Par Léon SAKI – Afrique Matin.Net
Réclamant la levée des conditions assorties à sa libération, dont l’interdiction de quitter Bruxelles où il réside depuis son acquittement le 15 janvier 2019, l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo a eu droit à un procès le jeudi 6 février 2020. C’est un procès déterminant parce que son issu devra permettre de savoir si Gbagbo et Blé Goudé peuvent retourner chez eux en Côte d’Ivoire ou non.
Mais la question du retour au pays natal des deux Ivoiriens, l’audience aura permis de le comprendre, ne semblait pas être du goût de beaucoup de personnes notamment l’avocat des victimes dont la déclaration a, plus ou moins, épaté. « Si Laurent Gbagbo rentre en Côte d’Ivoire, s’il est libre de s’exprimer, cela aura un impact sur les élections. Une fois libéré Gbagbo pourrait gagner les élections et se soustraire de la justice ».
Ces mots, Me Massida les a prononcé avec une telle assurance que nombreux sont ceux qui les admettent comme une certitude.
Bien évidemment quand on sait les rapports de cette dame avec le régime ivoirien où toutes les portes des institutions lui sont ouvertes, et ses relations particulières avec les chancelleries, on est en droit de croire que ses propos tenus lors de l’audience du 6 février dernier ne sont pas fortuits. Pour le montrer, revenons quelques années en arrière.
Il n’est pas sans ignorer que le président ivoirien est un homme pointu, prudent et préventif. C’est pourquoi en 2016, face au climat social très en ébullition avec les grèves, les gémissements des ménagères dont les paniers sont presque vides, les complaintes de la grande muette devenue peu taciturne, le président Ouattara qui a annoncé ne plus vouloir un troisième mandat, est très préoccupé par sa succession.
Qui de Soro, Gon, Hamed est mieux placé pour lui succéder ? Par le biais de l’entreprise de communication Image 7 dirigée par Anne Meaux, il commande discrètement un sondage afin de déterminer la personnalité politique la mieux placée pour remporter les élections en 2020. Le montant de cette opération s’élève à 53 520 euros. Bien évidemment, ce sondage donne vainqueur Guillaume Soro, face à Hamed Bakayoko et Gon. Un autre donnera vainqueur encore guillaume Soro face à Ouattara lui-même avec un score de 38% contre 28%. De 2016 à 2019, plusieurs sondages ont été discrètement réalisés à la demande du président ivoirien mais d’autres également ont été commandités par les instituts américains, canadiens, français et allemands, avant et après l’acquittement du Président Laurent Gbagbo. Trois de ces sondages donneraient Laurent Gbagbo vainqueur en cas de candidature à la présidentielle de 2020. La popularité du célèbre prisonnier semble intacte avec une nette amélioration. Maitre Massida n’a donc pas tort d’affirmer la victoire de l’ex-président ivoirien.
Que faire alors face une telle réalité ?
Deux options se présentent au pouvoir d’Abidjan. La première est de faire en sorte à le maintenir loin de la Côte d’Ivoire le temps de terminer l’élection présidentielle. Le boulot est donc confié aux avocats de l’Etat de Côte d’Ivoire et au conseil des victimes de guerre. Malheureusement, lors de l’audience du 6 février dernier, ceux-ci n’ont pu être à la hauteur de leur mission. Ils se sont montrés très fébriles face aux avocats de la défense qui ont réalisé une très belle performance, donnant ainsi une grande chance au retour à Abidjan de l’ex-président.
Mais entre-temps, une assurance-garantie contre Laurent Gbagbo est mise en place à Abidjan à travers un procès tenu en janvier 2018 le condamnant à 20 ans de prison assorti d’un mandat d’arrêt international. C’est la deuxième option. Si l’homme arrivait à se sortir d’affaire à la CPI, son retour à Abidjan deviendrait impossible parce qu’une cellule lui est déjà dédiée à la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA).