Dabou / Un opérateur expatrié et un pasteur veulent exproprier les populations de 700 hectares de terre : Les populations sur pied de guerre.

Par  Célikpa De Sylva Djeckou- correspondant afriquematin.net

Layo a été reconnu comme un village à part entière par le décret No 2010-233 du 25 août 2010 fixant le ressort territorial des régions, départements, sous-préfectures et communes de Côte d’Ivoire. C’est une bourgade d’environ 400 âmes, peuplée de quatre familles d’autochtones. Les autres communautés viennent de l’Est et du Sud-est de la Côte d’Ivoire ainsi que des pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), notamment du Mali, du Ghana et du Togo.   C’est dans ce village que depuis quelque mois, le feu couve sous la cendre. En tout cas, les populations de Layo avec à leur tête, les populations essentiellement des pécheurs,  ne sont pas contentes du pasteur Akpa Tchotche Marcelin et de Alberto Hermino Alvaro, de nationalité portugaise, administrateur de la Société Aguas Em Processo S.A. Au centre de ce litige qui oppose désormais les populations aux associés, une affaire de 700 hectares de terre, que l’homme de Dieu et l’opérateur ont voulu exproprier aux populations de Layo. Selon Théophile Yédo Lath, chef de Layo, c’est en 2015 qu’un comité de gestion foncière a été mis en place par la communauté villageoise de Layo.

Dans ce comité, sont représentés tous les chefs de familles ou leur représentant. Ils ont convenu à travers les clauses de cette convention qu’aucune terre de leur patrimoine ne peut faire l’objet de vente ni de session sans l’accord écrit des représentants des différentes familles. Dans cette même convention est précisé le pourcentage qui revient à chaque famille. Toutefois, le chef Théophile Yédoh Lath et ses administrés ont précisé que malgré cette répartition, les terres restent un bloc entier et chaque famille percevra des redevances conformément au pourcentage établi dans la convention signée. Lath Akpa Jacques, chef de famille et propriétaire terrien également, est désigné président du comité villageois de gestion foncière de Layo avec prérogative de trouver des partenaires ou des investisseurs capables pour le développement du village. La rencontre avec le pasteur Akpa Tchotche Marcelin est une opportunité. Neveu de la famille, jeune et de surcroit pasteur, le projet lui est présenté. Il adhère à l’idée pour la recherche de partenaires financiers et économiques en vue du financement de la délimitation du bornage et de l’obtention de titre de propriété définitif pour les populations. Ainsi, un avenant est rédigé. En son article 1, les fils du terroir autochtones du village de Layo, propriétaires terriens donnent plein pouvoir au Pasteur Akpa Tchotche Marcelin, pour la mise en place d’une politique pour l’installation d’industrie, la création d’une zone industrielle et la promotion du village en vue d’attirer des investisseurs.

Pasteur Akpa Tchotche nommé porte-parole

Demande la délivrance de l’ACD au profit de la Société portugaise

Après plusieurs échanges entre les populations et le porte-parole, l’opérateur économique en la personne d’Alberto Hermino Alvaro, un portugais est présenté au conseil de gestion. « Avec lui, nous avons signé un contrat. Désormais, le pasteur Akpa et l’opérateur économique portugais effectuent des recherches de financement au profit des populations de Layo », nous raconte Théophile Yédoh Lath. Celles-ci ont placé leur entière confiance au pasteur et au promoteur à qui ils ont soumis la nécessité de la création d’une société commerciale immobilière industrielle. Un contrat sera signé entre les deux parties. « Lors d’une rencontre avec le conseil de gestion, Alberto Hermino Alvaro, l’opérateur économique nous a informé des démarches entreprises pour la délivrance de l’arrêté définitif de concession.  Il nous a indiqué qu’il est allé rencontrer le premier ministre lors de sa visite au Burkina Faso afin qu’il nous aide à obtenir l’Acd. Nous avons applaudit sa démarche », nous révèle Akpa Jacques, le président de comité de gestion. Et de poursuivre. « Nous étions dans l’attente des démarches entreprises par nos partenaires quand le directeur du ministère de la construction et de l’urbanisme à joint le chef l’invitant de se rendre urgemment dans ses locaux ». Théophile Yédo Lath nous explique qu’il était à la maison quand les responsables du ministère de la construction et de l’urbanisme lui ont fait appel.

Un courrier de la primature au centre du conflit

Le chef de Layo raconte que c’est en ce moment qu’il a découvert la supercherie de ses partenaires en lisant le courrier transmis. « Et c’est arrivé là-bas que le directeur qui me recevait m’a demandé si j’ai écrit un courrier demandant au ministre de la construction de délivrer l’Acd au profit de l’opérateur portugais », nous affirme-t-il avec colère.  Le courrier en date du 23 juin 2016 adressé à monsieur le ministre de la Construction et de l’urbanisme est signé de Madame Kouamé Adjoua Flore, Préfet hors grade, membre du cabinet du premier ministre précise le chef du village.  Dans ce courrier qu’il nous montre,  Madame le préfet sollicite l’appui du premier ministre, en vue d’un traitement diligent de la demande d’arrêté  de concession définitive (Acd), introduite le 7 avril 2016 sous le numéro  ACDA410C41-012-201600000554 pour la réalisation d’un projet portant sur la construction de maisons  et d’une zone industrielle sur une parcelle de 700 hectares dans le cadre d’un partenariat signé depuis trois ans avec le village de Layo. Et le chef du village de protester qu’il s’agissait pour leurs partenaires, de délivrer l’arrêté de concession définitif au profit de la société portugaise comme l’indique bien l’objet : « demande de délivrance d’ACD au profit de la Société portugaise ».  « Je ne pouvais accepter une telle chose ; nous ne pouvons pas brader les terres que nos pères nous ont léguées ; jamais de la vie », nous lance-t-il avec force. Ce sont les véritables raisons qui ont amené les populations de ne plus être en odeur de sainteté avec leurs partenaires. Le 11 aout 2016 est convoqué l’homme de Dieu au domicile du chef de village. Objectif, s’expliquer sur les démarches entreprises en vue d’exproprier les populations de 700 hectares. « N’ayant été capable de donner les véritables raisons de cette complicité avec l’opérateur pour exproprier les populations de leur terre, nous avons tout simplement mis fin à la convention qui nous liait avec le pasteur Akpa Marcelin et son opérateur, et cela conformément à l’assemblée générale du 20 août 2016 qui a statué sur le dossier devant près d’une vingtaine de de chefs », a conclu le Chef Théophile Yédo Lath.

Nos tentatives pour entrer en contact avec le pasteur Akpa et l’opérateur Alberto Hermino Alvaro ont été vaines. Les différents numéros de portables sont toujours fermés. Et depuis, le feu couve.