Mais quels que soient les résultats de cette consultation populaire, quels que soient les actes irresponsables que poseront Affi, Sangaré, Koulibaly et leurs petits camarades pour détruire consciencieusement tout ce qui est construit pour nous faire avancer, rien n’ébranlera la volonté des Ivoiriens de faire émerger leur pays du sous-développement. Nous avons voté hier pour adopter notre nouvelle Constitution. Et c’est hier que le Premier ministre français Manuel Valls est arrivé chez nous. Télescopage de calendrier ou autre chose ? Chacun y verra le symbole qu’il voudra. Pour ma part, l’un n’empêchant pas l’autre ou ne l’influençant pas, je ne vois pas de raison à ce que le Premier ministre français ne puisse pas arriver chez nous le jour de notre référendum. Mais s’il fallait absolument y voir un symbole, j’y verrais plutôt celui d’un appui à notre volonté de doter notre pays d’un nouveau pacte social plus consensuel, plus à même de nous insérer dans ce monde en perpétuel mouvement, en perpétuelle compétition. Avec la nouvelle Constitution, nous avons affiché notre volonté de sortir de notre vision villageoise de gestion de notre pays, pour nous projeter dans la modernité tout en gardant le pied dans nos traditions. Il est important, pour savoir où l’on veut aller, de savoir d’où l’on vient. Et nos chefs traditionnels sont bien les garants de nos traditions et de notre culture sur lesquelles nous devons nous appuyer pour appréhender le monde complexe de demain. Monsieur Manuel Valls est arrivé chez nous le jour où nos forces rétrogrades, après avoir échoué à convaincre leurs compatriotes d’adhérer à leurs vues, ont décidé tout simplement d’utiliser la violence pour les empêcher d’exercer leur devoir et droit de citoyen. Des bureaux de vote et des urnes ont été détruits dans certaines localités et des citoyens violentés. Le Premier ministre français qui vient d’un pays civilisé pourrait s’étonner d’un tel comportement. Mais, nous autres, nous ne sommes en rien surpris par de tels agissements. Nous sommes aussi un peuple civilisé, mais nous avons nos sauvageons avec lesquels nous devons vivre. La France aussi a les siens et d’ailleurs certains des nôtres se retrouvent parfois parmi eux. La violence est le seul langage qu’ils connaissent et la Côte d’Ivoire fait avec, depuis qu’ils ont fait leur apparition sur la scène politique en 1990. Même lorsque nous avons commis la funeste erreur de leur confier la gestion de notre pays, il y a une quinzaine d’années, ils l’ont dirigé dans la violence du début à la fin. Repartis dans l’opposition, c’est la même violence qu’ils continuent d’utiliser. Comme le dit Ahmadou Kourouma, l’un de nos plus grands écrivains, le chien ne change jamais sa façon déhontée de s’asseoir. Mais puisque la volonté du pouvoir est d’inclure tous les Ivoiriens, une des raisons d’ailleurs pour laquelle il a proposé une nouvelle Constitution, il n’a pas d’autre choix que leur tendre encore et toujours la main.
Au moment où nous écrivons ces lignes, nous ne savons pas encore l’impact que les actes de violence orchestrés par nos sauvageons aura eu sur le taux de participation au référendum. Nous n’avons pas non plus de tendances concernant les résultats. Seul Affi Nguessan qui est un démiurge a osé donner des chiffres sortis tout droit de son cerveau. Que les personnes sérieuses patientent avant de faire des commentaires. Mais quels que soient les résultats de cette consultation populaire, quels que soient les actes irresponsables que poseront Affi, Sangaré, Koulibaly et leurs petits camarades pour détruire consciencieusement tout ce qui est construit pour nous faire avancer, rien n’ébranlera la volonté des Ivoiriens de faire émerger leur pays du sous-développement. Tous les indicateurs montrent que nous sommes sur la bonne voie. Mais le chemin est encore long et nous avons plus que jamais besoin du soutien de tous nos amis, au premier rang desquels l’on peut citer la France. Point n’est besoin ici de rappeler le long chemin que nous avons parcouru ensemble depuis que nos deux peuples se sont rencontrés il y a plus d’un siècle. Il y a eu des hauts et des bas, et nos relations furent plus que tumultueuses avec notre précédent pouvoir. La situation s’est depuis lors normalisée et, nous en tirons tous profit. Personne ici ne peut nier que la France, à travers ses entreprises présentes dans notre pays et la coopération que nous avons avec elle, a contribué à la formidable croissance que nous connaissons depuis cinq ans. Les défis auxquels nous devons faire face sont nombreux. L’un d’eux est de civiliser nos sauvageons. Mais nous avons la foi et la volonté de les surmonter. Nous avons confiance en nos amis et partenaires. Alors, nous avancerons, malgré tout.
Par Venance Konan, journaliste et écrivain, directeur général du groupe de presse Fraternité Matin