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Pourquoi j’ai décidé de rompre avec mon bracelet connecté

 

Notre histoire avait pourtant bien commencé : il m’encourageait à faire du sport, il m’aidait à bouger… Et puis ça a mal tourné. Récit d’une (courte) histoire d’amour

Lundi matin, quand je suis arrivée au bureau, il était là. Il m’attendait, tranquillement installé dans son écrin de velours noir, comme une bague de fiançailles un peu kitsch. « Veux-tu devenir ma partenaire pour la vie ? » qu’il m’a demandé (ou quelque chose comme ça). Je l’ai sorti de sa boîte et inspecté sous toutes les coutures : doux au toucher, fin, léger… Entre nous, physiquement, ça collait. Juste ce rose flashy, pas trop ma tasse de thé. Allez, tant pis pour la couleur : poussée par la curiosité, je l’ai glissé dans mon sac à main.

D’abord, il a fallu qu’on fasse connaissance. De retour chez moi, ce soir-là, j’ai cherché un moyen d’entrer en communication avec ce machin venu d’ailleurs. Peine perdue : je ne suis tout simplement pas assez high-tech. Mon portable ? Un vieux machin à clavier, que je traîne depuis le lycée. Impossible d’y télécharger l’appli, évidemment. Mon PC ? Windows Vista : pas compatible. Finalement, l’ordinateur de mon mec a consenti à tenir la chandelle. Polar (c’est son petit nom, d’après la notice) m’a dit « Hello ». Ça commençait bien.

Ambiance speed-dating : « C’est quoi, ton niveau en sport ? » m’a-t-il demandé. J’ai pas osé lui dire que je n’en avais pas fait depuis l’école primaire : j’ai répondu « sédentaire ». « Taille, poids, âge ? » : là, il s’agissait de ne pas lui faire peur – je me suis ajouté 5 cm et retiré 5 kg. Après tout, on le fait toutes sur les sites de rencontre, non ? Pendant deux minutes, il n’a rien dit : j’ai eu peur qu’il ne veuille pas de moi. Et puis il s’est fendu d’un « 🙂 » : tous les deux, on était synchro.

La passion du début

Dès le lendemain matin, j’ai mis mon prétendant à l’épreuve. Bracelet rose au poignet, j’ai cavalé comme jamais pour attraper mon train. Tous les cent mètres, je m’arrêtais pour reprendre mon souffle… et surveiller du coin de l’œil ma barre d’activité, qui se remplissait à vue d’œil. Le temps d’arriver sur le quai, j’avais déjà effectué 2 800 pas. Avec mes cheveux en bataille, mon sourire-banane et mes joues rouges, j’étais carrément fière de moi. Merci Polarounet.

Et ce sentiment a duré toute la journée. A chaque fois que j’allais à la machine à café, je jetais un discret coup d’œil discret à mon « partenaire sportif » : plus mon nombre de « steps » (« pas », en V.F. Oui, parce que mon Polar, il est anglophone, en plus) augmentait, plus je me sentais encouragée. J’ai même boudé l’ascenseur pour lui faire plaisir, à mon coach virtuel. Résultat, à la fin de la journée, j’avais cumulé 12 000 pas – quand l’OMS en recommande 10 000 par jour. So sportive.

« Tu sais, je peux dormir avec toi, aussi, m’a-t-il annoncé au moment de retrouver ma couette. Pour analyser ton sommeil. » J’ai hésité, et puis j’ai refusé. Quand même : Chéri dort à côté.

L’amour dure 3 jours

C’est le lendemain que les choses se sont gâtées entre nous. Forcément, après une journée entière de sport intensif (par rapport à d’habitude, j’entends), je me suis réveillée perclue de courbatures. Grimaçante, j’ai donc opté pour une journée-canapé, option tisane et bouillon. Au passage, j’ai attrapé mon Polar – après tout, on était ensemble « pour le meilleur et pour le pire », non ?

Surprise : il m’a accueillie avec un « euuuuuuugh » tout à fait en accord avec mon état. Polly, où est passée ta bonne humeur d’hier ? Toi aussi, tu as la gueule de bois ? C’est fini, tu ne vas plus m’encourager ? Un peu refroidie, j’ai noyé ma déception dans une grande tasse de thé. Le rose du bracelet connecté ne va pas du tout avec la couleur de mon pyjama.

Tout au long de la journée, ma barre d’activité reste désespérément vide. Le moindre mouvement réveille mes douleurs musculaires : à 16 heures, j’ai réussi à cumuler 50 pas. Une misère. Et quand je lui demande conseil, Polar me répond, narquois : « Tu n’as qu’à aller marcher pendant 3 heures. Ou courir pendant 1h30. Ou rester debout pendant 6 heures. » J’ai l’impression qu’il se moque de moi. C’est comme si j’avais un panneau « fainéante » autour du cou : la seule présence de ce bracelet connecté me rappelle que je suis sédentaire, et que c’est mauvais pour ma santé. Je culpabilise. Je m’énerve. Et je le remets au fond de sa boîte. Sous le canapé, mes chaussons m’attendent.

Source: Femme actuelle

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