Sanctions de la Cédéao contre le Mali/Kobena Tah Thomas : « Notre rôle…, c’est d’assister le peuple malien et non de le punir, de l’ostraciser »

La Chronique ‘’Les Actualités Politiques Ivoiriennes’’, numéro 16 du mercredi 19 Janvier 2022, de M. Kobena Tah Thomas, vice-président du PDCI-RDA.

La question malienne intéresse et préoccupe de nombreuses personnes dans l’espace de la CEDEAO et même au-delà. En regardant les sanctions de l’organisation sous régionale ouest-africaine contre ce pays, l’on s’interroge sur le vrai sens de la démocratie, le sens de ses valeurs et le mode de son administration aux populations de nos Etats.

En effet, la CEDEAO a décidé de fermer les frontières avec le Mali au sein de l’espace sous régional, de suspendre les échanges commerciaux autres que les produits de première nécessité, de couper ses aides financières et de geler les avoirs du Mali à la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Les pays membres vont aussi rappeler leurs ambassadeurs au Mali.

Bien sûr, personne ne peut pas émettre d’opinion favorable au régime de la transition malienne sans courir le risque de se faire lyncher. Prenons quand-même le risque de le faire. Parce que le régime en place est issu d’un putsch ! Lui accorder une attention ou analyser la situation du pays, de son peuple avec un peu plus de recul, c’est s’exposer au courroux des arbitres de la politique internationale.

L’outrecuidance malienne à décider d’une réponse plus appropriée au djihadisme et aux désordres qui ont cours sur son territoire lui a coûté des sanctions très dures que nous connaissons tous.

Donc, quelle que soit la qualité des actions que ce régime entreprendra en faveur du Mali et des populations maliennes, elles seront entachées de la salissure anti-démocratique de son accession au pouvoir.

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Quand-même des millions de Maliennes et de Maliens sortiront – et ils sont sortis le 12 janvier 2022 – pour acclamer le groupe qui dirige cette transition et lui témoigner de son soutien, ce régime sera voué aux gémonies par les puristes de la démocratie du fait de n’être pas issu de l’un des nombreux processus dits démocratiques habituellement connus.

Au nom donc de la démocratie et des vertus que les humains lui ont inventées, il a été admis et toléré que des bandes armées inquiètent ce pays en exécutant des otages, en assassinant de pauvres populations.

Au nom de la démocratie, les forces Armées Maliennes devraient se taire et assister éternellement aux massacres de leur peuple, à l’installation de l’anarchie le plus totale.

Au nom de la démocratie et des fantaisies que recommande son formalisme, il était souhaitable d’espérer indéfiniment la mise en œuvre hypothétique des accords militaires avec certaines puissances occidentales qui promettent monts et merveilles sans jamais parvenir à débarrasser le Mali de sa gangrène djihadiste ! Inutile d’ajouter que le Malien lambda paye le prix le plus fort, au prix de sa faim et de son dénuement, ces accords inopérants.

 En revanche, créer un intermède dans le long drame malien et donner une chance de pacifier ce vaste territoire nous semble le moindre mal surtout que les solutions antérieures sont restées toutes inopérantes. C’est pourquoi, briser l’élan du sursaut malien qui renonce aux fausses vertus d’une démocratie formaliste par des sanctions qui risquent d’asphyxier le régime et le peuple, c’est aussi se faire complice des djihadistes.

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Le calcul est plutôt simple. Ce dont a souffert le Mali, c’est l’usage de son territoire comme foyer du djihadisme par une multitude d’acteurs irréguliers. La junte au pouvoir dit avoir trouvé une solution avec des partenaires plus efficaces et le peuple malien, visiblement, ne s’en plaint pas ! Jusqu’alors, et sauf ignorance de ma part, personne ne s’est plaint d’exactions ni de violations des droits humains ! A quoi sert la démocratie si ce n’est en priorité de garantir la quiétude des populations, la sécurité des biens et des personnes et la libre participation aux affaires publiques ?

Entre une démocratie formaliste qui livre toute une nation aux instincts de prédateurs connus et inconnus et la réalisation de la volonté populaire d’un peuple qui a soif de liberté, le choix a été fait.

Notre organisation sous régionale a peut-être le droit d’exclure quiconque de ses Etats membres ne rentre pas dans la logique de son fonctionnement. Mais je doute qu’elle soit autorisée à actionner ses partenaires pour réaliser l’asphyxie d’un Etat et de son peuple. Or, c’est bien ce qui est le cas actuellement ! Comme dans une mission d’imposition de la démocratie, elle s’ingère dans les affaires internes politiques du Mali, dicte ses injonctions en oubliant que la pertinence de ses propres actions vise en priorité la sécurité des populations.

Comme on peut le voir, le recours à la fermeté, à la rigueur contre l’Etat du Mali indique un attachement de nos Etats aux formes extérieures des systèmes politiques. Le but ultime des politiques qui sont initiées l’intérieur des systèmes importe peu ! Malheureusement !  Et ce but-là, en ce qui concerne le Mali, c’est de débarrasser le territoire des djihadistes, de libérer ce vaste pays et son peuple des griffes de ceux qui gagnent à le désorganiser.

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Notre rôle dans ce but-là, c’est d’assister le peuple malien et non de le punir, de l’ostraciser.

Merci et à mercredi prochain.