Politique Ivoirienne /Non, monsieur le président, pas vous !

Par  Adama Wade, Directeur de publication de Financial Afrik.

Lettre ouverte au président Alassane Ouattara

L’élan économique extraordinaire pris par la Côte d’Ivoire depuis votre arrivée au pouvoir, au terme d’une crise post-électorale meurtrière, force le respect. En dix ans, l’éléphant a progressé à pas de géant, avec des moyennes de croissance record du PIB, la construction de routes et d’autoroutes, l’augmentation de la puissance électrique installée.

Certes, cette relance keynesianiste n’a pas toujours correspondu avec la création d’emplois, ni entraîné de véritables gains de bien-être. Le taux de pauvreté est criard puisque plus de 40% de vos concitoyens vivent dans des conditions précaires ; celui du chômage est encore plus important. Mais qu’est-ce que l’élan que vous avez imprimé à l’économie de la Côte d’Ivoire, à travers les deux plans nationaux de développement (PND) successifs, a été fructueux, en termes d’attractivité des investissements, de création des entreprises et d’amélioration du climat des affaires !
En dix ans, vous avez relié le fil conducteur de l’économie ivoirienne avec l’idéal d’une économie ouverte et prometteuse. Autant d’efforts, monsieur le président, ne devraient être “bazardés”par un hypothétique troisième mandat qui, quand bien même il serait par extraordinaire conforme à la lettre de la nouvelle constitution que vous avez fait adopter par référendum, violerait l’esprit de la démocratie, de la bonne gouvernance (dont vous êtes supposé être un des champions) et condamnerait la Côte d’Ivoire, pays où l’âge médian tourne autour de 25ans, à retomber tel Sisyphe, au pied de la montagne pour un éternel recommencement du cycle de l’absurde.

LIRE AUSSI :   Burkina Faso/Voici les revendications des mutins

Monsieur le président, en cédant aux courtisans qui vous demandent de rester, vous condamnez en même temps ce bilan économique qui force le respect et vous forcez le libéralisme à reprendre son chemin de croix sous les tropiques à la recherche d’un autre leader qui l’incarnerait mieux, en alliant nécessité de croissance économique et exigence de bonne gouvernance politique. En vous laissant bercer par les sirènes des mobilisations folkloriques dont vous n’ignorez du reste rien des orchestrations, vous détricotez votre crédibilité et vous dévaluez la valeur et le poids de votre parole ! Se faisant, vous compromettriez votre droit à la trace indélébile dans l’esprit de vos concitoyens, des africains et des démocrates en général.

En cédant aux passions du moment, vous ouvrez la boîte de Pandore que d’autres de vos compères attendaient pour faire voler en éclat le verrou -impérieux sur notre continent-de la limitation des mandats. Nul n’est indispensable, monsieur le président et c’est là une vérité biologique, sociale et politique que d’autres essayent de vous faire oublier pour leurs intérêts économiques, politiques ou sociaux.

Panafricainement vôtre.