10 ans après sa mort, le professeur Sery Bailly ressuscite Memel-Fotê, le savant.
« Harris Memel-Fotê : l’homme et l’œuvre », tel est l’intitulé de la conférence publique animée par le Pr Séry Bailly, le mercredi 11 avril 2018 au Cours Secondaire Méthodiste de Dabou.
Dans le cadre du lancement des activités de commémoration de l’An 10 de la disparition du Savant Harris Memel-Fotê, le Pr Séry Bailly, fidèle parmi les fidèles du Grand-Maître, a été amené à revisiter la trajectoire atypique et émérite du Sage de Mopoyem.
Le conférencier, lui-même Professeur émérite, a d’emblée dit à quel titre il parle : étudiant de Memel en Anthropologie esthétique dans les années 70, membre du Comité de Contrôle (FPI) avec lui (1994-2001), membre de l’ASCAD (Académie des sciences, des arts, des cultures d’Afrique et des diasporas africaines) sous sa présidence, en qualité de Secrétaire du Domaine des Lettres et Sciences Humaines.
C’est donc le disciple avisé sous plusieurs égards qui s’est évertué à décrire « la Memel Montagne ».
Justifiant la célébration de Memel, il note, avec Levinas que « la vie consiste à recevoir, célébrer et transmettre ». Cette idée est de son avis d’autant plus pertinente que « les jeunes Ivoiriens et Africains vivent dans un monde en danger », avec notamment des défis écologiques, les guerres, l’intolérance, le savoir rapide, sommaire et éphémère, l’aliénation, l’ignorance, la faible estime de soi, la multiplicité des contre modèles, la difficulté de donner un sens à sa vie, l’immigration clandestine…
Pour l’orateur, le Savant Memel-Fotê a apporté des réponses scientifiques et concrètes à ces différents défis historiques par ses choix éthiques et par sa manière d’assumer ses rôles d’intellectuel et de militant.
Il énumère dans cette lancée, au chapitre des qualités humaines, le sens du sacrifice, le courage, la persévérance, l’ascétisme, la maîtrise de soi, la cohérence, la générosité, la loyauté, l’honnêteté, l’humilité…
Comme intellectuel, il offre la disposition d’esprit et la démarche de l’homme faite d’objectivité, de distance critique, et la grande étendue des savoirs…à l’image du Philosophe-paysan Koffi Awrondo de Mopoyem révélé par Memel.
Memel, dans son rôle d’intellectuel, s’est surtout caractérisé, poursuit le conférencier, par l’extension scientifique qui l’a amené à aborder de nombreux domaines de recherche (Histoire : grand spécialiste de l’esclavage et Traite, Anthropologie politique, Esthétique, Musique, Philosophie, Biologie, Littérature, Droits de l’Homme, Santé, Ecologie…), de même que des thèmes divers : les jeunes, les femmes, le troisième âge, la religion, la paix, la sorcellerie…
Comme politique, le Pr Séry Bailly a salué à sa juste valeur le théoricien de la politique et l’homme d’action, le tout, dans une articulation cohérente.
Toutes ces valeurs et bien d’autres qui ont fondé la vie et l’œuvre exemplaires du fondateur et premier président de l’Ascad, a conclu l’académicien, doivent être appropriées par la jeunesse ivoirienne et africaine, en vue de perpétuer l’histoire et répondre aux défis de leur temps.
La conférence de Dabou met fin au lancement de l’An 10 débuté dix jours plus tôt à l’Institut Goethe. La célébration proprement dite de l’An 10 de la disparition de Memel Fotê se tient du 9 au 11 mai 2018 à Abidjan et à Dabou. Elle sera marquée, entre autres, par des conférences, des expositions, une procession et la pose d’une gerbe de fleur sur la sépulture de l’illustre intellectuel et l’un des rares africains admis au Collège de France et à l’Académie Universelle des Cultures.
Hervé Gobou