5 ANS APRES QUE PÈSE ENCORE LAURENT GBAGBO ?

« Gbagbo kafissa » par Abdoulaye Villard Sanogo (2)

Tout bien pesé, les dix années de Laurent Gbagbo (2001-2011) ont été pour les Ivoiriens, une période de grande confiance. Elles auraient été une période faste faite de grands succès dans tous les domaines, de l’agriculture à l’éduction, en passant par la fiscalité et le développement des PME-PMI, si son adversaire politique, Alassane Dramane Ouattara, n’avait pas levé une rébellion dès 2002 pour l’empêcher d’accomplir son ambitieux et révolutionnaire programme gouvernemental de refondation de la Côte d’Ivoire.

Cependant, ils sont certainement très nombreux à en vouloir à jamais à l’historien Laurent Gbagbo que l’histoire n’aura pas servi dans son sacerdoce. Comment expliquer, en effet, qu’il n’ait pas mis en place un pouvoir fort dès sa prise de fonction, étant entendu que le pays sortait d’une crise militaro-politique ? La démocratie, nous rappelle un sénateur américain, a des dents pour sourire mais aussi pour mordre.

C’était trop demander à Laurent Gbagbo, qui porte son cœur en bandoulière, d’utiliser à la fois la carotte et la chicotte. D’où le reproche, devenu célèbre aujourd’hui, qui lui est fait de tout temps : « Il est trop démocrate ». Même les vendeuses sur les marchés ivoiriens et membres d’associations féminines proches du RDR (parti de Ouattara), elles ont fait le constat, sommes toutes amer, que la politique de Laurent Gbagbo était « mille fois mieux » que celle de Ouattara. De là, la fameuse trouvaille qui a vite fait le tour de la Côte d’Ivoire : « Gbagbo kafissa ». Traduction du malinké: Gbagbo était mieux.

Dès sa prise de fonction à la fin de 2000, Laurent Gbagbo a fait cette promesse : « Houphouët-Boigny (le premier président ivoirien) a enrichi la Côte d’Ivoire. Moi, je vais enrichir les Ivoiriens ». L’ancien chef de l’Etat a tenu parole. C’est pourquoi Laurent Gbagbo pèse encore lourd dans la politique ivoirienne.

D’ailleurs, existe-t-il une meilleure façon de lire et de comprendre cette présence massive et constante de l’ancien chef de l’Etat en dehors de la Une de la vingtaine de quotidiens et la quinzaine de périodiques ivoiriens ? Pour espérer rester continuellement sur le marché ivoirien des journaux très concurrentiel,« il faut dire quelque chose sur lui. C’est tout », comme se plaît à le dire, un éditeur de presse. C’est tout dire.

(2) Abdoulaye Villard Sanogo est journaliste et directeur des rédactions à Notre Voie, journal abidjanais pro-Front populaire ivoirien (FPI) fondé par Laurent Gbagbo.

Sur le mur de Steve Beko