Le samedi 27 janvier 2018 dernier, le Président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro a intégré la génération Tchagba Djehou des Tchamans au cours d’une cérémonie organisée à son domicile d’Abidjan-Marcory en présence. Voici son discours à l’issue de la cérémonie d’intégration
Tout à l’heure, le porte-parole a dit qu’ils ont mis mon nom dans la génération sans m’avoir informé et qu’il s’excusait. Il n’a pas à s’excuser, c’est plutôt moi qui devrait m’excuser parce que ça fait six mois, huit mois vous avez souhaité me voir.
Donc c’est moi, porte-parole, il faudra bien expliquer cela, je présente mes excuses à ma génération, parce que le pouvoir là, on ne s’amuse pas avec. Deux secondes, si tu n’as pas pris c’est fini. Et moi je vous ai retardé pendant six, huit mois. Porte-parole, on va faire rapidement pour prendre le pouvoir.
On vous a laissé huit mois, or il ne faut pas s’amuser avec le pouvoir. Quand c’est pour toi tu prends en même temps, avec tes deux mains. Donc c’est moi qui vous dois des excuses.
La deuxième chose que je veux dire, c’est vrai on est ici à la maison, on a parlé, on a ri, mais ne vous amusez pas avec la tradition. Je vais vous dire une chose ; tout à l’heure quand vous avez fait le cérémonial de mon intégration dans votre génération, j’ai eu l’impression que j’étais chez moi à Ferké.
J’ai comme l’impression que les traditions Sénoufos-Niarafolos ont un lien ou se rapprochent ou sont similaires ou semblables avec les Ebriés, parce que nous aussi, on a chez nous une école d’initiation, on a des générations. Quand on rentre dans le bois sacré pour être formé à la vie, c’est à peu près… Je retrouve à peu près les mêmes agrégats, les mêmes éléments. Nous aussi, on est organisé en génération. C’est-à-dire de tel âge à tel âge, quand vous rentrez dans le bois sacré, on vous apprend l’école de la vie. Il a dit quelque chose tout à l’heure, quand vous vous engagez, il n’y a plus de trahison possible, chez le petit Sénoufo, il n’y a plus de trahison possible.
Quand on rentre dans le bois sacré, quand on ressort du bois sacré, c’est la loi du silence sur le secret et la vie du bois sacré. Et surtout la génération là, vous êtes liées à vie. Je retrouve les mêmes valeurs dans ce que vous venez de dire.
Donc pour moi ce n’est pas un hasard. Ce que vous m’avez demandé tout à l’heure, je suis déjà formé à ça. C’est pourquoi je m’engage avec vous. L’engagement là, ce n’est pas de l’amusement. Chez nous, quand tu trahis un élément du bois sacré la sanction c’est la mort. Donc je vois en vous les mêmes éléments que nous avons chez nous les Sénoufos. C’est pourquoi moi aussi je me suis engagé à aller dans cette génération Tchagba Djehou. Nous sommes de la même génération, ça vous oblige, que vous le vouliez ou non, ce qui vous arrive me concerne, ce qui m’arrive vous concerne aussi. La dernière fois je suis allé à Niablé, si j’avais fait cette cérémonie avant, vous m’auriez devancé là-bas. C’est vous qui devriez me devancer et j’arrive. C’est pourquoi à partir d’aujourd’hui, partout où je vais, vous devriez aller aussi.
Le 3 mars, je serai avec vous, je viendrai là-bas pour qu’enfin on prenne notre pouvoir. Et nous, quand on va prendre notre pouvoir, je l’ai dit à mon porte-parole, il va le répéter, on doit montrer quelque chose d’innovant, de nouveau, quelque chose de particulier. Parce qu’aujourd’hui, vous avez vu j’ai le kaolin, j’ai mon habit, je suis bien habillé. Nous, on ne doit pas laisser mourir nos traditions, nos coutumes pour aller prendre les traditions et coutumes d’autres, des Occidentaux parce que nos coutumes reposent sur des valeurs humaines. Quand on est de la même génération, on ne doit pas se battre entre nous, mais si on avait développé ça en Côte d’Ivoire, jamais il n’y aurait eu la guerre en Côte d’Ivoire.
Lui, parce que je suis de sa génération, on ne doit pas se battre, mais à vouloir copier les autres, on a méprisé nous-mêmes nos cultures, nos traditions et puis on se retrouve dans une situation bizarre. Nous, notre génération là, nous allons faire en sorte que nos cultures demeurent et soient valorisées. Quand les Occidentaux viennent ici, ce n’est pas pour nous regarder sapés dans des costumes mal taillés. Parce qu’on ne réussira jamais à tailler nos costumes mieux qu’eux. Mais ce qu’ils veulent venir voir chez nous, c’est nos habits, nos pagnes, parce que personne ne pourra être plus fort que nous dans nos pagnes, dans nos habits. Et c’est ça qui fait la richesse de l’humanité, du monde. J’ai dit au porte-parole qu’on va écrire un livre sur nos traditions, nos coutumes et nos procédures. Je m’engage à cela.
Donc allez dans tous les villages, vous mobilisez la génération, faites vite, on a déjà perdu six (6) mois de pouvoir. Je vois les députés Blessuhué, ils sont pressés, ils n’ont qu’à nous laisser on va faire un peu-. Donc allez rapidement dans les villages et puis on va s’organiser, on va laisser notre emprunte. Désormais, partout où je vais, vous devez me devancer et puis j’arrive, et dire que la génération Tchagba Djehou est là pour qu’on sente que je suis là. Bientôt je vais vous donner mon programme, parce que je suis en vacances parlementaires jusqu’en avril.
Merci d’être venus, je suis fier, content, heureux d’être Djoman Djragbou Guillaume. Je vous charge, porte-parole, d’aller dire au chef que j’ai reçu sa boisson, je l’ai acceptée et j’ai bu devant vous, et le 3 mars je viendrai.
Source : guillaumesoro.ci