Le Burundi a annoncé vendredi le retrait définitif de l’autorisation d’exploitation de la radio britannique BBC, dont la diffusion FM était suspendue depuis près d’un an.
La radio américaine VOA, qui était suspendue depuis la même période, voit cette suspension prolongée “jusqu’à nouvel ordre”, a également indiqué le Conseil national de la communication (CNC), chargé de réguler les médias au Burundi.
Dans les deux cas, “il est interdit formellement à tout journaliste burundais ou de nationalité étrangère se trouvant sur le territoire national de fournir directement ou indirectement des informations pouvant être diffusées” par la BBC ou la VOA, a déclaré le CNC dans un communiqué.
La BBC a protesté contre cette interdiction. “La décision injustifiée du gouvernement du Burundi d’interdire la BBC et de suspendre indéfiniment Voice of America porte un coup sérieux à la liberté de la presse et nous la condamnons fermement”, a-t-elle réagi dans un communiqué.
“Nous croyons qu’il est vital pour les gens à travers le monde d’avoir accès à un journalisme impartial, exact et indépendant, y compris pour les 1,3 million d’habitants du Burundi qui comptent actuellement sur la BBC”, ajoute la radio britannique.
Initialement suspendues pour six mois le 4 mai 2018 pour “manquements à la loi régissant la presse et à la déontologie”, les deux radios n’avaient pas pu reprendre leur diffusion malgré l’expiration de cette sanction.
Le CNC, régulièrement accusé d’être au service du pouvoir politique, a alourdi la sanction de la BBC, estimant que la station “n’a pas respecté sa promesse de respecter (… ) les principes d’équilibre de l’information et de vérification rigoureuse des sources” et a par la suite “diffusé un documentaire qui s’est avéré être un montage mensonger, calomnieux et accablant pour le Burundi”.
L’institution fait référence au documentaire “À l’intérieur d’un site de torture au Burundi”, diffusé par la BBC en décembre 2018 et qui révèle l’existence de “sites secrets de torture et de détention pour faire taire les opposants” – ce qui avait été catégoriquement démenti par le pouvoir.
De son côté, VOA est de nouveau sanctionnée pour travailler avec le journaliste burundais Patrick Nduwimana, ancien directeur de la radio Bonesha, accusé par le pouvoir d’avoir participé au putsch manqué de mai 2015.
L‘écrasante majorité des journalistes indépendants a fui le pays
“Cette décision est une nouvelle catastrophe pour le peu de journalistes indépendants qu’il restait dans le pays”, a réagi auprès de l’AFP un journaliste d’un des deux médias, sous couvert d’anonymat.
“C’est un prétexte pour continuer à commettre des atrocités dans le pays sans un œil indiscret pour en rendre compte”, a-t-il ajouté.
La suspension des radios BBC et VOA a touché essentiellement leurs émissions quotidiennes en kirundi (langue nationale du pays) sur la FM, qui étaient très suivies depuis des décennies, notamment dans le monde rural où la population ne parle en grande majorité que la langue nationale.
Le Burundi occupe la 159e place sur 180 dans le dernier classement RSFde la liberté de la presse. En avril 2015, l’annonce controversée d’une troisième candidature du président Pierre Nkurunziza, réélu en juillet de la même année, a plongé le Burundi dans une crise politique qui a fait au moins 1.200 morts et plus de 340.000 réfugiés.
L‘écrasante majorité des journalistes indépendants a fui le pays.
AFP