Après plusieurs années de rapports difficiles suite aux bouleversements au Moyen-Orient, l’Iran a totalement rétabli son aide au mouvement palestinien du Hamas.
Les relations entre l’Iran et le mouvement Hamas se sont réchauffées, en particulier après l’élection de la nouvelle direction du Hamas en mai 2017 qui a rétabli les relations du mouvement avec Téhéran et résolu toutes les divergences résultant de la position de neutralité adoptée en 2012 sur le conflit en Syrie.
Le commandant de la force Qods du Corps des gardes de la révolution islamique, Qasem Soleimani, a déclaré lors d’un évènement qui s’est déroulé dans la ville de Babol, dans le nord de l’Iran, que le Hamas était l’un des amis de Téhéran dans la région arabe, évoquant ce qu’il a appelé les « liens solides » du Hezbollah libanais et du mouvement du Hamas palestinien avec l’Iran.
Le journal Al-Quds a rapporté les propos d’une source palestinienne anonyme le 4 mars, disant que l’Iran avait rétabli son soutien financier au Hamas. Téhéran fournirait 15 millions de dollars par an au mouvement, montant qui devrait doubler dans les prochaines années, selon le journal.
Téhéran a considérablement réduit son soutien financier et militaire au Hamas après le départ de la direction du mouvement de Damas en février 2012 et son adoption d’une position neutre dans la guerre civile en Syrie, et également après son annonce en mars 2015 de se tenir aux côtés du gouvernement international reconnu du Yémen soutenu par l’Arabie Saoudite.
L’Iran avait souhaité que le Hamas prenne position en faveur de l’Axe de résistance dans la région arabe. Téhéran avait été très contrarié par la direction du Hamas et avait alors réduit ses relations ainsi que de son soutien financier et militaire au mouvement. Cependant, avec l’élection de la nouvelle direction du Hamas, après laquelle de hauts dirigeants du Hamas se sont fréquemment rendus à Téhéran, le soutien a été rétabli.
La dernière visite en date a eu lieu le 22 novembre, au cours de laquelle de hauts responsables du Hamas ont discuté avec le président du Parlement iranien, Ali Larijani, des derniers développements sur la scène palestinienne, y compris des Marches du retour. Larijani s’est engagé à soutenir les Palestiniens dans les forums internationaux, a annoncé l’Iran le 27 novembre, et s’est engagé à aider les blessés et les victimes des Marches du retour.
Un haut responsable du Hamas a déclaré à Al-Monitor, sous couvert de l’anonymat, que le soutien financier et militaire iranien à son mouvement ne s’était pas arrêté en dépit de leurs points de vue divergents sur le conflit en Syrie, tout en affirmant que le soutien n’avait pas été constant ces dernières années.
Ce responsable a ajouté que les relations du Hamas avec Téhéran étaient au beau fixe après les visites de plusieurs dirigeants du Hamas en Iran ces derniers mois, le mouvement renforçant à ces occasions ses relations avec le régime iranien. Il n’y aurait plus aucun malentendu concernant la position adoptée par le Hamas dans le conflit en Syrie.
Le responsable du Hamas a refusé de donner un chiffre précis des fonds que le Hamas reçoit de l’Iran chaque année, soulignant que l’Iran était et restait le plus important soutien du Hamas, à la fois en termes de moyens financiers et militaires.
La diminution de l’appui financier iranien au Hamas ces dernières années a affecté le mouvement et l’a plongé dans une importante crise financière. Le mouvement a été contraint de fermer plusieurs de ses moyens de communication, notamment la télévision par satellite Al-Quds et le Centre d’information palestinien. Le Hamas a également commencé à ne verser que la moitié des salaires, voire moins, à ses employés.
L’émissaire américain pour le processus de paix au Moyen-Orient, Jason Greenblatt, a tweeté le 4 février 2018 que l’Iran versait 100 millions de dollars par an au Hamas pour acheter des armes et construire des tunnels pour attaquer Israël. L’Iran et le Hamas ont ignoré les propos de Greenblatt.
Hussein Sheikh al-Islam, un conseiller du ministre iranien des Affaires étrangères, a déclaré à Al-Monitor que le soutien financier et militaire de l’Iran au Hamas et aux organisations palestiniennes dans la bande de Gaza n’avait jamais cessé, affirmant que Téhéran avait mis ses capacités à la disposition de l’Axe de la résistance.
« L’Iran est prêt à apporter tout son soutien à tout mouvement qui se dressera contre les forces arrogantes des États-Unis, d’Israël et des groupes terroristes qu’ils soutiendraient », a déclaré Cheikh al-Islam. « Le Hamas est une partie importante de cet axe et ses liens avec l’Iran se sont renforcés après l’élection de la nouvelle et avisée direction. »
Hossein Ashtari, commandant en chef des forces de police iraniennes, a prouvé l’amélioration des relations entre son pays et les organisations palestiniennes, en particulier le Hamas, en annonçant le 1er janvier que ses forces entraîneraient les ailes armées de la résistance palestinienne. Cependant, aucune information supplémentaire n’a été fournie concernant cette formation.
Le 27 novembre, l’Iran a déclaré qu’il prendrait sous son aile toutes les victimes et les blessés des manifestations dans la bande de Gaza, pour la Marche du Retour et la levée du siège qui ont débuté en mars 2018.
L’Iran a concentré son soutien financier sur l’aile militaire du Hamas – les brigades Izz ad-Din al-Qassam – qui ont maintenu des liens étroits avec Téhéran et ses alliés dans la région, en particulier le Hezbollah, contrairement à l’aile politique de l’époque, que Téhéran soupçonne d’être à l’origine du départ du Hamas de Syrie, décision qui avait créé des tensions avec l’Iran et le régime syrien.
Hadi Barhani, analyste politique et professeur d’études palestiniennes à l’université de Téhéran, a déclaré à Al-Monitor que l’Iran avait une forte volonté de continuer à apporter son soutien financier et militaire aux organisations palestiniennes, notamment au Hamas et au Jihad islamique, ainsi qu’à d’autres mouvements dans la région comme le Hezbollah.
Il a déclaré que l’Iran était sous pression des États-Unis et de certains pays européens pour mettre fin à ce soutien, ou du moins le réduire, mais que l’Iran a refusé.
Barhani a encore ajouté que l’Iran avait réitéré son soutien au Hamas, au Jihad Islamique et à d’autres organisations armées, indépendamment de l’impact important des sanctions économiques américaines sur l’économie iranienne.
Saber Kol Anbari, écrivain iranien et chercheur pour Al-Jazeera.net, a déclaré à Al-Monitor que la politique étrangère iranienne – impliquant spécifiquement les mouvements de résistance palestiniens et leur soutien – n’était pas sujette à changement malgré les sanctions qui ont affecté l’économie iranienne.
Il a déclaré que les relations entre l’Iran et le Hamas s’étaient récemment remarquablement améliorées et que cela se reflétait dans la déclaration de Soleimani dans laquelle il a salué le mouvement et sa force face à Israël.
Kol Anbari a déclaré que les deux parties avaient un besoin urgent de tisser des liens plus étroits, maintenant plus que jamais alors que certains régimes arabes optent pour la normalisation avec Israël.
Bien que le régime iranien et le Hamas aient confirmé que le soutien financier à ce dernier n’avait jamais cessé, son déclin ces dernières années a eu un impact manifeste sur le mouvement, compte tenu de la rareté des ressources et des dons recueillis par le Hamas auprès de certains pays arabes.
Ahmad Abu Amer est un écrivain et journaliste palestinien, travaillant pour plusieurs médias, à la fois locaux et internationaux. Il est titulaire d’une maîtrise de l’Université islamique de Gaza. Il a co-écrit un livre sur le blocus de Gaza pour l’Agence turque Anadolu.