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France Afrique/Les temps ont changé…les générations aussi !

Par Nazaire Kadia, (Analyste Politique)

La passe d’armes et les échanges d’amabilité entre les autorités françaises et maliennes, montrent de toute évidence, qu’un ressort est cassé dans les relations entre la France et le Mali et partant entre la France et nombre de ses anciennes colonies. Les choses semblent ne plus être comme elles étaient ou elles devaient être.

Sollicitée par les autorités maliennes, la France est au Mali depuis janvier 2013. Elle y a lancé l’opération militaire Barkhane anciennement Serval, pour venir en aide au gouvernement malien en proie à une attaque de coalisés djihadistes et de rebelles touareg, qui ont occupé le nord de ce pays. L’intervention française a permis à tout le Mali de ne pas sombrer dans la marée djihadiste. Et à juste titre, François Hollande a été accueilli en héros, dans une liesse à nulle autre pareille à Bamako, où le drapeau français flottait à tout vent. Cependant des zones entières échappent encore aujourd’hui au contrôle de Bamako, dont la région de Kidal fief des Touareg qui vivent en quasi autonomie, protégés par les français.

Huit années après, des grains de sable se sont introduites dans la machine des relations entre la France et le Mali. Accueillis comme des héros en 2013, la rue de Bamako demande aujourd’hui aux soldats français de plier bagage. De l’eau a coulé sous les ponts !

La nouvelle tournure que prend la relation entre la France et le Mali, peut s’analyser à l’aune des actions françaises dans ce pays, mais aussi partout où elle a eu à intervenir militairement. Il lui est reproché le double langage qui est le sien : soutenir un gouvernement légal et légitime, mais en sous-main sanctuariser et aider une rébellion à maintenir la partition du pays.

Les exemples sont légion.

Ainsi, au Mali, après avoir endigué les attaques djihadistes, la France protège les rebelles  Touareg (anciennement alliés des djihadistes) de Kidal dont le territoire est interdit d’accès au gouvernement malien. Aucun gouvernement responsable, ne peut tolérer pareille situation. Mais celle-ci dure depuis huit ans.

On a également souvenance, qu’après la tentative de coup d’état en Côte d’Ivoire en septembre 2002, muée en rébellion, la France a utilisé le même modus operandi. Elle s’est interposée entre la zone sous contrôle du gouvernement légal et légitime de Côte d’Ivoire et la rébellion du nord. Elle arguait s’interposer pour éviter que le pouvoir Gbagbo ne s’écroule, mais en réalité elle permettait à la rébellion de se réorganiser et de se réarmer. Et à l’épilogue de cette histoire, c’est main dans la main que soldats français et rebelles ivoiriens ont eu raison du pouvoir du président Laurent Gbagbo.

On peut également citer le cas de la Centrafrique. Quand la France avait toutes les cartes en main, il ne se passait pas de jour sans que  la presse française ne nous abreuve d’informations relatives aux conflits entre musulmans et chrétiens, entre les milices Seleka et anti Balaka, de la faiblesse des forces armées centrafricaines. Ces informations donnaient l’impression que la situation était intenable. Nombre de personnes s’interrogeaient alors. Que faisaient les forces françaises et celles de l’Onu, si celles-ci n’arrivaient pas à désarmer les milices et permettre au gouvernement légal de travailler ? Quels intérêts avaient-elles à laisser pourrir la situation ?

Mais quand excédé par cette « danse du crabe », et vu le pourrissement de la situation, le président centrafricain s’est tourné vers les Russes et particulièrement la société privée Wagner, une hystérie s’est emparée des autorités françaises. Mais le résultat sur le terrain montre éloquemment que le président Touadera a eu le nez creux. Auparavant, aussi paradoxal que cela puisse paraître, les milices Seleka et anti-balaka, qui selon la presse française se découpaient, se sont retrouvées peu avant les élections présidentielles, dans une coalition, pour se battre contre les forces armées centrafricaines. Grâce aux Russes de Wagner, le président Touadera peut mieux respirer. Ce qui n’était pas le cas avec les français.

Le colonel Goita, le nouvel homme fort du Mali en ce moment, a adopté la même démarche que son homologue centrafricain. Si pendant huit ans la présence française n’a pas permis d’avancer, il estime qu’il est temps d’explorer l’apport d’autres partenaires, les Russes de Wagner.

Et là encore, la presse française, s’adonne à un battage médiatique, condamnant le Mali de s’accommoder des services de mercenaires. Mais quand un incendie se déclare dans une maison, doit-on s’attarder sur la qualité de l’eau pour l’éteindre ? Assurément non.

L’hystérie qui s’est emparée des autorités françaises, leurs déclarations dans tous les sens et le chantage de retrait de leurs soldats auquel elles voulaient soumettre les autorités maliennes, montrent éloquemment, que la France n’a pas vu passer les générations africaines, encore moins n’a changé ses paradigmes d’approche de ses relations avec ses anciennes colonies à l’effet de les actualiser. Soixante ans après les indépendances, elle  pose toujours le même regard sur les pays africains.

Les temps ont changé, les mentalités ont également changé et les générations aussi. Il faut s’adapter à cette nouvelle donne ou faire de la place à d’autres.

S’il y a eu un soir en Afrique, il y aura assurément un matin, et l’ivraie sera séparée du vrai.

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