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Les intérêts du Soudan dans le règlement de la crise au Soudan du Sud

Les discussions continuent entre le président sud-soudanais Salva Kiir et le chef rebelle Riek Machar. Depuis le 27 juin dernier, plusieurs annonces on été faites : cessez-le-feu, retrait des troupes militaires des zones urbaines ou encore ce samedi, le partage du pouvoir avec l’attribution du poste de vice-président à Riek Machar. Mais les pourparlers n’ont pas encore abouti et sont toujours en cours. Une nouvelle séance a commencé ce dimanche à Khartoum et doit se prolonger jusqu’à mardi 10 juillet. Le tout sous l’égide du Soudan, qui a de nombreux intérêts dans une stabilisation de la situation au Soudan du Sud.

Après des heures de pourparlers samedi, Salva Kiir et Riek Machar seraient tombés d’accord, d’après l’agence de presse officielle soudanaise Suna pour accorder le poste de premier vice-président à Riek Machar. Les parties ont également convenu également d’accorder un autre poste de vice-présidence à l’opposition, réservé cette fois à une femme.

En plus des 30 ministres déjà en exercice, 15 nouveaux ministres pourront être nommés : dont 10 pour le camp de Riek Machar et 5 pour les autres groupes d’opposition. Il est prévu également d’ajouter 150 membres au Parlement actuel représentant différents partis d’opposition.

Khartoum joue les médiateurs

Au-delà de ces nouveautés, le contexte régional a également évolué. Cette fois, l’Ouganda, le Soudan, le Kenya et l’Ethiopie semblent unis pour mener ces négociations. Le régime de Khartoum, plus particulièrement, est très actif. Les discussions entre Salva Kiir et Riek Machar s’effectuent sous le patronage d’Omar el-Béchir. Le rôle du voisin du nord et de son chef d’État est sans doute l’un des éléments les plus remarquables de ces négociations.

« La particularité de cet accord, c’est que le médiateur en est le Soudan alors qu’il est largement responsable d’un des problèmes qui ont conduit à la guerre au Soudan du Sud en 2013, rappelle Jérôme Tubiana, spécialiste du Soudan et analyste pour l’ONG Small Arms Survey. Il a aussi, au début de ce conflit de 2013, soutenu Riek Machar. Mais du coup, cela fait qu’il a aussi des moyens de pression assez forts, notamment pour obliger Riek Machar à respecter l’accord. »

Influence grandissante dans la région

Le chercheur souligne que si le Soudan est « le grand bénéficiaire de cet accord », c’est notamment parce que cela lui donne une importance diplomatique. « Alors qu’il est plutôt, jusque là, un fauteur de troubles dans la région, il en profite pour se présenter à la fois comme un faiseur de paix et comme un pouvoir régional de plus en plus respecté ou craint par ses voisins. Avant, le Soudan était plutôt un État voyou ou un État paria. Aujourd’hui il prend de plus en plus d’importance sur la scène régionale et arrive à s’entendre avec d’anciens ennemis comme l’Éthiopie ou l’Ouganda. »

Jérôme Tubiana estime par ailleurs que cette influence de Khartoum dans le processus est la preuve d’un certain désengagement de l’Occident dans la région. « Le fait que la communauté internationale, notamment les Occidentaux, laisse le Soudan s’occuper de ces problèmes et prendre une telle importance est un signe d’un désintérêt très fort, surtout américain, pour la région. »

Le pétrole, enjeu majeur

Mais le Soudan n’a pas seulement un intérêt politique et diplomatique dans le règlement de la crise au Soudan du Sud. Pour le régime d’Omar el-Béchir, les enjeux sont aussi économiques. « Le Soudan traverse une crise économique extrêmement grave, avec une inflation record, une devise qui perd de sa valeur massivement… Du coup, il a besoin que le pétrole sud-soudanais coule parce que ce pétrole transite par le Soudan et permet au Soudan d’avoir une part importante de ces revenus pétroliers. »

L’analyste pour Small Arms Survey, Jérôme Tubiana, rappelle que le pétrole est au cœur de l’histoire entre les deux nations. « Lors de l’accord de paix entre le Mouvement de libération populaire du Soudan, qui est devenu le pouvoir à Juba, et le gouvernement soudanais, il y a eu des discussions sur le partage du pétrole. Et puis elles ont été finalisées beaucoup plus tard en 2012. Mais ce qu’elles prévoient est très avantageux pour le Soudan, à la fois en termes de revenu global et en termes de garanties. Sauf que le Soudan du Sud est aujourd’hui dans un tel état que l’argent promis ne sera jamais payé, en tout cas si le Soudan du Sud ne se stabilise pas et que la production pétrolière ne retrouve pas des niveaux un peu plus importants. »

Par RFI

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