Les Kurdes inquiets en Syrie après le départ des Américains

L’affaiblissement de la coalition risquerait d’entraîner indirectement la libération de djihadistes étrangers.

Initié par Donald Trump, le retrait des troupes américaines de Syrie présente de gros risques pour les Kurdes. La responsable kurde Ilham Ahmad a tiré la sonnette d’alarme ce vendredi à Paris, indiquant que ce retrait pourrait contraindre la coalition arabo-kurde à renoncer à combattre Daech et entraîner indirectement la libération de centaines de djihadistes étrangers, notamment Européens, qu’elle détient.

« Combattre le terrorisme sera difficile parce que nos forces seront obligées de se retirer des lignes de front [dans la province] de Deir-Ez-zor [dernier bastion de Daech, NDLR], pour prendre position sur la frontière avec la Turquie pour contrer toute éventuelle attaque », a déclaré Ilham Ahmad, qui doit être reçue au palais présidentiel pour discuter avec l’exécutif français de la nouvelle donne provoquée par l’annonce du président américain.

Donald Trump a en effet déclaré mercredi que les Etats-Unis avaient « défait Daech en Syrie », et qu’il allait ordonner par conséquent le retrait des quelque 2000 militaires américains déployés en Syrie. Le retrait de ces soldats, qui combattent aux côtés de la coalition arabo-kurde, a causé la démission de son secrétaire à la Défense, James Mattis.

Les conséquences de ce retrait changent complètement la donne dans ce pays en guerre et transforment les équilibres entre les différents belligérants. Les Kurdes tentent donc de faire pression sur les Occidentaux afin qu’ils ne les lâchent pas. « Nous craignons de ne plus maîtriser la situation et qu’il soit difficile pour nous de les garder dans une localité déterminée » en cas d’offensive turque, a souligné Ilham Ahmad.

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Un autre responsable également présent à Paris, Riad Drar, a déclaré qu’une telle libération serait évidemment involontaire. « Nous craignons que le chaos [que provoquerait une offensive turque, NDLR] ne nous permette pas de protéger les localités où [les djihadistes] se trouvent ».

Le sort des djihadistes étrangers détenus en Syrie est un vrai casse-tête pour les nombreux pays d’origine de ces prisonniers, qui ne souhaitent pas leur libération, mais ne souhaitent pas non plus les récupérer sur leur sol, offrant ainsi à leurs geôliers un levier diplomatique important.

« Nous demandons aux Français un soutien diplomatique », a déclaré Ilham Ahmad, estimant que les autorités françaises « peuvent faire pression sur la Turquie pour qu’elle arrête ses menaces ». « Nous avons demandé aussi que les forces [françaises NDLR] assument leur tâche dans la région jusqu’à ce qu’une solution politique soit trouvée », a-t-elle ajouté.

La France participe à une coalition internationale conduite par les Etats-Unis pour combattre les djihadistes en Syrie et en Irak. Elle y a déployé son artillerie et son aviation. Selon plusieurs sources, des éléments des forces spéciales sont aussi présents au sol en Syrie, mais le gouvernement n’a jamais confirmé cette présence.

« Nous ne partageons pas du tout l’analyse [de Donald Trump] selon laquelle le califat territorial serait anéanti », a déclaré ce vendredi matin la ministre française des Armées Florence Parly. « Nous considérons aujourd’hui que si le califat territorial n’est plus ce qu’il était en 2014 […], s’il est réduit à peau de chagrin, il reste encore une poche dans laquelle les djihadistes de Daech sont repliés », a-t-elle ajouté, avant de conclure : « Le risque, en ne finissant pas ce travail, c’est de laisser perdurer des groupes et que ces groupes reprennent leurs activités ».

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Source : l’express