Tunisie : le candidat emprisonné Nabil Karoui englué dans une nouvelle polémique

La publication par les autorités américaines d’un contrat de lobbying pour le candidat à la présidentielle tunisienne Nabil Karoui a déclenché une polémique en Tunisie, où le montant du contrat, un million de dollars, dépasse largement le seuil des dépenses de campagne autorisées.

Dans un communiqué publié jeudi, son parti Qalb Tounes, en lice pour les législatives prévues le 6 octobre, a qualifié ce contrat de “rumeurs” et de “campagnes diffamatoires” contre Nabil Karoui.

Le département de la Justice américain a publié, dans le cadre d’une directive obligeant les lobbyistes à détailler leurs activités au profit d‘étrangers, un document reçu le 26 septembre, prévoyant l’intervention d’un lobbyiste basé au Canada, Ari Ben-Menashe.

Cet homme qui se présente comme un ex-agent des renseignements israéliens dirige la société de consultants politiques Dickens and Madison.

Ce document, dont la publication a été révélée par le site Al Monitor mercredi et qui a suscité depuis beaucoup de commentaires sur les réseaux sociaux en Tunisie, comprend un contrat au profit de M. Karoui mais signé par un tiers.

M. Ben-Menashe s’y engage à “faire du lobbying aux Etats-Unis, en Russie, à l’ONU (…) afin d’obtenir la présidence de la République tunisienne”.

“Nous nous efforcerons d’arranger une rencontre avec l’honorable M. Donald Trump” et le Président russe Vladimir Poutine, ainsi que d’“obtenir un soutien matériel (…) pour parvenir à la présidence”, est-il ajouté.

Le prix mentionné dans ce contrat signé le 19 août, soit trois mois après l’officialisation de la candidature de M. Karoui, est de un million de dollars pour un an. Selon le document, 250.000 dollars ont été payés le 25 septembre, et les 750.000 restants sont dus mi octobre 2019.

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Ce montant dépasse largement les dépenses de campagne autorisées par l’instance chargée des élections : 1,7 million de dinars (630.000 dollars) pour le premier tour et un million de dinars pour le second.

“Campagnes féroces”

“Il n’y aucune relation de près ou de loin entre Nabil Karoui (…), et les parties ayant signé ce contrat, ainsi que son contenu”, a réagi dans un communiqué son parti Qalb Tounes.

La même source a déploré “des campagnes féroces contre Nabil Karoui depuis plusieurs années”.

Le parti de M. Karoui assure qu’il saisira la justice pour que soient punis ceux “qui visent à déformer son image, à influencer les électeurs et à perturber le processus électoral”.

Nabil Karoui, homme d’affaires controversé arrivé en deuxième place au premier tour le 15 septembre avec 15,6 % des voix, inculpé pour fraude fiscale et blanchiment d’argent, est incarcéré depuis le 23 août.

Plusieurs demandes de libération pour qu’il puisse faire campagne ont été refusées par la justice. Le deuxième tour doit avoir lieu le 13 octobre.

Dans un communiqué publié jeudi, la mission d’observation électorale de l’Union européenne a de nouveau appelé à ce que M. Karoui “soit en mesure de mener campagne, dans le cadre de l‘égalité des chances avec le candidat Kais Saied”.

Plusieurs autres dirigeants politiques tunisiens ont eu recours à des lobbyistes internationaux selon les documents publiés par le département de la Justice, mais pour des montants moins élevés.

On y trouve plusieurs contrats concernant le parti d’inspiration islamiste Ennahdha.

La firme de conseil BCW a déclaré en août 2019 avoir été employée pour 7.500 dollars par le parti afin de l’aider à “contacter des médias et des décideurs”, dont plusieurs cadres du département d’Etat.

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Le cabinet de relations publiques Burson-Marsteller, qui fait parti de BCW, avait également déclaré en février 2019 avoir été employé pour contacter des élus américains et des journalistes, mentionnant des paiements de 200.000 dollars au total.

La mécène Olfa Rambourg, chef de file du mouvement Aïch Tounsi et candidate aux législatives à Bizerte, a également signé un contrat avec une firme américaine afin d’organiser des rencontres avec des décideurs économiques aux Etats-Unis et en Europe. La facture s‘élève à 28.000 dollars de mai à juin 2019.

AFP