Musique/Félix Wazekua, un intellectuel au service de la musique
Interview réalisée par Brou François/afriquematin.net
Depuis son premier album avec Mbilia Bel intitulé « Promesses élastiques », Félix Wazekwa veut promouvoir la musique féminine en République démocratique du Congo (RDC). Dans cet espace réservé et prédéfini pour les hommes, l’artiste apporte son coup de pouce à la gente féminine dans cet univers. L’auteur de « l’article 23 » qui cartonne en ce moment a reçu afriquematin.net dans son appartement à Bagneux dans la banlieue parisienne.
Félix Wazekwa S’Grave, vous êtes né en République démocratique du Congo, vous êtes artiste musicien. Les mélomanes constatent que vous êtes beaucoup plus paroliers que chanteurs ?
Je suis, en effet, né en République Démocratique du Congo. Ayant été le parolier de plusieurs artistes, dont Papa WEMBA, les mélomanes considèrent plus mon côté parolier. C’est une très bonne chose pour moi parce que cela me permet au moins d’avoir une reconnaissance et un qualificatif par rapport à mes atouts. Je ne suis pas inclassable et le problème pour un artiste est, en mon humble avis, d’avoir une référence ou d’être reconnu par rapport à une aptitude. Il reste par conséquent vrai que le contenu de mes chansons ne laisse personne indifférent. C’est pourquoi, j’avais publié mon livre « Les petits bonbons de la sagesse » pour bien rendre compréhensible le fond de mes pensées. Je remercie les mélomanes pour l’accueil qu’ils ont réservé à mon livre paru aux éditions BERGAME.
Peut-on savoir pourquoi le verbe et la poétique reviennent à plusieurs reprises dans vos chansons ?
En écrivant mes chansons, je reste d’abord dans l’optique de la transmission de la connaissance. Ma démarche est avant tout philosophique. La sagesse est pour moi un réceptacle où je dois puiser l’essentiel de mes propos. Je crée mes propres proverbes pour ne pas toujours revenir sur les livraisons de nos aïeux. Aujourd’hui, beaucoup d’artistes essayent de faire comme moi : produire sa propre pensée, son microcosme, au lieu de recourir à tout bout de champ aux idées déjà entendues.
En 1993, alors que vous veniez d’écrire une chanson pour Papa Wemba, il va vous suggérer pour la première fois de chanter ses propres chansons. A cette proposition qui marque pour vous une carrière solo, une crise de confiance va naître entre vous et Koffi Olomidé. Qu’en est-il exactement ?
Avant de travailler avec Papa WEMBA, j’étais en collaboration avec Koffi Olomidé comme parolier. C’est sur le conseil de Papa WEMBA que j’ai commencé ma carrière en tant que chanteur. D’ailleurs, il a été en featuring avec moi dans deux chansons de mon premier album « Tétragramme ». Il faut dire que Koffi Olomidé n’avait pas apprécié mon rapprochement auprès de Papa WEMBA qui, à l’époque, n’était pas en bonne relation tous les deux.
A quel moment aviez-vous pris goût à la musique ? Et que représente pour vous, ce choix ?
J’ai toujours été un amoureux de la musique. J’ai commencé très jeune, dès mon adolescence. Je dois néanmoins une fière chandelle à Papa WEMBA qui a été un bon visionnaire pour moi. Aujourd’hui, la musique est mon métier malgré mes études universitaires. J’ai pu réaliser beaucoup de choses grâce à elle.
On constate que des rivalités naissent au sein de votre corporation, surtout entre vous artistes musiciens congolais. Félix Wazekwa est-il en conflit avec certains artistes de son pays d’origine ?
Les conflits entre artistes font partie de notre quotidien. C’est de cette rivalité, de cette concurrence, que naissent les mélodies et les danses. En politique, le vote permet de choisir une personne qui va régner pendant un laps de temps que l’on soit d’accord ou non. En musique, le manque de vote fait que l’on soit en « campagne » à tout moment par nos discussions.
Vous êtes considéré quelque part comme un homme investi d’une noble mission. Intellectuel que vous êtes, vous divertissez tout en éduquant les masses. D’où tirez-vous vos inspirations ?
Mon inspiration tire son origine de la parole de Dieu. C’est cette parole qui nous rend sage. Je m’inspire également de l’observation de la vie quotidienne. Je suis l’avocat de tout le monde, de chaque cas, de n’importe quelle situation qui exige un plaidoyer. L’inspiration est partout. Il suffit de savoir saisir cette opportunité. Il faut savoir appréhender l’instant, le moment, l’acte qui va vous inspirer. Il faut bien sûr beaucoup de métier pour faire de l’argile un vase.
Dans un passé récent, la maladie Ebola a fait rage dans votre pays, la RDC, aujourd’hui l’on parle de coronavirus, cette autre pandémie qui secoue le monde entier. En tant qu’artiste, éveilleur de conscience, quel message pouvez-vous porter à vos mélomanes, aux populations africaines et aux êtres vivants sur la planète terre ?
La covid-19 est une grave maladie qui a mis tout le monde à genoux. Si c’était au cinéma, on allait dire que la mise en scène est exagérée. Force est de constater que la réalité a dépassé la fiction. J’encourage ceux qui vont me lire à observer les gestes barrières, notamment le port du masque. C’est pandémie est une nouveauté pour chacun de nous. Tout le monde ou presque est dans les tâtonnements. Il vaut mieux suivre les recommandations du corps médical et, en particulier, de l’OMS.