Agboville : les évêques catholiques de Côte d’Ivoire demandent au Gouvernement de poursuivre et d’achever le processus du désarmement

Par Tizié TO Bi – Correspondant régional

Les travaux de la 113è Assemblée plénière de la Conférence des évêques catholiques de Côte d’Ivoire(CECCI), se sont tenus du mardi 18 au samedi 22 juin dernier. Ainsi, au terme de ce conclave, l’épiscopat ivoirien a, dans une déclaration, appeler le Gouvernement à s’impliquer davantage dans la construction de la paix. Ceci, en procédant au désarmement effectif de tous ceux qui n’ont le droit de porter des armes. C’était, à la messe de clôture tenue ce dimanche, à la Cathédrale Saint Jean-Marie Vianney d’Agboville.

Ci-dessous la déclaration de la CECCI dont Afriquematin.net, a reçu une copie.

Chers compatriotes,

Et vous qui vivez en Côte d’Ivoire,

Au terme des travaux de la 113è Assemblée plénière de notre Conférence, nous Archevêques et Évêques de Côte d’Ivoire, en vertu de notre mission prophétique, ne saurions passer sous silence les questions qui se posent et les débats qui ont cours en ce moment dans notre pays, et qui sont régulièrement relayés par la presse nationale et internationale. Nous avons ressenti comme un voir, de réaffirmer notre désir de construire avec vous, une Côte d’Ivoire rassemblée dans l’unité et la paix.

Nous voulons, en écrivant ce message, éviter à notre pays, une autre crise. Nous souhaitons que ces débats, qui ont cours actuellement dans un environnement de crise sociale sur fond politique, se poursuivent dans un climat de sérénité et dans un souci de recherche authentique de la paix.

Il s’agit de vider ces contentieux qui minent depuis de nombreuses années la vie sociale et politique de notre pays et qui n’épargnent aucune région. En effet, force est de reconnaitre qu’à l’approche des échéances électorales de 2020, il règne un climat de peur généralisée au sein de la population ; peur liée à la réalité des conflits intercommunautaires récurrents, aux questions d’insécurité, du foncier, de l’occupation illicite des forêts classées, de l’orpaillage clandestin et des problèmes relatifs à l’identité ivoirienne.

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En déplorant avec vous tous les spectacles désolants de ces derniers temps, nous voulons également avec vous, exorciser les vieux démons de la haine et de la division. Nous saisissons l’occasion pour exprimer notre proximité spirituelle et notre compassion aux familles qui ont perdu des proches et des biens. Et à tous les acteurs de la vie sociopolitique, à quelque niveau qu’ils soient, nous lançons ce cri de cœur, qui est aussi celui du peuple : Évitez-nous une autre guerre !

En effet, après plus de deux décennies de graves crises qui ont tristement marqué l’histoire de la Côte d’Ivoire et à quelques mois des échéances électorales de 2020, la responsabilité de tous ceux qui détiennent l’autorité – à quelque niveau que ce soit – leur impose de tout mettre en œuvre pour travailler à la réconciliation et à la cohésion sociale, pour prévenir les crises et consolider la paix.

Certes, construire la paix n’est pas œuvre facile. Cependant, nous vous le demandons avec insistance, à vous qui tenez entre vos mains, la destinée de notre peuple : Évitez-nous une autre guerre !

À ce titre, nous Archevêques et Évêques de Côte d’Ivoire, demandons spécialement au Gouvernement, au nom de la paix, de poursuivre et d’achever le processus du désarmement, car les armes circulent encore dans notre pays et ce n’est un secret pour personne. En effet, comment comprendre qu’à chaque conflit intercommunautaire, des armes blanches et des armes de guerre soient régulièrement et professionnellement utilisées, ce qui est de nature à traumatiser nos populations. Devant cet état de fait, une fois encore, et au nom du droit à la vie, nous vous le demandons : Évitez-nous une autre guerre !

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Déjà le 25 janvier 2015, au terme de notre 99è Assemblée Plénière à Abengourou, nous avions posé comme l’un des préalables à l’organisation des élections, le désarmement effectif de tous ceux qui n’ont pas le droit de porter des armes.

Aujourd’hui encore, nous lançons cet appel pressant, au nom de la paix et pour une vraie réconciliation : tous, désarmons nos cœurs, nos bouches et nos bras, car il y va de la vie de notre nation. C’est pourquoi, à présent, nous lançons cet appel à tous nos concitoyens et à tous les habitants de ce pays : acteurs politiques, jeunes, hommes et femmes de médias, guides religieux : Évitez-nous une autre guerre !

Pour ce faire, nous exhortons tous nos concitoyens à être des artisans de paix, en consolidant les acquis en matière de cohésion sociale. La paix est le premier don que le Christ Ressuscité à fait à ses disciples : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix (Jean 14, 27a) ». En tant que croyants et hommes de bonne volonté, nous en sommes tous les porteurs, les témoins et les artisans.

Dans les difficultés inhérentes à notre marche commune, continuons ensemble à promouvoir la culture de la paix dans la justice et la vérité : « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu (Mt 5,9) ».

Nous exhortons les uns et les autres à la culture du pardon, en vue de construire une Nation forte et prospère. En effet, le pardon libère des ressentiments, de la haine et de la vengeance qui mènent à la mort. Dans le contexte de la crise et de la méfiance qui nous affectent aujourd’hui dans ce pays, pardonner, c’est se donner la chance de regarder ensemble l’avenir avec optimisme.

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Pour y parvenir, ouvrons nos cœurs à l’action de l’Esprit Saint qui est capable de rétablir les relations brisées, car il est l’Esprit de réconciliation et de paix. Et comme le souligne notre Saint Père, le Pape François, dans son Exhortation Apostolique : « L’Esprit Saint possède imagination infinie, qui sait dénouer les nœuds même les plus complexes et les plus inextricables de l’histoire humaine » (Evangelii Gaudium – La joie de l’Évangile – au numéro 178).

Que par l’intercession de la Vierge Marie, Notre Dame de la Paix, le Seigneur accorde à notre Nation de poursuivre sa marche dans la vérité, la concorde, la prospérité, la justice et la paix.

Évitez-nous une autre guerre ; évitons-nous une autre guerre.

Donné à Agboville, le 23 juin 2019