CAN 2022/ Kobenan Tah Thomas/« Je me réjouis du fait qu’une cause du pays soit devenue la cause de toute la population… »

La Chronique de M. Kobenan Tah Thomas, vice-président du PDCI-RDA ‘’Les Actualités Politiques Ivoiriennes’’, numéro 20 du mercredi 09 Février 2022.

De la CAN camerounaise au dialogue national inclusif.

Les lampions se sont éteints sur la 33ème édition de la Coupe d’Afrique des Nations. Comme les autres éditions passées, celle de Cameroun 2021 a suscité passions, inquiétudes, déceptions, envolées de joies passagères et puis, enfin, grande satisfaction pour le grand vainqueur, le Sénégal, qui s’est adjugé et le trophée de la CAN, mais aussi ceux du meilleur joueur et du meilleur gardien. Bravo aux vainqueurs, et courage à ceux pour qui les espoirs n’ont pas connu les succès escomptés.

Au-delà de l’évènement, en ce qui concerne la participation de la Côte d’Ivoire, deux ou trois faits importants retiennent notre attention. La spontanéité des supporters ivoiriens à réagir unanimement contre les actes de dénigrement des supporters camerounais ; la vivacité de l’attachement des Ivoiriens aux couleurs et symboles de leur pays et, la troisième chose que nous retenons, c’est tout l’humour et la capacité des Ivoiriens à tourner en dérision ce qui aurait pu se vivre comme une offense et susciter des réactions de violences de la part des Ivoiriens envers le peuple frère du Cameroun.

De ces trois réalités que nous avons tous vécues en l’espace de quelques jours, se dégagent des idées fortes qui ont portant fait, et contrefait la politique en Côte d’Ivoire.

D’abord donc, l’attachement à la nation et à ses symboles. Certains supporters du Cameroun ont trouvé le prétexte dans des bouts de discours pour avilir le drapeau ivoirien et proféré des offenses contre la Côte d’Ivoire et ses autorités. Et en réaction aux actes d’offense, dans une sorte de sursaut spontané, la toile s’est enflammée de ripostes contre les Camerounais. Heureusement, par toile interposée ! C’est un nouveau fait, les escalades de violences communautaires sont généralement précédées de publications sur les réseaux sociaux.

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Cet amour inexplicable que nous avons voué à notre pays ; un amour et un sentiment de haute portée tourné exclusivement vers notre pays n’est rien d’autre que ce nationalisme dont nous avons pourtant peur. Car, se faire taxer de nationaliste, c’est aussi se faire ranger dans le cercle des méchants qui refusent de s’ouvrir au monde. Il faut le souligner d’autant plus que pendant le temps de la CAN, les grandes chaines de média diffusaient les images d’une Ukraine qui mobilise ses réservistes, hommes, femmes jeunes et vieux pour s’apprêter aux batailles probables contre la Russie. Et là, le reproche du nationalisme n’est pas évoqué. Quand on déclare que certains pays n’ont pas des amis et qu’ils n’ont que des intérêts, la formule de cette déclaration est même consacrée pour la France sans qu’elle ne court le risque d’être péjorativement indexée comme nationaliste.

Il a été proscrit de trop aimer la Côte d’Ivoire dans un passé récent. La défendre et parler du besoin d’en faire un pays, une nation avec ses particularités c’était faire preuve de haine envers les autres nations. Personnellement, je me réjouis donc du fait qu’une cause du pays soit devenue la cause de toute la population sans que certains n’indexent d’autres comme étant des ultras…ivoiritaires ! L’on doit cela à la magie du football et aux folles passions passagères qu’il sait susciter. Derrière ces passions, se trouvent souvent la réalité des choses. Nous avons tous un brin de patriotisme et de nationalisme en nous.

En second lieu, il faut faire remarquer la vivacité et la constance avec lesquelles les réactions ont été diffusées. Cette spontanéité n’a pas eu besoin de la mobilisation d’un leader politique de quelque bord que ce soit. Il faut y voir une forme de maturité de notre peuple à fustiger toute attitude qui contrarie l’honneur de ce pays, l’honorabilité de son peuple et par-dessus tout, la respectabilité de ses plus hautes autorités, ses institutions quelles qu’elles soient. C’est une question de principe.

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Enfin, la capacité des Ivoiriens à théâtraliser leurs réactions contre les offenses subies indiquent à quel point le champ de la violence est en train de disparaitre des habitudes de ce peuple. Désormais, l’on peut espérer que les populations auront oublié et oublieront de suivre les chemins battus des réactions violentes. Tourner en dérision son ressentiment ou le mettre en chanson démontre d’énormes capacités à surmonter les aspects immédiats des crises et pour se donner le temps d’une résilience.

Si cet élan de la toile des réseaux sociaux habitait notre élite politique, le dialogue politique connaitrait une autre tournure. Ou peut-être qu’il faudra une thérapie de choc à la camerounaise pour faire sortir nos négociateurs des cocons partisans ! Espérons le contraire.

Merci et à mercredi prochain.