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Politique /Jacques Mangoua (VP Pdci-Rda) : « Je sais qu’un jour je ne serai plus de ce monde mais-ceux qui m’ont fait du tort, tôt ou tard ils viendront se signaler »

Interview réalisée par Brou François et Guillaume Ahi/afriquematin.net

L’ex-Président du Conseil Régional de Gbêkê (centre de la Côte d’Ivoire) Jacques Mangoua a confié avoir été victime d’un complot ourdi, l’entrainant dans l’univers de l’incarcération. Homme affable, généreux et dévoué au travail, ce magnat de la filière café-cacao part de ce monde le cœur très chargé des démêlées judiciaires. Eh oui ! Le vice-président du Pdci-Rda a définitivement abandonné le combat. Dans la nuit du jeudi 24 au vendredi 25 novembre 2022, Jaques Mangoua a tiré sa révérence. Faut-il souligner qu’il a récemment perdu les élections législatives partielles à Bodokro. Nous vous invitons à la lecture de cette interview accordée, le 04 Décembre 2021, au journal afriquamatin.net.

Élu président du conseil régional de Gbêkê, en octobre 2018, votre mandat a été secoué par des fausses accusations. Avec du recul, peut-on dire que vous avez des adversaires politiques ?

Effectivement, j’ai des adversaires et ennemis. Je dirai qu’ils sont issus de ma formation politique, le Pdci-Rda. Ils se sont certainement associés à d’autres partenaires politiques pour me combattre. Je ne citerai pas de noms, mais je les connais.

Sous la gouvernance de l’ex-chef d’État, Laurent Gbagbo, vous avez également été victime des faits similaires. Pouvez-vous revenir sur ce sujet ?

J’ai toujours eu des difficultés avec les pouvoirs, même avec le FPI en son temps. Par contre, le Président Gbagbo avait beaucoup d’estime pour moi. Dans l’affaire Café- Cacao, le président Gbagbo a dit la vérité, parce que mon nom ne figurait pas sur la liste des interpellés remis au Procureur de la République d’alors.

« Dieu est au contrôle je sais qu’un jour je ne serai plus de ce monde mais la vérité rejaillira tôt ou tard. Je connais ceux qui ont fomenté le coup contre moi pour dit-on, « faire un coup d’Etat », à ceux-là, j’ai leur tend une rose. »

Mais ils sont venus me prendre pour aller me jeter en prison. Je n’en sais rien et c’est toujours mes ennemis-adversaires qui sont au Pdci-Rda avec mes adversaires du FPI en son temps qui sont allés voir Gbagbo pour me faire arrêter. Heureusement, il n’a pas cédé à leur forfaiture. Je le répète, ce sont mes ennemis du Pdci-Rda qui ont utilisé d’autres canaux pour intervenir auprès de Kimou Raymond pour me faire arrêter.

Selon vous, quelles sont les raisons pour lesquelles ils vous combattent ?

Dès mon arrivée à la tête du conseil, le 13 d’octobre 2018, nous avons fait la passation de charges, le 18 décembre 2018, nous avons été installés et le premier acte que nous avons posé c’est de mettre en place le budget du plan triennal.

Après avoir mis le budget en place, il s’est trouvé qu’il y avait une dette qui s’élevait à plus de six cent cinquante millions (650. 000 000) FCFA. Et plus tard nous nous sommes retrouvés avec une dette qui s’élevait à plus d’un (1) milliard FCFA. J’ai dit non, tout ce que je vais payer, il y a une copie qui va à la chambre des comptes, donc je ne veux pas payer quelque chose et demain on viendra me demander des comptes.

Pour ce faire, j’ai demandé un audit. Je devrais présenter les résultats de l’audit un samedi au Conseil et c’est la veille, c’est-à-dire le vendredi que j’ai été arrêté. Il faut le souligner, bien avant mon arrestation, je recevais des menaces de tout ordre venant de politiques. J’ai été victime d’un complot et le problème d’audit faisait partie de ce qui avait déclenché le problème.

En dépit des difficultés que votre mandature a rencontrées, vous avez réalisé quelques actions en faveur des populations. Pouvez-vous nous faire un bilan à mi-parcours ?

Comme, je l’ai signifié tantôt, j’ai été élu président du conseil régional de Gbêkê, le 13 octobre 2018. Deux mois plus tard, c’est-à-dire le 18 décembre 2018, j’ai été installé et j’ai pris fonction. Naturellement, le premier réflexe que mon équipe et moi avons eu était de mettre en place un budget de fonctionnement.

Nous avons donc suggéré à l’approbation du ministère de l’Intérieur le budget du plan triennal. Ledit budget a été signé le 04 juillet 2019. Malheureusement, j’ai été mis aux arrêts le mois de septembre de la même année. Cet événement inattendu ne m’a pas permis de dérouler mon programme pour lequel les populations m’ont brillamment élu. Donc, je ne peux pas vous dire quelque chose de spécial.

Toutefois, j’ai pu respecter une promesse que j’avais faite aux parents musulmans lors de la campagne, en envoyant une dizaine à la Mecque. Sans oublier, la jeunesse à qui j’ai offert la CAN en installant plus d’une vingtaine d’écrans géants dans toute la région pour lui permettre de vivre la coupe d’Afrique.

Après votre arrestation, comment l’intérim a-t-il été assuré ? 

Malheureusement mon intérim a été mal assuré. Pendant mon absence, l’article 65 et 158 qui régit les collectivités décentralisées a été violé. Il dit ceci : « en cas d’indisponibilité du président, le conseil se réunit, constate l’absence du Président et désigne un intérimaire choisit parmi les 06 vices- présidents par ordre de préséance » ; c’est comme ça que l’intérimaire devrait être choisi.

 Mais, à la grande surprise de toute la population et des conseillers, c’est par un arrêté signé par le défunt ex- ministre de l’Intérieur, Sidiki Diakité que mon intérimaire a été désigné pour assumer cette fonction. Cela a exaspéré la majorité des conseillers qui ont désapprouvé cette démarche de l’administration territoriale.

Je voulais préciser qu’en Côte d’Ivoire, une loi ne s’applique pas par un arrêté, elle s’applique plutôt par un décret et c’est le Président de la République seul qui signe le décret, et non un ministre.

Votre absence a eu un impact considérable sur votre programme. Alors, peut-on dire que l’équipe intérimaire n’a-t-elle pas été à la hauteur ?

Mon absence a effectivement eu un impact sur notre programme. Lorsque vous êtes candidat à une élection, c’est vous qui mettez votre programme en route et vous le proposez aux populations, c’est-à-dire les votants, ce n’est pas un intérimaire qui va appliquer votre programme. Et comme la loi a été violée, l’intérimaire s’est sentie dans un fauteuil acquis.

De nombreux conseillers n’approuvant pas ce forcing, naturellement ils ont fait blocage, en ne prenant pas part aux différentes réunions qu’elle convoquait. Le comble, dès sa prise de « fonction », elle a remplacé tous les vice-présidents qui étaient en place. Elle était la première vice-présidente, en sa qualité d’intérimaire, elle avait pouvoir de liquider les affaires courantes et non faire des nominations, ça, c’est encore une violation de l’arrêté. Beaucoup de personnes se demandent pourquoi je l’ai nommée première vice-présidente.

Et récemment, le « linge sale » se lavant en famille, le Président Bédié a reçu tous les conseillers d’obédience Pdci-Rda et en présence de chefs de cantons, il a réglé ce dossier.

Avez-vous reçu une quelconque pression ou intimidation pour la nommer comme première vice-présidente ?

Non ! Mon objectif était d’innover. J’ai fait plusieurs simulations, parce que je connais un peu le fonctionnement des conseillers, la mentalité des cadres. Je me suis dit, je nomme un premier groupe de vice-présidents, pour deux (2) ans et après viendra un autre groupe pour cette même période, jusqu’à ce que tous, goûtent aux délices de la fonction de vice-président le temps que durerait notre mandat.

J’avais deux alternatives, ou je prends par département, en ce moment le premier vice-président serait de Bouaké, ensuite Béoumi et après viennent Sakassou et   Botro.  Voilà comment je l’ai choisie comme première vice-présidente. Malheureusement les gens n’ont pas compris et ils ont jugé bon de me créer des problèmes et j’ai déploré ce comportement.

A l’issue d’un conseil des ministres tenu le mercredi 07 juillet 2021, le porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly, a annoncé la suspension du Conseil régional. Qu’en est-il exactement ?

…J’ai appris cette décision comme tous les citoyens ivoiriens et la raison évoquée, des dissensions entre les conseillers, c’est ce que je vous ai expliqué tantôt. Je sors de mon lieu de détention, je dois en principe retrouver mes bureaux et reprendre mes fonctions, la politique se met en travers. Les conseillers ont adressé plusieurs courriers au ministère, de la décentralisation. Il n’y a pas eu de suite. Moi-même j’ai écrit plusieurs courriers il n’y a jamais eu de réponse.

Le ministère de l’Intérieur a dépêché une mission d’évaluation de l’inspection générale des services de l’administration du territoire dans la région du 25 février au 1er mars 2021. Les conclusions du rapport d’évaluation de la mission ont relevé des dissensions profondes entre les conseillers et des dysfonctionnements dans la gestion du Conseil. Pouvez-vous en parler ?

Je rappelle qu’une inspection a été faite par le ministère de tutelle du 25 février au 4 mars 2021. Les résultats ont été envoyés à leurs mandataires. J’ai demandé une copie, et jusqu’à ce jour je n’ai pas encore reçu de suite favorable.

Parlant de dysfonctionnement, je précise que les conseillers ont manifesté leur désir de me voir occuper mes bureaux et mon poste. Les intérimaires font circuler de fausses nouvelles comme quoi, Mangoua Jacques peut être interpelé à tout moment pour être envoyé en prison.  Donc, pour eux, dans leur volonté manifeste, il n’est pas question de libérer les locaux, au motif qu’ils détiennent un arrêté qui leur permet de fonctionner.

« J’ai des adversaires et ennemis. Je dirai qu’ils sont issus de ma formation politique, le Pdci-Rda ».

Mais qu’est-ce qu’ils en font du Code de procédure pénal qui dit en son article 605 « quand il y a une condamnation par la première instance et qu’il y a eu appel, que cet appel est recevable, toutes les condamnations sont suspendues ». Lorsque je suis sorti le 31 mars 2020, la décentralisation a interpellé le Président de la Cour d’appel pour savoir si le problème de justice gène ma prise de fonction, la Cour a répondu « non ! Cela ne gêne en aucun cas ma prise de fonction ». C’est un problème particulièrement politique. On ne veut plus de Mangoua Jacques à ce poste vu les velléités qui pointent à l’horizon…

Un organe de presse a publié récemment dans ses colonnes que vous ne pourriez plus siéger au conseil en tant que président. Qu’en est-il exactement ?

Des gens écrivent des choses qu’ils ne maitrisent pas. Il y a une presse que je ne vais pas citer qui a mis l’huile sur le feu depuis que le problème a éclaté parce que j’ai refusé à un de ses journalistes d’être le chef de communication de ma campagne. Mais pour que je puisse ne plus me présenter, il faut que l’État dissolve le conseil, mais ce n’est pas le cas. Tout ce que cette prétendue presse a donné comme information ne repose sur aucune base juridique.

Des bruits font état de ce que le RHDP veut vous évincer au profit d’un quelconque candidat issu de son rang ?

Non le RHDP ne peut pas faire faire ça, les responsables de cette formation politique ne peuvent pas se montrer comme des personnes anti démocratiques, je ne pense pas qu’ils peuvent faire entorse à la loi… Vous savez, les gens parlent par comparaison souvent avec le cas du Hambol.

Dans le cas du Hambol par exemple, c’est l’article 66 qui a été appliqué. Par contre pour le Gbêkê, c’est plutôt l’article 65. Donc la situation dans laquelle je suis est différente de celle du Hambol. Souvent on fait beaucoup d’amalgames dans la lecture de certaines situations. En fait le Rhdp envisage que le Pdci-Rda ne dirige plus le Conseil régional de Gbêkê…

Avez-vous des sentiments de regret pour cette mésaventure que vous avez vécue ?

Je crois en Dieu. Je dis toujours à ceux qui sont allés déposer des armes chez moi pour que je sois inculpé, tôt ou tard ils viendront se signaler, parce que je crois en Dieu. Dans la vie, lorsqu’un individu pose un acte visant à nuire à son semblable, quel que soit le temps, sa conscience le poussera à se repentir. Dieu est au contrôle je sais qu’un jour je ne serai plus de ce monde mais la vérité rejaillira tôt ou tard. Je connais ceux qui ont fomenté le coup contre moi pour dit-on, « faire un coup d’Etat », à ceux-là, j’ai leur tend une rose.

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