Politique/Pourquoi les chefs d’états africains aiment-ils s’éterniser au pouvoir ?
Une analyse de Kédjébo Kpandji*
L’Afrique est le continent qui a connu le plus grand nombre de chefs d’Etats cherchant à prolonger leur mandat au-delà des limites constitutionnelles. Cette tendance à l’éternisation au pouvoir soulève des questions sur les raisons profondes de ce phénomène. A l’analyse, plusieurs facteurs politiques, économique, historiques et socioculturels expliquent cette persistance.
Dans de nombreux pays africains, les institutions chargées de garantir l’alternance démocratique, sont souvent sous contrôle du pouvoir exécutif. Les constitutions sont modifiées pour supprimer les limites de mandat et les régimes en place utilisent des méthodes autoritaires pour éliminer toute contestation, notamment les arrestations de militants, la restriction des libertés, les fraudes électorales. Certains dirigeants s’appuient sur l’armée et les réseaux clientélistes pour se maintenir.
Les élites politiques et économiques profitent souvent du système en place et préfèrent la stabilité à l’incertitude. Le pouvoir en Afrique est souvent synonyme d’enrichissement personnel où souventes fois, les dirigeants et leur entourage détournent les ressources nationales, ce qui les incite à rester pour protéger leurs intérêts.
Il y a aussi que certains pays dépendent de matières premières, dont les revenus sont contrôlés par le pouvoir. Cela permet aux régimes de financer leur clientélisme sans avoir besoin d’une légitimité populaire forte.
Après les indépendances, beaucoup de pays africains ont hérité de systèmes politiques centralisés, sans tradition d’alternance. Des présidents, communément appelés « Père de la nation », ont instauré des régimes à parti unique, une logique qui persiste aujourd’hui. Certains dirigeants justifient leur maintien par la crainte d’instabilité en cas de départ, cependant, cette logique permet de justifier un autoritarisme prolongé.
Dans plusieurs pays africains, les médias et la propagande d’Etat entretiennent l’image d’un dirigeant indispensable, à cela, faut-il ajouter le soutien des puissances étrangères, vu que certaines anciennes puissances coloniales ou nouveaux soutiennent des régimes autoritaires pour des raisons géostratégiques ou économiques pour protéger leurs intérêts.
Ainsi, l’éternisation des présidents africains au pouvoir est un phénomène complexe, lié à des logiques de pouvoir, de corruption et de faiblesse institutionnelle. Bien que des mouvements citoyens aient réussi à contester ces abus, beaucoup de systèmes continuent de manipuler les règles pour se maintenir. Une véritable culture démocratique, avec des contre-pouvoirs forts, reste nécessaire pour inverser cette tendance.
*Membre de la société civile
