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Présidentielle 2015/ Les Ivoiriens partagés quant à l'éligibilité du Président Ouattara: La contribution d'un citoyen ivoirien résident aux USA

L’élection présidentielle ivoirienne d’octobre 2015, si elle doit être régulière, transparente, crédible et apaisée, suppose préalablement réglée la question relative aux textes applicables.

En 2010, l’élection présidentielle, en raison de son caractère exceptionnel, deux séries de textes ont été appliqués pour l’examen des candidatures. Il y avait d’un côté les textes issus des accords de sortie de crise, notamment les Accords de Linas-Marcoussis et l’Accord de Pretoria, et de l’autre, la Constitution et le Code Electoral.

En effet, la DECISION N° 2005-01 /PR DU 5 MAI 2005 portant autorisation à titre exceptionnel des candidats à l’élection présidentielle de 2005 stipule en son article premier « A titre exceptionnel et uniquement pour l’élection présidentielle d’octobre 2005, les candidats présentés par les partis politiques signataires de l’accord de Linas-Marcoussis sont éligibles. L’examen des candidatures à l’élection présidentielle d’octobre 2005 autres que celles présentées par les partis politiques signataires des accords de Linas-Marcoussis se fera conformément aux dispositions constitutionnelles législatives et réglementaires en vigueur » et en son article 2 « La preuve de la désignation d’un candidat par un parti politique résulte de la lettre d’investiture produite par ce parti »

Alors que l’ORDONNANCE N° 2008-113 DU 14 AVRIL 2008 portant ajustement du code électoral pour les élections générales de sortie de crise, en son article 54 nouveau, dernier alinéa, précise que « La déclaration doit en outre être accompagnée, le cas échéant, d’une lettre d’investiture du ou des partis ou groupements politiques qui parrainent la candidature.
Toutefois, les candidats présentés par les signataires de l’Accord de Linas Marcoussis sont dispensés de la production des pièces prévues au présent article à l’exception de la déclaration de candidature. »

La question est de savoir aujourd’hui quels sont les textes applicables à l’élection présidentielle d’octobre 2015.

La réponse à cette question, suppose tranché le point de savoir si le pays est sorti de la crise, ou s’il y est encore.

En tout état de cause, la Cote d’Ivoire est bel et bien sortie de la crise.

L’explication est fort simple.

Toutes les dispositions exceptionnelles prises dans ce sens, sont abrogées. C’est l’essence de la «  Loi n° 2015-216 du 02 avril 2015 portant modification des articles 7, 9, M. 15. 21. 35. 37. 52. 56. 59, 60, 68, 80. 86, ICI, 116 et 144 de la loi n° 2000-514 du 1er août 2000 portant Code électoral et abrogation de dispositions relatives aux élections de sortie de crise.

En raison de ce qui précède, il est formellement établi que la Cote d’Ivoire est sortie de la crise et qu’en conséquence, le texte applicable à l’élection présidentielle d’octobre 2015 est bien entendu la Loi n° 2000-513 du 1er août 2000 portant Constitution de la Cote d’Ivoire en son article 35 qui dispose :

« Le candidat à l’élection présidentielle doit être âgé de quarante ans au moins et de soixante-quinze au plus.

Il doit être ivoirien d’origine, né de père et de mère eux-mêmes ivoiriens d’origine.

Il doit n’avoir jamais renoncé à la nationalité ivoirienne.

Il ne doit s’être jamais prévalu d’une autre nationalité. »

Si tant est que c’est au regard de la Constitution du 1er août 2000 que l’Arrêt N° E 001-2000 de la chambre constitutionnelle de la Cour Suprême du 06 octobre 2000, a invalidé la candidature de Monsieur Alassane Dramane Ouattara pour nationalité douteuse ; et que c’est encore au regard de l’Arrêt N° 10-2000 du 30 novembre 2000, relatif aux 227 requêtes en contestation d’éligibilité contre les déclarations de candidature à l’élection des députés à l’Assemblée Nationale, que la candidature de Monsieur Alassane Dramane Ouattara a été invalidée pour les mêmes raisons, à savoir pour nationalité douteuse, alors les ivoiriens sont en droit d’attendre de voir par quel miracle le Conseil Constitutionnel va valider la candidature de Monsieur Alassane Ouattara à l’élection présidentielle d’octobre 2015.

En effet, aucun ivoirien ne se souvient que Monsieur Alassane Dramane Ouattara a intenté un quelconque recours auprès des juridictions compétentes pour obtenir l’annulation de la cause des arrêts susvisés. De manière précise Monsieur Alassane Dramane Ouattara n’a intenté aucun recours auprès des juridictions contre le motif du rejet de sa candidature qu’est «nationalité douteuse ». Il s’en suit que Monsieur Alassane Ouattara, pour l’élection présidentielle d’octobre 2015, demeure inéligible, fut-il président sortant. Nulle part la Constitution ne dispense un candidat, fut-il président sortant de produire un dossier de candidature conformément aux dispositions de la Constitution.

Qui plus est, la candidature de Monsieur Alassane Dramane Ouattara n’a été rendue possible en 2010 qu’en vertu de la décision exceptionnelle N° 2005-10-PR du 05 mai 2005, prise par le Président Laurent Gbagbo conformément à l’article 48 de la Constitution à la suite d’un arrangement politique sous la médiation du Président Thabo Mbeki, en consultation avec le Président en exercice de l’Union Africaine le Président Olesegun Obasanjo et le Secrétaire Général des Nations Unies Kofi Annan.

Précisons qu’au terme de l’article 1er de la dite décision, cette faveur accordée à Monsieur Alassane Ouattara et aux six autres signataires des Accords de Linas-Marcoussis, était limitée dans le temps, dans la mesure où elle n’était uniquement valable que pour l’élection présidentielle de 2005 qui a eu lieu finalement en 2010.

Cette mesure exceptionnelle dont a bénéficié Monsieur Alassane Ouattara ne peut être interprétée comme une jurisprudence pour deux raisons :

Premièrement, l’Arrêt du Conseil Constitutionnel en date du 19 novembre 2009 portant publication de la liste électorale définitive, n’a pas eu pour objet de régler la question de la nationalité de Monsieur Alassane Ouattara.

En effet, cet Arrêt du Conseil Constitutionnel n’a fait que valider ou entériner les candidatures des candidats présentés par les partis politiques signataires des Accords de Linas-Marcoussis conformément à la décision présidentielle ci-devant. C’est d’ailleurs ce qui explique que Monsieur Aimé Henri Konan Bédié s’est abstenu de présenter sa candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2015, lui  qui a bénéficié de cette même faveur bien que forclos par son âge (plus de soixante-quinze ans en 2010).

Deuxièmement, on ne peut parler de jurisprudence qu’en cas d’absence de textes sur une question donnée. Ce qui amène le juge à intervenir pour créer le droit lorsqu’il est saisi. Or, en l’espèce, les conditions d’éligibilité à l’élection présidentielle sont clairement énumérées par l’article 35 ci-dessus cité de la Constitution.

Par ailleurs, le dit Arrêt ne saurait être regardé comme un droit acquis, car la Constitution en son article 35 ne prévoit que les conditions d’éligibilité. Elle ne mentionne nulle part des conditions de rééligibilité pour le président sortant qui, s’il veut briguer un second mandat, est assujetti aux mêmes conditions d’éligibilité que les autres candidats. C’est-à-dire celles posées par l’article 35 de notre loi fondamentale. C’est tout comme le cas d’un élève de terminale qui doit constituer le même dossier pour l’examen du bac chaque fois qu’il échoue au bac. Il ne peut se prévaloir d’avoir été ancien candidat et se soustraire à cette obligation.

De tout ce qui précède, l’on est en mesure d’affirmer avec certitude, que Monsieur Alassane Ouattara, n’est pas éligible à l’élection présidentielle d’octobre 2015.

C’est à tort que certaines personnes pensent que ce dernier serait éligible sur le fondement des Accords de Linas-Marcoussis et de Pretoria ou sur le fondement qu’il a déjà été président.

Et pour cause, ces accords bien que signés à l’extérieur ne sauraient prendre la forme d’un traité international ayant primauté sur les lois internes de la Cote d’Ivoire, étant entendu que les signataires sont des sujets de droit interne.

Le Conseil Constitutionnel, gardien de la Constitution ne saurait légalement et en aucun cas, valider la candidature de Monsieur Alassane Ouattara, fut-il président sortant.

Dr. ettien Kouamé Kouadio

Citoyen ivoirien résident aux Etats-Unis

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