Apologie du viol/ « …À force de rouler sans freins, un accident très grave finira par arriver un jour ».
Par Venance Konan/crocinfo.net (Pris sur sa page Facebook)
Suite à cette sortie qualifiée de honteuse et d’immorale d’Yves de Mbella, plusieurs voix, et non des moindres, se sont levées pour condamner l’acte posé, en direct sur le plateau de la chaine NCI, par cet animateur. L’ex- directeur de Fraternité Matin, Venance Konan ne s’est pas fait prier pour remonter les bretelles à ce présentateur qui se veut vedette.
La semaine aura été marquée par l’affaire Yves de Mbella. Cet animateur, pour lequel je ne cacherai pas mon amitié, a reçu sur son plateau un individu présenté comme un ancien violeur de femmes, qui a raconté avec beaucoup de complaisance comment il commettait ses crimes, puis il l’a invité à mimer la scène du viol sur un mannequin en lui posant des questions très tendancieuses.
Comme tout le monde, j’ai été indigné de voir cela, mais je ne me joindrai pas à la meute qui est en train de lyncher Yves de Mbella. Il a présenté ses excuses et les instances chargées de le sanctionner l’ont fait. Gardons-nous alors de continuer à lui jeter la pierre, car peu d’entre nous peuvent se targuer de n’avoir jamais péché. Ceci dit, qu’il me soit cependant permis de donner mon avis sur l’affaire. Yves de Mbella est issu de la société ivoirienne. Or, dans quel état se trouve aujourd’hui cette société ?
Un internaute a publié un post dans lequel il comparait notre pays à un véhicule de transport en commun appelé « gbaka », plein de passagers, et qui roule sans freins. Et lorsqu’il lui arrive un accident, tout le monde accuse la fatalité. Je partage cette image. Cela fait longtemps que notre pays roule sans freins et a fait sauter toutes ses digues morales et éthiques. Où allons-nous et où espérons-nous arriver ?
Chaque jour, lorsque je sors de chez moi à Bingerville, je me retrouve derrière des gbakas ayant le portrait d’un prétendu pasteur peint sur la portière arrière. Cet homme, ancien pensionnaire la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) où il fut détenu de longues années pour escroquerie, s’illustre particulièrement par sa vulgarité et les propos orduriers qu’il tient sur les réseaux sociaux et sur les antennes de certaines radios et télévisions. Il est cependant l’un des plus grands influenceurs de ce pays et a ses entrées chez certains hommes politiques de premier plan. Parce qu’il fait du « buzz ».
Sa sœur, dont la beauté n’est pas la qualité première qui saute aux yeux, tient, elle aussi, des propos aussi obscènes qu’orduriers sur les réseaux sociaux et en est également une des stars. Toujours sur les réseaux sociaux, de nombreuses jeunes filles pensent que c’est en tenant des propos crus qu’elles créeront « le buzz » qui est devenu le graal qu’il faut à tout prix trouver. De vils escrocs connus de tous se sont baptisés « hommes de Dieu », créent des « camps de prières » où des personnes malades mentales ou simplement accusées de sorcellerie sont torturées. Et ce sont ces personnes qui sont les nouveaux garants de l’éthique et de la morale de notre société. Où allons-nous et où espérons-nous arriver avec ça ? Peut-on s’étonner après que des gamins aillent déterrer le corps de DJ Arafat ?
Partout dans le pays, des orpailleurs sont en train de détruire les terres cultivables et de polluer tous nos cours d’eau. Ils sont en ce moment en train de détruire le parc national de la Comoé plus connu sous le nom de réserve de Bouna.
Il est connu que parmi eux se trouvent des djihadistes qui ont déjà fait couler le sang dans cette région et à Grand-Bassam. Mais des forces de l’ordre se bousculent pour être affectées dans la région où ils sévissent. Pas pour les combattre, mais parce que les djihadistes sont généreux et distribuent beaucoup d’argent. Où allons-nous et où espérons-nous arriver avec ça ?
Il y a quelques jours, l’on m’a raconté cette sordide histoire. Une fillette de douze ans, qui est déjà en classe de troisième, est allée passer des vacances chez des parents de sa mère à Yopougon en compagnie de ses cousines âgées de neuf et quatorze ans.
Deux hommes de la famille, âgés de 39 et 40 ans ont procédé à des attouchements sur elles, sous prétexte de vérifier si elles sont toujours vierges, en filmant les scènes. Ils ont envoyé les images à leurs amis et la mère de la fillette de douze ans a fini par les voir. Elle a porté plainte.
Aussitôt les deux pervers sont allés voir les policiers. Actuellement les membres de la famille et les policiers font pression sur la mère pour qu’elle retire sa plainte. C’est sur elle que l’on met désormais la culpabilité parce qu’elle chercherait à « honnir » la famille. Où allons-nous et où espérons-nous arriver avec ça ?
À force de rouler sans freins, un accident très grave finira par arriver un jour. À quoi sont dues les différentes crises que nous connaissons depuis le décès d’Houphouët-Boigny, si ce n’est à cette absence de morale et de valeurs qui caractérise désormais notre pays. Non, nous ne voyons pas le danger venir.
La Fesci a tué et violé des étudiants ici, Fofié a enfermé des dizaines de personnes dans un container jusqu’à ce que mort s’ensuive. Ce n’est pas parti quelque part comme on dit. Nous ne voyons pas dans quel état se trouvent des pays comme le Mali, le Burkina Faso, le Niger, le Nigeria, la République démocratique du Congo, le Tchad, le Cameroun, la Centrafrique, le Sud-Soudan. Non, nous ne savons pas comment ils en sont arrivés là. Continuons à chercher le buzz.
C’est le gros boum de l’explosion de notre société que nous entendrons. La civilisation occidentale est en déclin. Et nous, qui sommes l’appendice de cette civilisation, c’est-à-dire l’organe où est stocké tout ce qui n’est pas utile au bon fonctionnement du corps, sommes les premiers à nous décomposer.
Et notre état de décomposition est tel que nous ne le voyons même pas, malgré tous les signes qui sont sous nos yeux. Nous préférons nous bercer de la douce illusion d’une Afrique qui se réveillera bientôt. N’est-ce pas que nous sommes les derniers à croire fermement au retour prochain de Jésus-Christ ?
N.B : le chapeau est de la rédaction