Carla Frangili, championne d’Afrique, privée de J.O: Un journaliste dénonce le président ivoirien, Alassane Ouattara
Tout le monde connaît et apprécie le chanteur du groupe Magic System, Asalfo, de son vrai nom Salif Traoré. Il est lui aussi devenu ivoirien par naturalisation grâce à un décret pris en juillet 2009 par l’ancien président Laurent Gbagbo. Un an plus tard, le même Ggagbo accordait également par décret la nationalité ivoirienne à Carla Frangili, cette jeune athlète qui vient d’être privée des Jeux Olympiques de Rio, officiellement pour « vice de procédure dans son dossier de naturalisation ».
Le cas de Carla n’est d’ailleurs pas isolé puisqu’on me dit que des centaines de naturalisés de l’ère Gbagbo sont dans le collimateur du pouvoir qui a donné des instructions à son administration de ne pas renouveler leurs passeports parce qu’ils sont jugés suspects, en attendant un examen sur le fond. Au-delà du problème de continuité administrative que pose cette remise en cause décidée par Alassane Ouattara, deux questions restent en suspens. Sur quels critères ces naturalisations faites sous Gbagbo sont-elles contestées aujourd’hui et à quel rythme les instruit-on ??
Prenons le cas d’Asalfo, dont on connait les liens avec le couple Ouattara. Son décret de naturalisation, pris par Gbagbo en 2009, a été remplacé par un deuxième décret paru au Journal Officiel le 5 janvier 2015, dont je reproduis ici la copie. Pour info, ce deuxième décret porte en haut exactement la même année (2009) et le même numéro que le décret de Gbagbo : 2009-222. Et puis comme vous pouvez le voir en bas du document, on a gardé, comme pour le premier décret, le nom de… Laurent Gbagbo.
Si le dossier d’Asalfo a été traité avec rapidité, il n’en n’est pas de même pour tous les autres. Dans le cas de Carla Frangili, on est même en droit de s’interroger. Son passeport ivoirien expire le 25 janvier 2017. C’est avec ce passeport ivoirien qu’elle a remporté les championnats d’Afrique de tir à l’arc, au nom de la Côte d’Ivoire. C’est avec ce même passeport ivoirien qu’elle est venue à Abidjan du 17 au 22 mai dernier et, à aucun moment, ni à l’entrée ni à la sortie du territoire, la police des frontières n’a trouvé à redire à ce document.
Mais, comme la règle olympique impose aux athlètes d’avoir un passeport valable jusqu’à au moins 6 mois après la fin des Jeux, le père de Carla Frangili a déposé en juin dernier une demande de renouvellement, et c’est là qu’elle lui a été refusée. D’où ma question : quelle fraude à la nationalité ivoirienne une athlète qui vivait tranquillement chez elle en Italie jusqu’à ce que la Côte d’Ivoire vienne la chercher, quelle fraude à la nationalité ivoirienne pourrait-elle avoir commis pour qu’on refuse de renouveler son passeport ??
Si je m’en tiens à la déclaration mardi dernier du ministre des sports, eh bien Carla Frangili n’a commis aucune faute. François Amichia n’a-t-il pas dit lui-même ce jour-là à son sujet : ’’Elle est encore jeune et pourra défendre les couleurs nationales à l’occasion d’autres compétitions’’. Ça veut dire en clair que Carla Frangili, même privée de son passeport ivoirien, est toujours ivoirienne.
En fait tout porte à croire qu’on n’a pas voulu qu’elle participe aux Jeux Olympiques pour que son succès éventuel ne soit pas mis au crédit de l’ancien président, comme me l’a expliqué un proche du dossier. Tout porte à croire qu’on n’a pas voulu qu’elle participe aux Jeux Olympiques, sans quoi on aurait fait comme pour Asalfo : on aurait reconduit rapidement, tel quel, son décret de naturalisation pris par Laurent Gbagbo…
Serge Bilé