Migrants en Libye/Le Directeur général des Ivoiriens de l’extérieur fait appel à toute l’humanité…
Le Directeur général des Ivoiriens de l’extérieur, Issiaké Konaté apporte des éléments de réponses aux préoccupations sur la question liée à la migration irrégulière et ses conséquences. Il revient sur ‘’l’enfer’’ dans lequel se retrouvent des migrants en Libye.
Quel état faites-vous de la situation générale des Ivoiriens de l’étranger ?
Je pourrais vous dire que nous avons un peu plus d’un million d’Ivoiriens qui vivent à l’extérieur. Les Ivoiriens qui sont à l’extérieur, ne vivent pas tous en situation irrégulière. Il faut être précis là-dessus parce qu’il y’a beaucoup de confusion ces derniers jours. Cela dit, ces derniers mois, certains de nos compatriotes rencontrent des difficultés dans certains pays d’accueil. C’est d’ailleurs ce qui commande tous ces efforts faits au niveau des retours organisés.
Vous savez que l’actualité aujourd’hui tourne autour de ce qui se passe en Libye avec des personnes originaires de l’Afrique noire vendues comme du bétail. Quelle est la situation exacte des Ivoiriens en dans ce pays ?
Il est difficile de définir les nationalités des uns et des autres sur la base d’images etc. Mais voyez-vous, la crise migratoire en Libye date de 2011, avec ses drames successives. Ce que l’on voit ces derniers jours, est juste une preuve supplémentaire de ce qui s’y passe. Ce ne sont pas des choses que l’on ignore à travers le monde. C’est d’ailleurs pour cela que plusieurs pays, dont la Côte d’Ivoire, ont pris l’engagement de faire revenir beaucoup de leurs ressortissants. Je vous rappelle que le premier vol de la Côte d’Ivoire en provenance de la Libye, grâce à l’appui de l’ambassadeur de la Côte d’Ivoire en Libye, de l’Organisation internationale pour les migrants (OIM), et des autorités tunisiennes date du 27 novembre 2015, avec plus d’une quarantaine de personnes à bord. C’est une situation qui se poursuit. N’oubliez pas que dans le drame, beaucoup de personnes ont perdu la vie. Ce qui se passe en Libye fait appel à toute notre humanité…
Après la diffusion du documentaire sur CNN (Cable News Network, chaîne américaine de télévision en continu) où l’on voit des ressortissants africains vendus comme esclaves, qu’est-ce que l’État ivoirien compte faire pour lutter contre ce fléau dans le cadre de la protection de ses compatriotes ?
(…) Il faut reconnaître que la Libye un pays, un État où en ce moment il est difficile de maîtriser les mouvements par rapport au fait qu’il n’y a pas de loi, une autorité unique sur l’ensemble du territoire. C’est pour cela que des retours volontaires sont organisés avec l’appui de cette organisation et de l’ambassadeur de Côte d’Ivoire en Libye…
Avez-vous une idée du nombre des Ivoiriens qui sont en ce moment en Libye ?
L’ambassadeur a dénombré 595 personnes qui doivent venir par vague successives. Et selon une date qui avait été définie, la première vague devrait arrivée depuis le 17 novembre 2017, comme convenu mais la date a été décalée. La première vague va est annoncée pour ce lundi 20 novembre 2017 ou hier mardi.
Ces voyages ont, semble-t-il, été décalés pour des raisons de sécurité dans la région?
– Par rapport à l’organisation de la logistique et tout, ils vont venir par vagues successives. Nous allons commencer par des personnes qui sont en situation d’extrême détresse jusqu’à pouvoir atteindre les 585 personnes que l’ambassadeur a pu dénombrer dans ce travail difficile à réaliser sur place. Il faut vraiment le remercier, parce que c’est un travail qu’il fait faire à des équipes mobiles dans des conditions extrêmement difficiles. Il faut aussi remercier l’OIM qui appuie ces efforts de l’ambassade pour pouvoir atteindre ces centres de détention et même des prisons privées pour ressortir ces personnes et les faire venir vers la Côte d’Ivoire. Nous avons bon espoir. Je voudrais vous dire que la politique de l’État a toujours été très claire là-dessus. Elle a toujours été une politique volontariste depuis le début. Je vous rappelle que le premier vol a été effectué en novembre 2015 et aujourd’hui, nous sommes en 2017. Et ensuite, il y’a eu deux autres vols, en mars et en avril. Au total, la Côte d’Ivoire a fait venir 1279 personnes qui étaient en situation de détresse.
Vous estimez le coût en terme d’évaluation à combien à peu près, pour ces retours ?
C’est difficile de faire une évaluation parce que nous bénéficions également de l’appui de l’OIM qui fait des efforts aussi pour faire revenir ces différentes personnes qui sont au nombre de 1279.
Avec ces jeunes de plus en plus nombreux qui sont décidés malgré tout à braver les dangers pour disent-ils ‘’aller se chercher’’ de l’autre côté de la méditerranée, pensez-vous que vos efforts de sensibilisations sont entendus aujourd’hui ?
Je ne pense pas qu’il faille voir cela sur cette forme. Ce qu’il faut, dans une situation pareille, c’est de sortir du jugement. Il ne faut pas juger les gens qui sont partis. En fait, nous sommes face à une situation et qu’est-ce qu’on propose comme solution ? Moi je dis, il faut la répression contre les réseaux, le démantèlement de ces réseaux, et surtout une sensibilisation accrue contre la migration irrégulière, il faut continuer d’appuyer le projet des jeunes, -celui des femmes, travailler sur la perception que nous autres, Africains, avions vis-à-vis de l’Occident. C’est très évident, tout cela ne se fait pas de façon systématique. Vous savez qu’avant la crise en Libye, il est estimé que plus d’un million de personnes d’origine subsaharienne travaillaient et résidaient régulièrement dans ce pays. Après la crise, c’est un million de personnes qui se cherchent un nouveau territoire pour y aller. Ensuite, la Libye n’est pas signataire de la convention de Genève…
Quel rôle les autorités ivoiriennes ont-elles joué, à ce sujet ?
Sur le plan national ici en Côte d’Ivoire, il y’a un début de prise de conscience. Le fait que la Côte d’Ivoire fasse une campagne de sensibilisation en parcourant des kilomètres, ce n’est pas rien. Plus d’une quinzaine de localités au total ont été visitées, et cela se poursuit. Je pense qu’il faut continuer et mutualiser ces efforts, qui ne sont pas négligeables. On ne peut pas museler la jeunesse ivoirienne, voire africaine ou mondiale.
Que peut faire l’État ivoirien pour traduire en justice ces négriers des temps modernes qui sévissent en Libye ?
Je crois qu’il faut s’adresser au ministère de la Justice mais, je pense déjà, ce que nous devons faire dans un premier temps, lorsqu’il y’a une situation d’extrême détresse, c’est de sortir nos ressortissants de celle-ci. Et c’est sur cette politique engagée que nous travaillons. Je suis satisfait du travail qui a été fait par le gouvernement sur la question et c’est très important de le savoir. Ils se poursuivent ces efforts.
Mais, il faut continuer de sortir les Ivoiriens, voire même l’être humain de cette situation autant que nous le pouvons. Ce qui se passe en Libye fait appel à toute notre humanité. Nous nous estimons aussi que les journalistes sont des acteurs principaux de la lutte contre la migration irrégulière. La sensibilisation se poursuit toujours, et je me réjouis de tout cela. Cela ne se fait pas comme cela au hasard. C’est un travail de terrain, et surtout de sensibilisation qui se fait, et qui se poursuit.
Source : extraits afrikipresse.fr