Evènement du 31octobre 2020/Bruits des « vestiaires » politiques avant 2025 !

Par Denis K. Zion*

Le dimanche dernier, de façons diverses selon ses sensibilités, selon ses réalités, selon l’angle et les lunettes politiques qu’il porte, chacun de nous s’est rappelé du 31 octobre 2020. Cette journée où tout a failli basculer. N’eut-été l’esprit profond de paix de la grande majorité des Ivoiriens, notre pays, la Côte d’Ivoire, une fois de plus, aurait basculé dans l’horreur d’une guerre pour le pouvoir.

Pour ceux qui auront imposé le silence des autres par les armes, c’est l’ordre qui a été rétabli. Pour ceux qui ont vu les leurs tailladés et décapités sans ménagement, c’est le règne de l’ogre de la terreur qui s’était instauré. Toujours est-il que ce samedi 31 octobre 2020, tout se faisait comme si la Côte d’Ivoire ne devrait pas connaitre d’autres élections, d’autres scrutins.

 Et pourtant, après l’octobre noir, il y a eu des élections législatives dans lesquelles des gens ont perdu et d’autres ont gagné et le ciel n’est pas tombé sur la tête de personne.

En 2023, sauf changement de dernière minute, il devrait y avoir les élections municipales et régionales. Puis deux ans après, devrait se tenir à nouveau le scrutin présidentiel. Mais avec qui ? Avec quels candidats pour les différents partis et groupements politiques ? Surtout avec quelle Commission électorale, et comment ?

Dans cette perspective de la présidentielle de 2025 que d’aucuns disent, une fois de plus, décisive pour la Côte d’Ivoire, le marigot politique bouillonne déjà. Les couloirs des différents camps bruissent. L’on fait, défait et refait les jeux en battant les cartes sans encore dévoiler les jockers. De tous les plus de 200 partis politiques officiellement présents sur l’échiquier politique ivoirien, seuls cinq (5) sont nettement en vue.

Le PDCI-RDA d’Henri Konan Bédié qui a osé sortir des griffes du RHDP ; le RHDP d’Alassane Ouattara qui limite les Ivoiriens à ses seuls militants, le PPA-CI de Laurent Gbagbo qui entend s’imposer avec le contenu du FPI ; l’UDPCI de Toikeusse Mabri qui fait son petit bonhomme de chemin, le GPS de Guillaume Soro qui est officiellement dissous, mais qui se mobilise en souterrain et le FPI de Affi N’guessan qui balance entre le socialisme qu’il chante et une éventualité d’alliance avec le régime libéral en place. Etat des lieux dans les trois grands partis politiques (PDCI-RDA, RHDP, PPA-CI) sur le chemin de la présidentielle de 2025

– Au PDCI-RDA : Sans l’avoir déclaré officiellement, le parti est à l’heure de la candidature à la candidature pour la présidentielle. Le Parti, à vrai dire, ne manque pas de cadre à la hauteur, encore moins d’ambition. Toutes les générations (celle dite ancienne et celle dite montante) regorgent d’hommes et de femmes de valeurs qui sont tous aussi présidentiables les uns que les autres.

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Si les débats ouverts par une sortie de Jean Louis-Billon, Secrétaire Exécutif en charge de la Communication et de la propagande, ont l’avantage de jeter très tôt le pavé dans la mare pour ce qui est du cheval sur qui parier en 2025, la priorité semble la cohésion du parti, la mobilisation et surtout la détermination à revenir au pouvoir d’Etat en 2025, avec quelque candidat que ce soit.

 Dans une position attentiste, Tidjane Thiam est aussi aux aguets et des pions se réclamant de lui sont en train d’être poussés. Il y a d’autres cadres qui peaufinent en sourdine leur stratégie. Mais toutes ces ambitions ne seront possibles que si le Parti dont ils veulent défendre les couleurs se met en pole position.

 Pour ce faire, la célébration des 75 ans du Parti a été une tribune rêvée pour aller à la rencontre de la base, l’entendre et capitaliser ses opinions et recommandations, comme cela a été fait lors du séminaire éclaté dans toutes les délégations du pays et de la diaspora et du colloque tenu à Abidjan les 15, 16, 17 et 18 octobre dernier.

Maintenant cap sur le 13e Congrès qui devra poser les jalons d’un PDCI-RDA éternel, pour ne pas dire d’un parti encore plus vigoureux qui fait fi de la cassure générationnelle, mais plutôt favorise la synergie entre les doyens expérimentés et les juniors intrépides.

Cette vigueur a été mise en chantier par le Président Henri Konan Bédié depuis des années avec le rajeunissement des instances et la place faite progressivement aux jeunes aux élections nationales et locales. Pour donc maintenir le cap de cette vigueur, il faut absolument donner une chance de parachèvement de cet important chantier.

Cela passe absolument par le maintien à la tête du Parti du Président Henri Konan Bédié, qui incarne à l’heure actuelle le seul espoir du parti de tenir la dragée haute aux autres partis. Surtout au moment où on parle de Dialogue national inclusif qui verra certainement la participation de Ouattara, de Gbagbo…

Pour mieux négocier le grand tournant de 2025, le navire PDCI-RDA doit garder à sa barre le capitaine expérimenté et charismatique qu’est son président. Et c’est sous sa houlette et sa supervision que les intrépides commandos iront à l’abordage et l’emporter

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-Au RHDP : depuis quelques jours déjà, c’est la mise en place de l’Union du Grand Nord (UGN) qui occupe l’actualité. Sans doute, cette union a pour objectif inavoué d’œuvrer pour la survie du pouvoir Rhdp en 2025 et faire renaître le Rdr de Djeny Kobina. Une sorte de deuxième version de la charte 2 du Nord, après celle lancée au milieu des années 90 par le célèbre reggae man Koné Seydou dit Alpha Blondy.

Certes les initiateurs tentent de brandir l’objectif de développement socio-culturel du Grand Nord, mais à y regarder de près, cela ne peut qu’être de la poudre aux yeux. 90% de ceux qui ont lancé cette idée sont du RHDP, mieux de la souche radicale venue du RDR et c’est à ces mêmes qu’a été confié le Comité de restructuration du RHDP. Et ils ont attendu en 2021 où l’on parle de plus en plus d’un possible retrait de M. Ouattara de la course présidentielle en 2025, donc de sa succession.

Gilbert Kafana et ses amis du RDR originel voudraient créer un cercle RDR pour la promotion des seuls cadres du RDR dans la succession de Ouattara à la tête de leur parti et sans doute à la présidentielle comme candidat du RHDP, qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement. C’est d’ailleurs ce qui crée la friction déjà à l’intérieur de ce parti.

En effet, la mise sur pied de cette plateforme à la fois régionale et tribale met à l’étroit tous les autres militants qui avaient (naïvement) cru aux paroles de rassemblement et mordu aux appâts des postes pour se jeter dans la nasse. Ils ne peuvent se rendre compte qu’ils ne seront réduits qu’à de simples accompagnateurs pour ne pas dire applaudisseurs aux bottes des pontes du Rdr et des ressortissants du grand Nord.

En ligne de mire, le Premier ministre Patrick Achi que les radicaux Rdr trouvent désormais encombrant parce que marquant des points aussi bien au plan national qu’international et donc capable de les empêcher de garder le pouvoir au Nord. Avec Achi, tous ceux qui sont venus du PDCI-RDA, de l’UDPCI, et d’autres partis mais qui n’ont pas la chance d’être originaires du grand Nord sont visés par la sorte d’apartheid qui se met en place.

 Déjà, des transfuges des partis comme le MFA, l’UPCI, Lider crient leur mise à l’écart dans le RHDP, maintenant ce sont ceux venus du PDCI-RDA, de l’UDPCI, du FPI…, qui seront mis sous éteignoir. Et quand ils en auront assez, ce sera la bérézina. Assurément l’après Ouattara et la bataille de la succession sonneront le glas de ce RHDP bâti sur la ruse. Une inéluctable implosion à l’horizon qui perdra ce parti.  Qui vivra verra.

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-Au PPA-CI, né sur les cendres du FPI tendance Gbagbo Ou Rien (GOR), force est de constater que l’éclatement de l’Ex-FPI en trois morceaux ne va pas sans effets collatéraux. Affi N’guessan à qui on a laissé l’enveloppe garde avec lui quelques militants (que l’on le veuille ou non) qui se mettent dans la peau de ceux qui n’ont plus rien à perdre. Au point que, se trompant joyeusement de cible et d’objectif, ils ne voient qu’un seul adversaire aujourd’hui : le PPA-CI de Laurent Gbagbo dans les roues de qui il faut mettre assez de bâtons. Et Mme Simone Gbagbo est l’un de ces bâtons que le FPI tente de mettre dans les roues de son ex-époux que l’on veut la voir devenir aussi ex-camarade de parti.

D’ailleurs la rencontre entre Affi et le chef de l’Etat, la semaine dernière, aurait, selon des indiscrétions, pour conséquence l’adhésion de Simone au FPI, sinon son annonce de rester au FPI. L’actuelle compagne du président du PPA-CI, Nady Bamba prendra sans doute le dessus sur Simone affaiblie aussi. Car, en fait, politiquement que pèsera Simone sans le nom de Gbagbo ?

Il y a aussi l’équation Charles Blé Goudé qui demeure à plusieurs inconnues et qui constitue comme une pierre dans la chaussure. En attendant son retour aussi, la bataille pour la reprise en main de tous les hommes, de tout l’appareil politique est donc un peu difficile, même si cela n’est pas impossible. Connaissant Laurent Gbagbo, cet animal politique.

Gbagbo mène la bataille, avec sa dextérité, mais il faut reconnaître qu’il en sortira un peu affaibli, parce qu’il n’est pas facile de se défaire aussi facilement de ceux avec qui on a fait du chemin. Ceux qui vous ont pratiqué, ceux sur qui vous vous êtes appuyés un temps et vouloir les oublier et les ignorer en un temps record. Après que Gbagbo l’a fait naître, le PPA-CI devrait apprendre à refaire Laurent Gbagbo avant les choix décisifs pour 2025.

 Dans la lutte pour s’imposer, Laurent Gbagbo et le PPA-CI devront affronter à la fois le FPI de Affi et de Simone et le RHDP de Ouattara qui pourraient s’allier.

*Secrétaire Exécutif chargé de l’information, de l’Economie Numérique et du Bulletin de Liaison