Par Pr. Séraphin Prao*
Lors du Conseil des ministres du mercredi 9 mars 2022, le gouvernement de Côte d’Ivoire a pris une série de mesures pour préserver le pouvoir d’achat des populations et lutter contre la vie chère. Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » se réjouit de la prise de ces mesures.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » salue particulièrement la subvention des prix des produits pétroliers, notamment du gasoil alors qu’ailleurs, dans le monde, la flambée du prix à la pompe provoquée par la guerre en Ukraine et les sanctions contre la Russie met certains pays au bord de l’implosion sociale.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » salue aussi les exonérations d’impôts portant sur certains produits ainsi que le plafonnement des prix de l’huile de palme raffinée, du sucre, du lait, de la tomate concentrée, de la viande de bœuf et des pâtes alimentaires. Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » souhaite que ces mesures soient prorogées au-delà de la période d’action indiquée.
Des clarifications macro-économiques sont donc indispensables. Même si des facteurs externes liés à la relance asiatique après l’épidémie de la covid-19, au coût du transport maritime et aux assurances, à la crise dans la zone sahélienne et aux sanctions de la CEDEAO contre certains Etats ne sont pas à négliger, la cherté de la vie constatée avant la survenue de la crise ukrainienne et qui perdure se comprend sur la base des données internes, structurelles de l’économie ivoirienne. Il faut pointer du doigt ces facteurs internes.
L’effet de la taxation sur le coût de la vie
Selon la Banque mondiale (données de 2021), les principaux moteurs de la croissance en Côte d’Ivoire sont le secteur du bâtiment et des travaux publics, les investissements publics, la demande intérieure et les exportations. Dans ce lot, seul le pilier de la consommation des ménages nous intéresse.
Pour stimuler l’économie, le gouvernement de Côte d’Ivoire a choisi de relancer la consommation des ménages en accroissant les taxes et les charges des entreprises. Le revenu disponible des ménages a été ainsi la cible pour la mobilisation des recettes de l’Etat. Cette politique fiscale a un effet positif sur l’activité économique à court terme en faisant progresser la demande intérieure. Mais, à long terme, elle conduit à une asphyxie des ménages et à une aggravation de leur situation financière. Ils ont de moins en moins de marge de manœuvres financière. Leur revenu ne suffit plus à couvrir les différents frais et, le coût de la vie devient cher pour eux. Il est alors constaté un essoufflement de la demande intérieure qui impacte négativement la croissance. Elle aussi s’essouffle. La cause principale de cette situation est à rechercher dans la politique fiscale, la taxation.
Les taxes affectent les incitations et les revenus disponibles, c’est-à-dire les effets d’offre et de demande. En termes clairs, elles modifient l’offre et la demande en entraînant une baisse du revenu disponible consécutif à une hausse du prix de l’offre. Il y a alors hausse de la consommation et des dépensées agrégées.
Mais, il s’agit d’une demande contrainte, superficielle qui n’est pas suscitée par un accroissement du revenu disponible. Puisque la demande adressée aux entreprises est contrainte, elle n’est pas suivie d’investissements (de prises de risques) par celles-ci pour générer plus de productivité. On note juste des dépenses afférentes à la formation des stocks pour satisfaire la demande mais pas d’augmentation du capital. Or, le principal facteur de la croissance de la productivité est l’investissement.
C’est à juste titre que la Banque mondiale, dans son Mémorandum Economique de la Côte d’Ivoire sorti en mars 2022, note que « la croissance de la productivité a diminué en Côte d’Ivoire depuis 2015. Elle est beaucoup plus faible que celle observée dans les pays pairs hors Afrique subsaharienne ». La croissance de la productivité est le socle essentiel de la hausse des revenus et de la réduction de la pauvreté. Telles sont les causes structurelles de la vie chère en Côte d’Ivoire, qui l’a été dans un passé récent et qui l’est encore plus aujourd’hui.
Comment la taxation peut-elle impacter le niveau de vie des ménages ?
La politique de taxation qui cible directement le revenu disponible des ménages est double et porte sur la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la taxe d’accises. La TVA est à 18% en Côte d’Ivoire mais peut être aussi fixée à taux réduit de 9%. Ce qui est nouveau dans la politique fiscale en Côte d’Ivoire, c’est le relèvement et l’extension du niveau du taux d’accises.
La taxe d’accises est un droit qui est acquitté pour accéder à la consommation d’un objet. Elle frappe généralement les boissons alcoolisées, les tabacs, les produits pétroliers, les produits de luxe et les véhicules. Historiquement, la taxe d’accises sert à dissuader la consommation des produits jugés mauvais pour la santé et l’environnement.
Mais, les Etats l’utilisent pour renflouer leurs caisses. Cette taxe est incorporée dans le prix payé par le consommateur. En Côte d’Ivoire, elle a été appliquée au tabac, aux produits et matériels de la chicha et de la cigarette électronique. De 44%, le taux de droits d’accises est passé à 45% en 2020, 46% en 2021 et 47% en 2022. En 2021, les recettes attendues par l’application de cette mesure étaient estimées à 1, 198 milliards de franc CFA. En 2022, l’estimation est de 1, 2 milliards.
En plus de cette imposition, le tabac est soumis à une taxe spéciale fixée à 5% du prix de vente hors taxe pour le développement du sport (Art. 1085 du CGI). Cette taxe est due par les entreprises de fabrication, de vente et d’exportation du tabac, des cigares, cigarillos, cigarettes, tabacs à fumer, autres tabacs et succédanés.
Il y a aussi la taxe de solidarité, de lutte contre le SIDA et le tabagisme, taxe instituée au profit du Fonds national de lutte contre le SIDA. Elle est due par les fabricants et les importateurs de tabacs (Art. 1133 du CGI). Elle est fixée au taux de 2 % du prix de vente sortie usine. Il y a également la taxe spéciale sur les tabacs.
Il s’agit de taxes spécifiques assises, à l’importation, sur la valeur en douanes des produits importés augmentée de tous les droits et taxes hormis la TVA. Elle concerne les cigares, cigarillos, cigarettes, tabac à fumer, autres tabacs et succédanés de tabacs : 39 % du prix de vente hors taxes (Art.418 du CGI).
Les produits de beauté ou de maquillage et les cosmétiques, mèches, produits de rajouts ou d’extension des cheveux, les produits de parfumerie et autres sont soumis à un droit d’accises au taux de 10%, avec des recettes attendues de l’ordre de 10 milliards de franc chaque année à compter de 2021. Quant aux produits cosmétiques contenant de l’hydroquinone, soumis aux droits d’accises au taux de 50% en 2021, leur imposition a été ramenée à 15% en 2022.
Les boissons alcoolisées sont, elles aussi, soumises aux droits d’accises. Le champagne et les divers types de vins sont passés de 25% à 35 et 40%. Les recettes attendues étaient de 1, 198 milliards en 2021. Les bières et cidres sont passés de 15 à 25%, quand les boissons énergétiques et autres boissons non alcoolisées sont passées de 12 à 20%, avec des recettes attendues de 22, 39 milliards par an à compter de l’année 2018. Les marbres et les véhicules de tourisme dont la puissance est supérieure ou égal à 13 chevaux sont soumis aux droits d’accises au taux de 10% depuis la publication de l’annexe fiscale de 2019.
A côté des droits d’accises, il faut relever d’autres nouvelles taxes. L’annexe fiscale de l’exercice 2021 soumet le procès-verbal, à chaque délibération des associés des sociétés commerciales et des groupements d’intérêts économiques, à la formalité de l’enregistrement au droit fixe de 18 000 francs.
Les recettes attendues pour cette taxe s’élèvent à 778 millions de francs. Depuis l’année 2021, la viande importée en dehors de la zone CEDEAO et le riz de luxe, ordinairement exonérés de la TVA, sont taxés à un taux réduit de 9%. Les recettes attendues de cette nouvelle mesure sont estimées à 27 milliards de francs par an (Annexe fiscale pour l’année 2021, Sources : Direction générale des impôts).
A propos du riz, il faut préciser que, jusqu’à une date récente, le Code général des impôts en son article 355-9 a exonéré ce produit de TVA sans faire de distinction au niveau de la qualité. Mais, l’annexe fiscale de 2021, en son article 6, a suspendu cette exonération. Le riz est taxé à taux réduit de 9%.
L’annexe fiscale note que ce taux s’applique au riz de luxe qui est, dans l’entendement général, le riz haut de gamme ou riz blanc parfumé. Or, tout le riz importé depuis les pays asiatiques est du riz de luxe. On attend donc, comme indiqué par l’annexe fiscale, qu’un arrêté interministériel du Ministre en charge du Budget, du Ministre du Commerce et du Ministre en charge du riz vienne préciser les caractéristiques du riz dit de luxe. Jusque-là, cela ne semble pas avoir été fait ; à moins que l’information de la prise de cet arrêté interministériel n’ait pas fait l’objet de divulgation publique. Il y a aussi des impositions spéciales qui affectent les sociétés de téléphonie et de transfert d’argent. On relève :
– La taxe pour le développement des nouvelles technologies en zones rurales à la charge des sociétés de téléphonie et les entreprises de transfert d’argent par téléphone mobile : 2% du chiffre d’affaires mensuel hors taxe (Art. 1127 du CGI).
– Le prélèvement au profit de la promotion de la culture à la charge des sociétés de téléphonie : 0,2 % du chiffre d’affaires mensuel (Art. 1129 du CGI).
– La taxe sur les entreprises de télécommunications et des technologies de l’information et de la communication et les entreprises effectuant les opérations de transfert d’argent, taxe acquittée par les entreprises du secteur des télécommunications, des technologies de l’information et de la communication installées en Côte d’Ivoire et les entreprises de transfert d’argent par téléphone mobile : 5 % du chiffre d’affaires mensuel hors taxe (Art. 1130 du CGI) ; estimations attendues de 10 milliards par an depuis l’exercice 2018.
Au niveau des sociétés de téléphonie mobile et de leurs intermédiaires, il faut relever la taxe de 0, 5% du montant des opérations de transferts d’argent à la charge du donneur d’ordre de l’opération (annexe fiscale de 2018). Les recettes attendues par an sont estimées à 10 milliards de francs.
De nombreuses nouvelles dispositions ont été prises dans l’imposition des entreprises, avec le relèvement des seuils minimum et maximum exigibles. Là où certaines payaient 50 et 150 millions, elles paient dorénavant 200 000 001 et 500 000 000 francs (Art. 34, 45 et 347 du CGI). Là où elles payaient 500 000 000 francs, elles paient maintenant 1 000 000 000 francs (Art. 20 du livre de procédures fiscales). Toutes ces nouvelles dispositions au niveau des entreprises ont pris effet à partir de l’annexe fiscale de 2021.
Qu’elles soient récupérées sur les produits de consommation eux-mêmes ou prises directement dans la comptabilité des entreprises comme l’impôt minimum forfaitaire (IMF) relevé et généralisé à tous les secteurs d’activité et l’impôt synthétique relevé et fixé à 5% pour les chiffres d’affaires annuels compris entre 10 et 150 millions et à 8% pour ceux qui sont compris entre 50 et 100 millions, ces taxes ont des incidences sur le coût de production, affectent les charges des entreprises et modifient les prix relatifs, c’est-à-dire le prix d’un produit relativement à un autre.
Dans tous les cas de figure, le perdant reste le consommateur qui voit ses dépenses croître, avec une augmentation du coût des biens et services, parfois pour des quantités et/ou des qualités amoindries d’autant plus qu’aucun entrepreneur n’est philanthrope dans l’âme et qu’aucun commerçant ne vend pour perdre. Ils répercutent systématiquement toute hausse nouvelle des taxes sur les prix du marché ou sortie usine. Toutes les taxes prélevées équivalent, dans le revenu des ménages, à un volume financier dépressif partagé par tous. L’augmentation des taxes fait donc partie de la cherté de la vie.
La doctrine fiscale adoptée par le Président Alassane Ouattara crée artificiellement un changement de structure économique qui, malheureusement, peut être soumis à l’effet de cycle et stagner. La prise de nouvelles taxes dynamise la consommation et l’économie mais cette dernière stagne et s’essouffle dans le long terme si aucune nouvelle taxation ne vient accélérer la consommation pour relancer la machine économique.
On comprend pourquoi, chaque année, en Côte d’Ivoire, depuis 2011, l’assiette taxable est élargie avec de nouvelles taxes ou d’anciennes taxes qui voient leurs seuils relevés pour dynamiser l’économie. Selon les informations disponibles, une nouvelle taxe serait en préparation pour le secteur florissant de la vente en ligne.
Quelle est la situation des ménages dans ces conditions ?
Les ménages étant contraints financièrement (ils sont contraints de dépenser plus) de mois en mois et d’année en année, il en résulte une paupérisation générale. De mois en mois et d’année en année, il s’est opéré une réduction insidieuse et drastique des revenus des ménages et, par ricochet, des salaires et autres gains.
Le niveau de vie des populations s’est tellement détérioré au lieu d’augmenter qu’un billet de 10 000 francs n’est plus 10 000 francs dans les faits. Il ne peut plus permettre, en 2022, de s’offrir ce qu’il pouvait permettre des années plus tôt. Pour avoir le même bien et service d’il y a quelques années, il faut débourser plus d’argent, plus que 10 000 francs. La vie est chère en Côte d’Ivoire à cause de la taxation et, tant que la taxation sera élevée la vie sera toujours chère. C’est un choix politique et économique.
A la fin du mois, il se trouve que les ménages consomment l’ensemble de leur revenu disponible. Tout entre dans les dépenses de logement, d’alimentation, d’énergie, d’eau, de transport, d’éducation, etc. L’ivoirien ordinaire vit au jour le jour et est très sensible à toute nouvelle augmentation.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » persiste donc et signe : le taux de croissance élevé de la Côte d’Ivoire sert à entretenir la pauvreté des ménages. La croissance économique ne profite, en réalité, qu’à une poignée de nantis, les hommes d’affaires prospères et les personnes proches du parti au pouvoir qui profitent de l’Etat sans bourse délier. La politique économique du Président Alassane Ouattara cherche à réduire le taux de pauvreté, selon ce qui est propagé par la communication gouvernementale, en rendant les ivoiriens encore plus pauvres. C’est une curiosité économique qui doit intéresser les spécialistes.
Pour nier cette réalité, certains partisans du pouvoir RHDP se cachent derrière les résultats du Prosperity Index (Indice mondial de la prospérité) de 2021. Dire que la Côte d’Ivoire est « le pays qui a enregistré la plus forte croissance de sa prospérité au plan mondial au cours des dix dernières années » ne veut pas dire que les ménages ivoiriens sont devenus plus riches ou ont individuellement gagné plus d’argent.
Le dire, c’est mettre l’accent sur les indicateurs macroéconomiques qui montrent que la Côte d’Ivoire a fait des progrès, notamment dans les domaines de la sûreté et de la sécurité, de la gouvernance, du capital social, du climat de l’investissement, des conditions d’entreprise, des infrastructures et de l’accès au marché, de la qualité économique, des conditions de vie, de la santé et de l’éducation, sans la liberté individuelle et l’environnement naturel.
Il faut aussi souligner que le produit intérieur brut (PIB) ne mesure pas les progrès sociaux. Il n’indique pas une amélioration du bien-être ou du niveau de vie des populations qui se mesure, lui, par le revenu et la consommation des ménages. Le PIB est un indicateur (macroéconomique) de la production économique, de la valeur des biens et services produits par un pays sur une période donnée. Une augmentation du PIB ne signifie pas que le niveau de vie augmente.
La pauvreté, en Côte d’Ivoire, est élevée et s’est aggravée ces dernières années. Le revenu disponible ajusté par habitant et par an de 2179 USD (dollars américains) est inférieur au PIB par habitant et par an qui est de 2313, 8 USD (chiffres de la Banque mondiale). Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), dans son rapport de 2021, vient, d’ailleurs, de confirmer cette cruelle et triste réalité.
La part de revenu des 40% de la population la plus pauvre est passée de 7, 53% en 2010 à 7, 19% en 2021 quand celle des 10% de la population la plus riche a vu sa part de revenu s’accroître ; passant de 49, 71% en 2010 à 54, 66% en 2021. Sous le Président Alassane Ouattara, les pauvres sont devenus plus pauvres et les riches, plus riches.
C’est la conclusion cinglante du rapport du PNUD ; toutes choses qui révèlent l’échec social de la politique économique du Président Alassane Ouattara, destructrice du pouvoir d’achat des populations. L’échec social, avec une précarité galopante, c’est le maître-mot de sa politique économique. La cherté de la vie par des facteurs préexistant ou non à la gouvernance du Président Ouattara
Nous allons en énumérer quelques-uns.
Depuis que le Président Alassane Ouattara est au pouvoir, son gouvernement est pléthorique et budgétivore. Son budget de souveraineté a connu une inflation galopante, comparativement à celui de ses prédécesseurs.
Même si le vivrier n’est pas concerné par la TVA, son transport est soumis à la taxe spéciale sur les transports privés de marchandises qui est de 24 000 francs par véhicule dont la charge utile n’excède pas 3 tonnes, tarif majoré de 1000 francs par tonne ou fraction de tonne supplémentaire pour tout véhicule dont la charge utile excède 3 tonnes (Art. 1117 du CGI).
Il y a aussi le certificat de provenance délivré par l’Office d’aide à la commercialisation des produits vivriers (OCPV) et dont le prix varie entre 500 francs et 5000 francs en fonction de la quantité de produits acheminés (de 1000 à 5001 et plus kilogrammes). S’ajoutent à cela, le certificat phytosanitaire (ministère de l’agriculture) et le certificat d’origine UEMOA (ministère de l’industrie). Pour le vivrier en provenance des autres pays de la CEDEAO, il est prévu le paiement, auprès de l’Office ivoirien des chargeurs (OIC), de la somme de 2500 francs pour obtenir le document unique de transport routier de marchandise (DUT) institué et réglementé par le décret n° 2015-270 du 22 avril 2015.
Toutes ces taxes qui ne figurent pas dans le code général des impôts et qui constituent ce qu’on appelle la parafiscalité participent à la hausse du coût des facteurs. Des villages et campagnes jusqu’à ce que les produits arrivent dans une grande ville comme Abidjan, le coût du transport fait que le prix du vivrier augmente : le commerçant ajoute sa marge au prix de production ; le prix de vente n’étant rien d’autre que le prix de production plus une marge. Quand le prix de production augmente sous l’influence de la fiscalité, de la parafiscalité et du coût des facteurs, bien entendu les prix augmentent mécaniquement.
En dehors de ces facteurs, il y a la structure de production monopoliste en Côte d’Ivoire qui peut expliquer la cherté de la vie. Il y a, dans l’approvisionnement du marché ivoirien, des cartels et des monopoles. En Côte d’Ivoire, il y a une seule entreprise qui fournit l’eau, l’électricité alors qu’en France, par exemple, il y a plusieurs sociétés qui fournissent leurs services pour l’électricité.
Au port d’Abidjan, il n’y a qu’un seul investisseur. Le terminal 1 et le terminal 2, c’est Bolloré. La filière bétail, la filière riz, la filière oignon, par exemple, sont aux mains d’un ou de deux importateurs qui ravitaillent le marché ivoirien en prenant en otage les chaînes d’approvisionnement.
Dans le domaine de la téléphonie mobile, il a fallu l’entrée sur le marché de la société américaine Wave pour que les ivoiriens constatent qu’ils étaient grugés, depuis des années, par les premières qui se faisaient des bénéfices énormes sur leur dos. L’entrée de Wave sur le marché a entrainé une baisse drastique de la structure des prix en matière de transfert d’argent.
Les monopoles et les cartels appauvrissent. Il faut limiter le pouvoir de monopole qui crée des rentes de situation et nuit aux consommateurs et aux entreprises. Dans la situation de monopole, le bien est plus cher qu’en concurrence. L’exemple, jusqu’à une date récente, des transferts d’argent en Côte d’Ivoire en est l’illustration parfaite. Il faut ouvrir le marché à la concurrence pour que le consommateur se reporte sur le produit le plus avantageux pour lui.
Que faire alors pour soulager les ménages et accroître leur revenu ?
Pour le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire », il serait judicieux de baisser la pression fiscale. Il est prouvé les baisses fiscales en relâchant la contrainte financière stimulent l’activité économique et la consommation, accroissant le revenu disponible des ménages et engendrant des revenus supplémentaires pour les commerçants et des entrées fiscales supplémentaires.
Construire des routes, bâtir des édifices prestigieux en laissant les populations crouler sous le poids des taxes et de la pauvreté est la meilleure voie pour nourrir chez le peuple le sentiment de rejet et l’élan révolutionnaire. Cela est historiquement prouvé. Mais, il n’est jamais assez tard pour bien faire. Il faut juste un changement de doctrine et de paradigme économiques et beaucoup de volonté.
Le peuple de Côte d’Ivoire et ses représentants ont besoin de pédagogie pour faire des choix judicieux et tenir des positions éclairées dans l’appréciation de certains dispositifs qui, bien que réglementaires, ne manquent pas de susciter des interrogations quant à l’économie politique qui les sous-tend, une économie politique dans laquelle la puissance publique ne voit que les avantages pour le système économique et adopte une doctrine fiscale qui réduit le revenu des ménages.
Le rôle du mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire », en tant que mouvement politique et citoyen, est de contribuer à cette pédagogie collective avec des critiques objectives appuyées et des propositions audacieuses et volontaristes.
*Président du mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire ».