Guérisseurs /Conversion en monothéisme ou  mélange de pratique ?

Enquête réalisée par Haidmond Kaunan/afriquematin.net 

 En Côte d’Ivoire les guérisseurs sont très souvent consultés à la fois pour les problèmes sociaux, familiaux ou de santé. Ils sont les  seuls à parler le langage des esprits, ou à guérir .Comment soignent-ils? D’où vient leur pouvoir qui font d’eux une sacrée autorité ?

En Afrique le pouvoir de soigner ses semblables est toujours associé  à une initiation, un passage…Tous les guérisseurs racontent ce moment comme une révélation. Pourtant extérieurement le récit  de l’événement qui a changé leur vie  a plutôt la forme d’un traumatisme, d’une épreuve.

Vainqueurs, ils disent avoir acquis un pouvoir qui les rend différent, capables de voir la condition humaine, l’inavouable avec lucidité, sagesse et compréhension. Ce pouvoir, loin, des les  éloigner de l »homme, les a humanisés davantage et ont surmonté leurs différences et se sont intégrés à la communauté comme régénérés par la conscience. Ils répugnent qu’ils ont appris un métier et omettent quelques années d’apprentissage qu’ils ont passées chez un maître avant d’ouvrir  leur propre maison de soins. Ils préfèrent assumer leur rôle social de conciliateur, d’intégrateurs  en usant d’une parole qui se dit inspirée, car elle se dit ramener l’harmonie. En ce sens qu’ils se considèrent comme des maîtres de la parole et détenteurs du verbe.

Les forces de l’invisible, le sacré, le merveilleux comme le tragique sont présents en son esprit à chaque instant de sa vie. Il baigne  ainsi dans un quotidien magique où il se concilie les forces qui le dépassent. Pour cela,  il consulte le devin guérisseur, qui, seul possède le langage des esprits  venant de l’au -de-là, qui peut intercéder en sa faveur.

L’Africain est profondément attaché à son clan, à  sa lignée et à sa famille au sens élargie du terme, dans laquelle il a acquis l’enseignement moral et spirituel, lui permettant de prendre place dans la société. Ainsi le poids des liens communautaires imprègnent toutes les décisions de sa vie. Le bien concourt à l’harmonie du groupe, le mal est ce qui perturbe le respect des  traditions. D’où la difficulté pour l’africain de se séparer des divinités et s’attacher totalement au christianisme. L’on ne s’étonne pas pourquoi que des sorciers, jeteurs de sortilège soient considérés comme des hors-la-loi et soient impitoyablement chassés lorsqu’ils sont découverts par la puissance du Saint-Esprit.

L’influence du Charismatisme   

Cependant la colonisation, l’école, la modernité et l’introduction des religions monothéistes sont en voie d’ébranler ce système ancestral. L’africain a dû s’adapter en seulement quelques générations et passer d’une société essentiellement agricole. Ce changement brutal a créé un traumatisme et la fonction de guérisseur est plus que jamais de replacer l’individu dans les racines et dans ses traditions. Ils sont en voie d’adaptation. Aujourd’hui Islam et Christianisme mélangent allègrement ces religions à l’animisme. On  est à la fois chrétien ou musulman et animiste. On attribue une âme aux règnes végétal, animal et minéral. L’apogée de ce phénomène est l’apparition de ces prophètes, gourous, dans les jungles et dans les quartiers populaires.