Démocratie/Pourquoi les Européens et Américains limitent-ils leurs mandats présidentiels ?
Par Ablizangoh Wakatê/afriquematin.net
La question de la limitation des mandats présidentiels est un sujet central dans les débats sur la démocratie et la gouvernance. En Europe et aux États-Unis, la tradition de limiter les mandats à deux périodes est bien ancrée, symbolisant un engagement en faveur de l’alternance politique et de la prévention des dérives autoritaires.
En Afrique, de nombreux dirigeants s’accrochent au pouvoir, souvent avec le soutien implicite ou explicite des puissances occidentales. Cette contradiction soulève des questions sur les motivations réelles de ces pays et leur rôle dans la promotion de la démocratie sur le continent africain.
En Europe et aux États-Unis, la limitation des mandats présidentiels est une norme démocratique bien établie. Cette pratique vise à prévenir la concentration du pouvoir et à garantir une alternance politique saine. Depuis l’adoption du 22ème amendement à la Constitution en 1951, un président ne peut exercer plus de deux mandats de quatre ans ou de cinq ans. Cette règle a été instaurée après les quatre mandats de Franklin D. Roosevelt, afin d’éviter une présidence à vie.
Dans la plupart des démocraties européennes, les mandats présidentiels sont également limités. Par exemple, en France, le président ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs de cinq ans. Ces limites reflètent une culture politique qui valorise l’alternance, la redevabilité et la prévention des abus de pouvoir.
A la différence qu’en Afrique, de nombreux dirigeants ont modifié et continuent de modifier les constitutions ou manipulent les systèmes électoraux pour rester au pouvoir pendant des décennies. Des exemples notoires incluent Paul Biya du Cameroun au pouvoir depuis 1982, il a modifié la constitution pour supprimer la limite des mandats.
Yoweri Museveni de l’Ouganda est président depuis 1986, il a également supprimé la limite d’âge pour se représenter. Teodoro Obiang Nguema de la Guinée équatoriale est au pouvoir depuis 1979, et Alassane Dramane Ouattara, depuis 2011 et qui veut briguer un quatrième mandat jugé illégal selon les Ivoiriens.
Ces pratiques sont souvent justifiées par des arguments tels que la « stabilité » ou la « nécessité de poursuivre des projets de développement », mais elles entravent souvent la démocratie et la participation citoyenne.
Malgré leur engagement affiché en faveur de la démocratie, les puissances occidentales ont souvent soutenu des dirigeants africains qui s’éternisent au pouvoir. Ce soutien s’explique par des intérêts géopolitiques et économiques. Les pays occidentaux privilégient souvent la stabilité politique pour garantir l’accès aux ressources naturelles notamment le pétrole, le minerais, etc. et protéger leurs investissements.
Alors, l’idée de limitation des mandats est souvent célébrée en tant que pilier de la démocratie, particulièrement en Europe et aux États-Unis. Cependant, en Afrique, de nombreux dirigeants s’accrochent au pouvoir pendant de longues périodes, soulevant des critiques tant au niveau local qu’international. Pourquoi y a-t-il une telle divergence dans la gestion des mandats politiques ?
Les pays européens et américains disposent généralement d’institutions solides, de systèmes judiciaires indépendants et de procédures électorales transparentes. Ces éléments jouent un rôle crucial dans la limitation des mandats.
Dans de nombreux pays africains, les institutions sont souvent fragiles et les mécanismes de vérification, d’équilibre, nécessaires pour contrecarrer un dirigeant autoritaire, manquent, rendant difficile l’arrêt des leaders qui cherchent à s’éterniser au pouvoir.
Les pays européens et les États-Unis entretiennent souvent des relations économiques et stratégiques avec les pays africains. Ils peuvent être perçus comme favorisant certains régimes, en fonction de leurs intérêts géopolitiques, même si cela signifie ignorer les violations des droits humains ou la corruption.
Dans des cas où l’Afrique a besoin d’une aide économique, il peut y avoir des conditions attachées, mais souvent cela ne se traduit pas par une pression suffisante pour respecter des normes démocratiques, ce qui permet à certains dirigeants de rester en place plus longtemps.
La question de l’éternisation au pouvoir des dirigeants africains par rapport à la limitation de mandats en Europe et aux États-Unis est complexe et multidimensionnelle. Elle est influencée par l’histoire, les institutions, la politique économique et les récits culturels.
Pour que les pays africains développent des systèmes démocratiques solides et résilients, un soutien authentique et une pression extérieure pour respecter la démocratie et les droits humains doivent être alignés. Les efforts doivent viser à renforcer les institutions locales et à soutenir une véritable participation citoyenne.
