Par Clément Ewouédjé*
La récente nomination de Patrick Jérôme Achi en tant que Ministre d’État, conseiller spécial à la présidence de la République de Côte d’Ivoire, a ravivé le débat sur sa possible candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2025. Cette désignation, intervenue le 7 janvier 2025, soit dix mois avant le scrutin, suscite des avis divergents au sein des médias et des réseaux sociaux.
Le RHDP parti unifié, fondé sur les cendres du RDR, a évolué au fil du temps, s’éloignant de ses objectifs initiaux pour se concentrer sur des luttes identitaires et communautaires. Historiquement, le bastion du RDR se situe dans le Nord de la Côte d’Ivoire, où la majorité de ses partisans sont issus de la communauté musulmane.
La région des 3A, qui comprend Adzopé, Alépé, Akoupé et Yakassé Attobrou, est peuplée principalement par les ethnies Akyé et Agni. Cette région a prospéré sous le règne du Pdci-Rda, qui a mis en place des infrastructures et une politique de décentralisation. Malgré les changements politiques, ce parti conserve un fort électorat dans cette région, grâce à l’héritage de son ancien leader, Henri Konan Bédié.
Avec l’avènement du multipartisme, Laurent Gbagbo, président du Fpi, a réussi à s’imposer dans la région des 3A grâce à un discours populiste et à des investissements dans des infrastructures. Son élection à la tête du pays en 2000 a renforcé ses liens avec les populations locales, mais la fragmentation de la gauche complique la situation politique actuelle.
En 2018, le Pdci-Rda s’est retiré du groupement politique Rhdp, ce qui a affaibli le parti et créé une incertitude quant à son avenir. Alassane Ouattara a alors fondé ce mouvement politique parti unifié, mais la base électorale de la formation politique fondée par Félix Houphouët-Boigny est restée majoritairement fidèle à Bédié.
Patrick Jérôme Achi, transfuge du Pdci-Rda, est le dernier cadre à avoir rejoint Ouattara. Cependant, son départ n’a pas été justifié de manière satisfaisante, et il conserve des liens amicaux avec d’anciens collègues du parti.
Sous la direction de Patrick Jérôme Achi, des accusations de malversations ont terni son image. Sa gestion en tant que Premier ministre a été marquée par des controverses, notamment celle liée au stade d’Ebimpé, qui a conduit à sa démission et celui de son gouvernement.
Bien qu’il soit un technocrate respecté, il n’a pas su construire une stature politique capable de mobiliser un large soutien. Dans la configuration actuelle du gouvernement Beugré Mambé, ses alliés ont perdu leurs postes, ce qui réduit encore davantage son influence.
Si Alassane Ouattara envisageait de le désigner comme candidat du Rhdp, il devrait d’abord compter sur le soutien du Nord. Cependant, la concurrence est forte, et Achi pourrait peiner à rassembler des soutiens au sein même de son parti. De plus, sa capacité à séduire l’électorat de sa propre région semble compromise.
Et la candidature de Patrick Jérôme Achi pour le compte du Rhdp à l’élection présidentielle de 2025 apparaît peu probable. Son manque de soutien populaire, ses antécédents de gouvernance et son statut de technocrate plutôt que de leader charismatique soulèvent des doutes quant à sa capacité à remporter le scrutin. Le Rhdp devra explorer d’autres options pour maximiser ses chances lors de cette élection cruciale.
*Secrétaire général de section, Délégation Yopougon Toits Rouge