Élections locales/Le Sénégal retient son souffle

Les élections locales démarrent le week-end prochain et les candidats auront deux semaines pour convaincre, les électeurs jusqu’au dimanche 23 janvier. Les enjeux vont bien au-delà du contrôle des grandes villes, car ce scrutin permettra aux différentes forces politiques sénégalaises de confirmer leur ascension, d’asseoir leur hégémonie, ou d’essayer d’enrayer leur déclin.  Professeur de Science politique à l’université de Saint-Louis, Moussa Diaw donne son avis.

 À quel point les enjeux électoraux vont-ils peser dans le choix des électeurs lors de la prochaine élection locale ?

 Les enjeux nationaux vont peser parce qu’on est dans un paysage qui bouge avec l’apparition de nouvelles élites, des jeunes. C’est un test grandeur nature pour les leaders, pour se peser au niveau de l’opinion publique, et aussi pour faire valoir leurs projets de société comme alternative par rapport à la gouvernance actuelle.

Dakar et Ziguinchor sont deux grandes villes qui s’affichent. Et à Dakar, tout d’abord, la question est de savoir si la majorité va réussir ou non à conquérir la capitale, qui est pour l’instant entre les mains de l’opposition.

Pour le Professeur Moussa Diaw « c’est un test grandeur nature pour les leaders, pour se peser au niveau de l’opinion publique, et aussi pour faire valoir leurs projets de société comme alternative par rapport à la gouvernance actuelle ».

Oui, ce ne sera pas facile de conquérir la capitale, bien que la majorité ait mis les bouchées doubles autour d’Abdoulaye Diouf Sarr, qui est ministre de la Santé et de l’Action sociale. Le pouvoir mise donc sur lui pour gagner la capitale, mais ce ne sera pas facile, il y a de grandes coalitions d’opposition qui sont nées, notamment la coalition Yewwi Askan Wi autour de Sonko et Khalifa Sall, et vous avez aussi Wallu Sénégal autour du PDS et d’autres. Dakar c’est quand même une ville symbole, c’est quand même un enjeu important pour se positionner au niveau de l’électorat sénégalais.

LIRE AUSSI :   Depuis sa prison, Sidiki Diabaté parle à ses fans

 Ousmane Sonko, qui avait réalisé une percée spectaculaire lors de la présidentielle, à Ziguinchor fait-face au sortant Abdoulaye Baldé, dissident de la majorité présidentielle, lui aussi fait face également au candidat du parti au pouvoir Benoît Sambou. Y-a-t-il un enjeu ?

Oui, Ousmane Sonko s’est lancé dans la bataille parce qu’il a besoin d’avoir une base et cette base c’est Ziguinchor où il avait gagné une bonne partie de l’électorat lors des élections présidentielles. Et donc il remet cela, et met à contribution tous les acteurs qui sont autour de lui dans sa coalition. Il mène le combat en publiant d’ailleurs un livre programme pour cette ville, d’où il faut qu’il réussisse. S’il ne réussit pas, cela risque de compromettre ses projets d’avenir. Donc l’enjeu est de taille.

Le parti fondé par l’ancien président Abdoulaye Wade, le Pds, n’avait pas de candidats lors de la présidentielle de 2019. Sa dernière participation remonte donc aux législatives de 2017. S’agira-t-il d’une élection-test pour ce parti alors que depuis cette échéance cette formation politique a connu de très nombreuses divisions ?

Oui, c’est vrai, c’est une élection test pour le PDS parce que depuis le départ de l’ancien président et l’annonce de la succession par son fils, il y a eu beaucoup de défections. La plupart des leaders qui étaient là sont partis et ont rejoint la majorité ou bien ont créé leur propre formation politique. Les militants sont un peu déstabilisés parce qu’il y a l’absence du président Wade, son fils n’est pas là et il n’y a pas de leader charismatique pour prendre le relais.

LIRE AUSSI :   Début du confinement en France, désinfection des transports… le point sur le coronavirus

Risque-t-on d’aller vers une nouvelle poussée de tensions pour ces élections ?

Oui, on risque d’arriver à de nouvelles poussées de tensions… Déjà elle a été palpable, cette tension, avec la confection des listes et bien sûr les rejets de certaines listes. Il y a eu des recours, mais sur les 22 recours qui ont été introduits, seulement deux sont revenus à l’opposition. Donc cela veut dire qu’il y a une forte tension sur le débat autour de ces listes-là et naturellement ça n’améliore pas le climat social pour préparer des élections sereines, transparentes et calmes.

Et qu’est ce que  cette élection représentera-t-elle pour le président Macky Sall, selon vous ?

Cette élection lui permettra de savoir si les Sénégalais ont apprécié sa gouvernance, sa politique, est-ce qu’il est soutenu. C’est en fonction de ce résultat-là qu’il va se déterminer, me semble-t-il, par rapport à des enjeux importants pour l’avenir.

Source: rfi.fr