Esclavage en Libye/ Le DP du journal Afrique Matin.Net: « Il faut de l’action au-delà de l’émotion ».
Par Léon SAKI – DP Afrique Matin. net
Aucune affirmation n’a autant marqué les africains que celle exprimée par Léopold Sédar Senghor dans son ouvrage ETHIOPIQUES: « L’émotion est nègre, comme la raison est hellène ». Nous avions, à l’époque scolaire et universitaire, mené des débats sur cette assertion et regretté que cela vienne d’un défenseur de la cause noire, l’apôtre de la négritude. Senghor avait réussi parfaitement à produire une onde de choc au sein de la communauté noire à travers cette formule réductrice.
Mais voilà que 78 ans après, elle refait surface en donnant la preuve irréductible de la fascination que le noir porte à l’émotion, ou du moins, de l’essence émotionnelle du nègre. Senghor a quitté ce monde en 2001 et depuis, la succession des événements qui se produisent dans le monde invite à se réinterroger, à nous rappeler d’une partie de cette formule qui nous intéresse: « L’émotion est nègre…». L’émotion, d’après la philosophie, peut se définir basiquement comme une manifestation de la vie affective, généralement accompagnée d’un état de conscience agréable ou pénible.
Dans tous les cas, c’est un état affectif qui momentanément fait surgir la joie, le bonheur, les passions… ou la tristesse, la mélancolie, le désarroi… Et il faut le noter, pendant des siècles, la raison a été opposée aux émotions considérées comme inférieures. D’ailleurs, de nombreux dictons découlent de cette conception, dont le plus célèbre est certainement celui de Blaise Pascal: « Le cœur a ses raisons que la raison ignore« .
On pourrait ainsi affirmer que l’émotion est un inducteur puissant d’humeur et le piège utilisé par tous les escrocs du monde notamment la Raison pour assujettir, corrompre et dominer.
Avec les attentats de Paris contre la rédaction de Charlie Hebdo ou le Bataclan, beaucoup de personnes ont dû voir la grande compassion manifestée par les Africains et leurs Chefs d’Etats à l’égard du peuple Français. Guidés par notre degré élevé de l’émotion, nous avons exprimé notre solidarité à la Mère-patrie, parfois par des marches, parfois par des sanglots.
Le plus émouvant réside plus dans cette capacité à s’émouvoir que la volonté de passer à l’action contre toutes ces causes de notre émotion. Et pourtant, l’émotion associée à la volonté peut produire une merveilleuse action capable d’écrouler n’importe quel fardeau ou farce de la Raison. Aujourd’hui face à la tragédie de l’homme noire en Libye, à la traite négrière sous une autre forme, nous assistons à un vaste mouvement d’émotion sans plus.
Les Africains préfèrent mourir de compassion que de passer à des actions coercitives ou de réciprocité. Sur les réseaux sociaux, ils sont devenus les champions des paroles vaines sans aucune organisation des consciences pour des actions concrètes. Ils refusent d’être des KOFFI KOUASSI RICHARD, ce jeune homme qui a choisi la prison au désespoir de la maison. Pour voir les choses changer, il est temps d’agir; « Il faut de l’action au-delà de l’émotion ».