant sur le droit coutumier, l’homme de loi soutient que , le chef du Village d’Adjamé-Bingerville est bel et bien Mobio Aboussou Guy Georges qui a été désigné par la population conformément à la loi coutumière et au processus de désignation en vigueur. Il a rappelé les différentes étapes de cette désignation notamment le choix porté sur lui par sa catégorie le 1er octobre 2019, ensuite la validation de ce choix par la génération Tchagba le 02 octobre 2019, la présentation du nouveau chef  à la génération le 20 mars 2021, la présentation de Mobio Aboussou Guy Georges  à la communauté villageoise le 27 mars 2021 à la place mythique Gbégrékoumin, la cérémonie de bénédiction du nouveau chef par le Nannan, le 10 avril à Nannan Gbanmin et enfin l’intronisation du nouveau chef à Gbégrékoumin.

Il poursuivra pour dire, qu’aucune de ces étapes n’a été accomplie pas Awaka Ghislain. L’homme de droit s’est insurgé contre l’attitude des responsables de l’administration sous-préfectorale de Bingerville lors de la consultation populaire.  « Lorsque l’administrateur est arrivé au village pour faire le constat, il a fait fi de l’opinion des populations qu’il était censé interroger pour aller s’enfermer chez le Nannan avec sa seule suite, empêchant ainsi le Nannan en second et le commissaire de justice d’y entrer », a-t-il regretté.

Interpellant alors les pouvoirs publics, et prenant à témoin, l’opinion nationale et internationale sur la crise, l’homme de droit affirme fort que c’est une crise artificielle créée par certains parrains tapis dans l’ombre. Après avoir rappelé quelques manquements liés au procès qui justifient les soutiens au plus haut niveau d’Awaka, l’avocat a indiqué pour terminer que « Aboussou est le chef du village d’Adjamé-Bingerville. Le droit finira par triompher ».