Concours internationaux de beauté/L’Afrique a-t-elle réellement sa place dans cette élite ?
Une analyse de Kédjébo Kpandji*
Les concours de beauté internationaux, dont Miss Universe, Miss Monde, Miss International ou Miss Supranational, se présentent comme des espaces de célébration de la diversité et de l’élégance féminine mondiale.
Chaque année, au moment des sélections, des classements ou des résultats, on assiste sur les réseaux sociaux à des vagues de critiques, de moqueries, voire de haine ciblée, particulièrement envers les candidates africaines ou les choix du jury lorsqu’une Miss africaine est sacrée. Pendant des décennies, les concours internationaux ont largement valorisé des traits européens comme la peau claire, les cheveux lisses, le nez fin.
Même si les règles ont évolué, ces concours ont laissé une empreinte durable dans l’imaginaire collectif. Beaucoup associent encore inconsciemment « beauté internationale » à un modèle non africain. Et la conséquence est quand une candidate africaine, aux cheveux crépus, à la peau foncée, aux traits typiquement africains performe bien ou gagne, certaines personnes ont l’impression que cela « brise la norme », ce qui génère incompréhension, résistance ou même hostilité.
La haine envers les représentantes africaines est trop souvent un reflet de préjugés racistes persistants dans le monde. Même si les concours eux-mêmes montrent davantage de diversité, les communautés en ligne restent imprégnées de stéréotypes sur l’Afrique, d’idées reçues sur ce qu’est la beauté africaine et de discriminations historiques liées à la couleur de peau.
Les réseaux sociaux amplifient ces biais, surtout lorsque les gens commentent de manière impulsive et anonyme. Miss Univers génère chaque année des millions de commentaires parfois négatifs envers les candidates africaines. Ils explosent particulièrement quand une Miss africaine gagne ou se classe haut, lorsqu’une Miss africaine est jugée favorite par les experts, ou une miss d’un autre continent perd face à une candidate africaine.
Depuis quelques années, la montée des Reines africaines dérange certaines élites et cette montée en puissance fait évoluer les standards de beauté internationaux. Elle bouscule des habitudes, et certains fans habitués à voir l’hégémonie d’autres régions telles que l’Amérique latine, l’Asie, l’Europe réagissent mal.
L’Afrique est souvent mal perçue comme un bloc homogène. Or, le continent possède des centaines d’ethnies, de morphologies, de phénotypes et de types de beauté, cette incroyable diversité contredit l’idée que « la beauté africaine » serait limitée ou moins universelle.
S’agissant le concours miss univers, il devient plus inclusif et au fil des années, il a élargi ses critères de beauté, les candidates africaines excellent dans ces domaines, ce qui leur vaut parfois des attaques de ceux qui regrettent « l’ancien Miss Universe », purement basé sur l’apparence. Certes, la haine existe, mais l’admiration aussi, car il serait injuste de dire que l’Afrique n’est pas aimée dans cet univers.
Au contraire ,de plus en plus de pays africains ont un fort soutien international, les victoires africaines sont souvent célébrées par le public mondial. Mais, comme dans tout espace public, ceux qui détestent font souvent plus de bruit que ceux qui apprécient.
Pour réduire cette haine envers les candidates africaines, la compétition peut continuer de valoriser les beautés non standardisées, de travailler sur l’éducation aux biais raciaux, de renforcer les politiques contre les insultes et attaques racistes, de former les jurés à une compréhension plus globale de la beauté et enfin de collaborer avec des experts africains de la mode et de l’esthétique. Et les fans, de leur côté, peuvent contribuer en promouvant la diversité, en dénonçant les attaques racistes, en valorisant les reines africaines sans rabaisser les autres.
La haine envers le continent africain dans les concours de beauté internationaux n’est pas liée à la valeur des candidates, mais plutôt à des héritages historiques, à des biais raciaux persistants, à la résistance au changement, ainsi qu’à la méconnaissance de la diversité africaine. Pourtant, la présence africaine n’a jamais été aussi forte, influente et admirée dans les compétitions Miss Universe qu’aujourd’hui.
*Membre de la société civile
