Jeanne Aka Batlo, membre du Conseil des Sages du Pdci-Rda« Je suis victime de la politique de la chaise vide »

Pdci rda 2Entretien réalisé par Brou François-Afrique Matin.Net

Jeanne Aka Batlo est un nom bien connu dans le milieu de l’éducation nationale pour avoir été la première femme proviseure du lycée des jeunes filles de Bingerville, l’actuel Lycée Mamie Faitai. Cette dame qui, à de nombreuses reprises, fit la couverture des plus grands magazines et reconnue pour son intégrité a longtemps fait la fierté de la gente féminine en Côte d’Ivoire et en Afrique. Volontairement réfugié derrière un mur de silence depuis plusieurs années, l’ex-proviseure aujourd’hui membre du conseil des sages du PDCI RDA sort enfin de sa réserve.  

 

Vous venez de recevoir une distinction de votre parti politique le Pdci-Rda, quels sont vos sentiments ?

J’ai reçu cette distinction  à Grand-Bassam dans l’Ordre du Bélier de Grand Officier. L’impression, c’est beaucoup d’émotions, parce que je ne m’y attendais pas. Et je crois que je ne démérite pas non plus. Je sais combien de fois j’ai mouillé le maillot pour mon parti, le Pdci-Rda durant plusieurs années. Je prends cette distinction comme une reconnaissance du parti. Et comme feu le président Félix Houphouët-Boigny m’avait fait l’honneur d venir  au lycée moderne de Bingerville, lorsque j’étais comme  Proviseur et par la suite celle de son digne successeur Henri Konan Bédié, je me sens revigorée. Quoi que q je me suis pas laissée abattre. La preuve, j’ai commencé depuis qu’on parle des Houphouëtistes, à ressortir la tête de l’eau pour remobiliser les  jeunes filles, les femmes. Puisque c’est un domaine que je maitrise. J’ai recommencé avec la force que Dieu me donne.

Alors au regard de cette distinction, que voulez-vous que le citoyen lambda retienne de  votre militantisme au Pdci-Rda, de ces décennies d’engagements et de services rendus à votre parti ?

C’est difficile en si peu de temps de faire un choix. Mais sans hésitations, ce qui m’a marqué et me marque, c’est que moi, petite femme, au Lycée de jeune fille de Bingerville, le jeudi 26 mai 1988, feu le président Félix Houphouët-Boigny, s’est déplacé avec tout son gouvernement devenu par la suite Lycée Mamie Faitaie, baptisé par lui, du nom de sa sœur ainée. Cet acte, je ne l’oublierais jamais. Je crois que mon bonheur ou mon malheur est parti à partir de cette visite, qui m’a procuré beaucoup de joie et des peines avec en toile de fond des crises de jalousie auxquelles j’ai été victime par des agressions. J’étais considérée comme une de ses filles adoptives,  cela me marque        . C’est pour cela que je me fais toute petite et j’attends mon tour encore, si dieu le veut. Puis qu’il n’y a pas d’âge pour la politique.

Dans vos déclarations, on voit votre engagement à revenir aux affaires, pourquoi ?

Je veux revenir aux affaires parce que j’ai été humiliée-politiquement. Surtout localement. Après le dernier congrès, alors que j’avais été en mission à Dimbokro comme chef de  délégation, lorsque la liste des membres des instances paraissait,  mon nom ne figurait nulle part. Moi je suis une rachetée de mon existence ne figurait. Et c’est en cela que j’accuse l’actuel délégué communal qui a pris ma place, sous prétexte que durant plus de dix(10) ans, on ne me voyait pas sur la scène politique. Ainsi, mon nom a été rayé de la liste.

Vous vous êtes senties indexée ?

Oui, c’est pour cela que je me suis mise un peu à l’écart pour laisser faire, jusqu’à ce que les gens fassent  la différence entre les différents gestionnaires. Cet acte a fouetté mon orgueil et je me suis mise à l’écart pendant quatorze (14) ans. Et comme maintenant on reparle des Houphouëtistes, alors, je réapparais tout naturellement.

Avez-vous gros sur le cœur alors, vu l’attitude que vous semblez condamner de votre quatrième (4ème) adjoint au maire d’alors ?

Je ne peux pas porter de critique sur sa gestion, puisqu’il a fait partie de  mon équipe lorsque j’étais aux affaires. Est-ce qu’il suit mes traces ou bien, il gère la mairie comme il l’entend.

Quelle est réellement la pomme de discorde entre l’actuel délégué communal et vous ? Puisque vous l’accusez de vous avoir omise, voire oubliée ?    

Je ne sais vraiment pas, et je ne peux pas l’expliquer. Cette crise  est partie d’un communiqué qui a été pondu par les soins du délégué communal et diffusé pendant plusieurs jours, voire des mois  sur le territoire de Bingerville dans toutes les langues vernaculaires sur les antennes de la radio communale. Cet acte a été le summum de l’humiliation. Suite à cela, j’ai réagi en informant la direction du parti. Et à partir de là, tout commence à rentrer dans  l’ordre, jusqu’à ce qu’on ne cite mon nom dans les discours. Ce qui ne fut pas le cas dans  un passé récent. Je ne rebondis pas ;

Les intentions que vous nourrissez ne sont pas celles de revenir aux affaires ?

Mais je suis déjà aux affaires, puisque je mobilise les femmes depuis un certain temps. Ce que je peux apporter encore à la jeune génération de militantes et militants, à mes jeunes sœurs et à mes jeunes frères. C’est une grâce pour moi de recevoir ma distinction vivante au lieu de l’avoir  à titre posthume. Et je crois que si j’ai une sortie à faire encore, ça serait la dernière.

A la mairie ?

Pas forcément à la mairie. Il y a les législatives qui seront les premières élections, après viennent les municipales, les régionales. Il y a aussi le Conseil économique et social. Je vous rappelle que tous mes successeurs ont été nommés. Moi je suis partie du Lycée en 1992, celle qui m’a succédée est ambassadeur, l’ancien senseur est Ambassadeur, l’un de mes professeurs de philosophie, est aussi nommé ambassadeur, mais, moi, je suis là.

Vous attendez votre heure alors ! N’y a-t-il pas une injustice quelque part ?

Mais si on doit nommer des gens parce qu’ils ont bien travaillé, c’est leur bonheur. Pourquoi j’ai été abandonnée pendant des années, je ne sais pas. Je crois bien qu’il y a une injustice quelque part. A l’analyse, je me suis dis que comme je me suis mise un peu à l’écart, je suis tombée dans les oubliettes. Donc je vais bouger un peu pour qu’on se souvienne de moi. Je crois aussi que c’est la politique de la chaise vide que j’ai faite qui m’a mise dans cette situation.

Les échéances de 2020  se dessinent pour le Pdci-Rda, votre formation politique. En tant que doyenne, pensez-vous qu’il y a des chances pour elle  de revenir aux affaires, surtout au plan local ?

Au niveau local, si nous voulons sortir vainqueurs, il faut qu’on s’entende. Ne pensez-vous pas que les autres candidats des autres formations politiques vont baisser les bras. Ils n’ont pas l’intention de donner comme ça aussi facilement la place au Pdci-Rda. Tout le monde se prépare. Si le Pdci-Rda est uni, nous pouvons croire que cela ira de soi. Il faut se réconcilier à la base. A l’endroit des militantes et militants, je leur dis que je reste la maman auprès de qui ils peuvent venir prendre conseils pour la bonne marche de notre parti.