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Entreprenariat/Ben Aziz Konaté, Chef d’Entreprise : « Dès la fin de cette année, nous nous positionnons pour être la troisième entreprise nationale de commercialisation de volailles en Côte d’Ivoire»

Par Morrys Ouayou/afriquematin.net

Parmi les bâtisseurs de l’économie ivoirienne de plus en plus de jeunes font leurs armes et qui se positionnent de la belle manière. Agé de 24 ans et déjà Chef d’Entreprise, Ben Aziz Konaté fait partie de la liste des fiertés. Discret, courtois, courageux et très efficace, il dévoile les secrets de sa réussite.  

« j’ai dû apprendre le métier de l’élevage  à travers  la toile« .

Vous êtes aujourd’hui à la tête d’une importante entreprise, de production de volaille située à Bingerville. Quel est votre réel parcours ?

Je suis Ibrahima Ben Aziz Konaté, Manager Général d’une entreprise de production de volailles. Je suis titulaire d’une Licence Finances comptabilité gestion d’entreprise, Master en Management des Affaires. Je suis également Conférencier, notamment dans les grandes écoles. J’ai animé beaucoup de conférences pour la BAD, et la Banque Mondiale, et je suis le promoteur de la Ligue des jeunes Entrepreneurs de Côte d’Ivoire.

C’est un parcours très difficile, mais en même temps glorieux. Il faut dire que j’ai commencé juste après l’obtention du BAC. C’est suite à un reportage que j’ai suivi sur les antennes de la télévision ivoirienne que l’idée de la création de l’entreprise est née. Je me suis alors dit pourquoi ne pas investir dans ce secteur-là et je venais de de me rendre compte qu’il y avait du monde et des consommateurs  à satisfaire.

Dans toute entreprise, tout début semble difficile, est-ce votre cas ?

Vous le signifiez-vous-même, j’ai dû apprendre le métier de l’élevage  à travers  la toile. Et les week-ends je partais dans des fermes où je demandais à travailler gratuitement, pour mieux apprendre et m’initier au  métier. Une entreprise, c’est beaucoup de stratégies. C’est une étude de marché et  je me suis donné comme objectif, être leader   sur  marché dans quelques années. Alors j’ai regardé les leaders et j’ai vu qu’ils avaient des points de vente, une manière propre à eux de vendre leurs produits. Je me suis alors dit que si je veux être leader, je dois faire comme eux, sinon, mieux qu’eux. En même temps j’étudie les statistiques nationales qui disent que 80 % de la production nationale est vendue dans les marchés. Ce qui veut dire que les vrais leaders des marchés, ce sont les marchés, et que les Ivoiriens préfèrent consommer les produits frais. Parce que dans le marché, c’est que des produits frais. Pendant les périodes de fête, nous voyons comment les produits frais et les poulets vivants circulent partout dans la ville. Donc, j’essaie de moderniser ce secteur-là. J’ai une grande vision mais je vais tout doucement avec les moyens de bord.

Comment se fait la vente à votre niveau ?

« Je plume les poulets moi-même et je les vends aux voisins »

On me fait un devis de deux millions pour commencer la production. Je trouve que ce devis est énorme et je le réduis à 60.000Fcfa. Parce que j’ai vite compris qu’il fallait juste acheter un carton de poussins et trois sacs d’aliments. Pour le bâtiment, j’ai pris les normes sur internet. Etant à la maison, je prends des briques que j’entrepose et je mets une bâche noire sur le sol. Pas de ciment. C’est comme ça que nous avons débuté. Après 21 jours, je vais essuyer mon premier échec. La nuit, un chien s’est introduit dans le semblant de cage et a mangé la moitié des poussins. Premier essai, premier échec. Et ce fut mon premier coup dur. Mais le courage n’a pas eu raison de moi. Je suis resté assis pendant un moment, et je me suis dit, je vais continuer.

Malgré tout, vous ne baissez pas les bras !

 Effectivement,  je continue et tout se passe bien. Je plume les poulets moi-même et je les vends aux voisins. Je me dis alors que j’ai réussi à faire l’élevage. C’est ainsi que je décide de repartir de plus belle. J’avais une cabine téléphonique confiée au boutiquier du quartier. Je pars le voir et je lui demande de me remettre et l’argent, et les téléphones. Je vends alors les téléphones et je relance l’activité. Mais encore-là, je vais connaître un autre coup dur. L’installation en briques ne tenait pas ; c’était la saison pluvieuse. Et l’eau de ruissellement traversait chaque fois la cage. J’ai raté la bande et j’ai tout perdu. Là encore je ne baisse pas les bras. Je me dis qu’il faut tout reprendre à zéro.

Où avez-vous tiré vos moyens financiers ?

Les week-ends, je faisais le tour des chantiers pour faire le travail d’aide-maçon et on me donnait 2000Fcfa par jour. J’achetais des T-shirt et autres articles que je revendais à mes amis étudiants. J’ai dû donner des cours de renforcement à domicile, et j’ai même vendu des ignames au marché du quartier. Je faisais tout ça parce que j’avais une vision. Il fallait absolument construire un petit bâtiment. J’ai trouvé quelqu’un qui avait de l’espace dans sa cour. Et je lui ai présenté mon projet. Je lui ai dit que s’il acceptait de le faire avec moi, on se partagerait les bénéfices 50% chacun. Ce qu’il a tout de suite accepté et nous avons réussi à construire le bâtiment en huit mois. Et lorsqu’on a démarré cette activité, j’ai mis une technique en place qui était de  vendre avant de produire. Quand nous avons reçu les poussins, nous avons fait du porte-à-porte pour proposer nos poulets. Ainsi, avant même que nos cent poulets soient gros, on avait déjà la commande. On a nous-mêmes plumé nos poulets que nous avons livrés dans des brouettes aux clients qui étaient plus que satisfaits de la qualité de nos produits. Chose curieuse, la majorité de nos clients ont passé tout de suite de nouvelles commandes encore plus importantes. Véritable source de motivation.

Fier de tirer profit de sa persévérance

L’entente était-elle parfaite entre votre associé et vous ?

Dans toute entreprise, lorsque les fleurs commencent  à sortir, l’associé se fait déjà une idée. Et c’est le cas qui est arrivé. Au bout de cinq mois, il est survenu une mésentente qui s’est imposé à mon collaborateur et moi. Et chacun est allé de son côté. Encore un autre coup dur. A quelques mètres de là, j’ai vu un bâtiment délabré et j’ai cherché à rencontrer le propriétaire. C’était une femme. Je lui ai tout de suite annoncé mon projet et mon besoin, celui d’aménager le bâtiment et en faire une ferme. Elle me donne son accord mais demande que je revienne la voir avec mon père. Je n’avais que 18 ans. Quand j’en parle à mon père, il est tout surpris. Il le sera encore plus quand je lui remets la somme de neuf cents mille francs que j’avais économisée. On part donc rencontrer la dame qui accepte après un entretien avec mon père. J’ai alors réhabilité une partie du bâtiment avec la somme de 700.000F et j’ai fait la ferme. Je passais même des nuits là de peur qu’on vienne nuitamment voler les poulets. C’est après que j’ai commencé à embaucher.

Comment se fait la distribution ?

Plusieurs distinctions sont son actif

Nous avons plusieurs bâtiments aujourd’hui et des milliers de têtes que nous vendons par mois. Tout va donc très bien et nous sommes en train d’ouvrir des points de distribution, où le client aura la possibilité de choisir son poulet vivant dans les cages avant de le faire plumer dans nos machines modernes, repart avec son produit tout frais bien emballé. Nous faisons aussi la livraison gratuite à tout client qui passe une commande les mardis et vendredis quelque soit le nombre de produits. Nous avons des clients abonnés à qui nous livrons régulièrement des poulets, des cailles, des œufs… Nous sommes en contact permanent avec nos clients qui sont satisfaits non seulement de nos produits mais aussi de nos prestations. Nous avons ainsi créé une relation client-entreprise. Ce qui fait merveilleusement marcher les activités. Nous venons de sortir les découpes de poulets (cuisses, ailes, gésiers…) parce que nous avons remarqué que tout était importé. Nous faisons donc des cartons de découpes de poulets. Et nous nous  positionnons pour être la troisième entreprise nationale de commercialisation de volailles aux côtés des deux grandes qui existent déjà. Tout ce travail qui est un véritable exploit nous a valus beaucoup de distinctions ça et là.

 Lesquelles  des distinctions?

Les Distinctions ont commencé quand j’avais 21 ans, aujourd’hui j’en ai 24. Nous avons eu plusieurs Prix, notamment celui  de la Business Plan Competition (BPC) avec le Patronat ivoirien sur 687 Startup ivoiriennes. Après quoi, j’ai décidé de consacrer véritablement mon temps à l’Entrepreneuriat – en donnant beaucoup de conférences de Leadership et l’Entrepreneuriat dans des Universités et autres grandes écoles. Ce qui m’a valu d’obtenir le Prix Excellence du meilleur jeune Chef d’entreprise de Côte d’Ivoire par le Président de la République. Ensuite, nous avons reçu le Prix Tony Elumelu au Nigéria. Les choses ont continué et j’ai représenté la Côte d’Ivoire en Afrique du Sud pour Anzisha Prize, le Prix Anzisha pour célébrer les jeunes Entrepreneurs innovants d’Afrique. Et j’ai brillamment remporté ce Prix africain le plus prestigieux pour les jeunes Entrepreneurs de moins de 22 ans sur 831 Startup. Anzisha m’a donc permis d’entrer dans l’un des plus grands réseaux d’affaires au monde où l’on trouve des personnalités aussi célèbres comme Bill Gates. Il faut préciser que le Prix Anzisha donne aussi la possibilité de se former. C’est ainsi que j’ai suivi une formation en Entrepreneuriat et en Leadership à l’African Leadership Academy en Afrique du Sud qui équivaut un peu à l’Université Havard.

Il y a quelques semaines, vous avez offert une centaine de  prises en charge à cette jeunesse de Bingerville. A quoi répond cette préoccupation?

Cela pour permettre à plus d’une centaine de jeunes d’avoir de l’expérience professionnelle. Je comprends que beaucoup de jeunes ont du mal à entreprendre. Je suis entré dans un domaine professionnel où je me sens très bien. Pourquoi ne pas donner à d’autres jeunes la possibilité de faire comme moi et être autonomes demain ? C’est cela mon vœu. C’est cela mon objectif. Je suis prêt à apporter à ces jeunes toute la formation, tout le suivi et l’encadrement nécessaires. Je vais les aider à avoir leurs fermes, à s’installer. Et quand ils auront leurs produits, je vais les aider à tout faire écouler. C’est mon domaine, je connais très bien mon métier, et je m’engage à sortir ces jeunes du chômage.

Quels sont vos projets ?

Nos projets à court terme, c’est d’ouvrir nos différents points de vente dont deux sont déjà opérationnels. Nous ferons le lancement de la campagne officielle d’ouverture de nos points de vente en fin d’année.

De tout ce que vous venez de dire, quel est votre meilleur souvenir ?

Mon meilleur souvenir ? Ah ! C’est lorsque j’ai remporté le Prix du meilleur jeune Entrepreneur Africain. Ce n’était pas évident. Mais cela a été pour moi une très belle expérience. Alors que je ne m’attendais pas à ça, dans la salle, on m’appelle et je remporte le premier Prix. J’ai même brandi le drapeau ivoirien. C’était tout simplement magnifique ! Ce fut une grande fierté pour moi de savoir que ma vision, mon projet et moi pouvaient permettre de remporter un Prix aussi prestigieux.

Quel message pouvez-vous porter à l’endroit de la jeunesse africaine ?

Chaque jeune doit avoir une vision. Que chacun se dise, l’année prochaine, ou dans cinq ans, je dois être à tel ou tel niveau de ma vie. Et travailler pour atteindre ce stade-là. C’est avec le travail qu’on peut tout obtenir. C’est avec le travail qu’on peut changer sa vie. C’est pourquoi j’invite tous mes frères et toutes mes sœurs à se mettre au travail.

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