Par Nazaire Kadia (analyste politique)
La situation qui prévaut au Mali continue d’alimenter l’actualité, tant les rebondissements y sont fréquents.
Après les échanges « d’amabilités » entre le gouvernement malien et les ministres français de l’Europe et des Affaires Etrangères, Yves le Drian et des Armées, Florence Parly, le pouvoir malien est sur le point d’être sur un autre front ; celui du regroupement d’un certain nombre de partis politiques maliens, dénommé le Cadre d’échange des partis et regroupements politiques pour une transition réussie.
Au sortir d’un séminaire, ce regroupement de partis politiques indique avoir adopté des résolutions relatives à un chronogramme électoral, une nouvelle loi électorale, la mise en place d’une nouvelle transition qui aura une durée de 9 mois, conduite par un gouvernement de mission avec un premier ministre neutre et la mise en place d’un nouveau CNT. Et pour boucler la boucle, ce regroupement de partis politique ne reconnaîtra plus les autorités actuelles de la transition, à partir du 25 mars prochain.
Comme on le voit, le gouvernement du colonel Goïta a du pain sur la planche. Les prochains jours seront des plus déterminants.
Harcelés et acculés à l’extérieur par l’ancienne puissance et les organisations sous régionales et régionales instrumentalisées, il devra faire face à l’intérieur, à une fronde que préparent des partis politiques.
Les préoccupations de ces partis politiques peuvent se comprendre et même se justifier, mais que celles-ci tournent essentiellement autour des élections, sans aucune mention de la situation sécuritaire laissent assez dubitatif.
En proposant une transition de 9 mois, ces partis politiques ont-ils un moyen efficace pour pacifier le Mali au point d’organiser des élections inclusives au terme de l’échéance annoncée ?
On a encore en mémoire, le spectacle affligeant, désolant, et humiliant de la prise en otage de feu Soumaïla Cissé, l’un des chefs de l’opposition, au cours des dernières législatives par un groupe armé.
A-t-on trouvé une solution pour que pareille situation dégradante ne puisse arriver à un autre homme politique?
Toutes les régions du Mali seront elles accessibles à tous, au bout des 9 mois de la nouvelle transition ?
Assurément, le mur de la solidarité autour du pouvoir en place à Bamako, va se fissurer sur les coups de boutoir des ambitions qui ont commencé à naitre, et que des mains obscures ne tarderont pas à encourager, à financer et à porter à bout de bras.
Les chants de sirène ont commencé à se faire entendre et inéluctablement, nombreux sont les hommes politiques qui commencent à être bercés par les mélodies envoutantes, surtout qu’elles seront accompagnées par des « éléments de motivation bien motivants ».
On ne manquera non plus de voir ce regroupement de partis, devenir le « chouchou » des médias internationaux et de la sulfureuse « communauté internationale ». Le tapis rouge lui sera déroulé partout, les micros des radios et des chaines de télévision lui seront ouverts. Il deviendra « l’espoir » d’un peuple « martyrisé » par « un pouvoir dictatorial et illégitime ». Les provocations « provoquées » ne manqueront non plus pour accabler le pouvoir en place.
C’est pourquoi, une fois encore, il urge d’en appeler aux partis et aux hommes politiques maliens. Ce qui se déroule sous leur nez, va au-delà du colonel Goïta et du premier ministre Choguel Maïga, mais au-delà également des ambitions des uns et des autres de prendre le pouvoir et de l’exercer. Si ces politiques se laissent entraîner par la mélodie du chant des sirènes et instrumentaliser pour combattre de l’intérieur, alors ils auront trahi le Mali et par-delà, l’Afrique. Et seule la poubelle de l’histoire recueillera leur nom.
Mais s’il y a eu un soir au Mali, il y aura assurément un matin et l’ivraie sera séparée du vrai.