Ouattara Oumar est le président de l’ONG Conscience Nouvelle Ivoirienne CNI. Dans cet entretien, il livre le sens de son combat contre le chômage des jeunes et l’autonomisation des femmes de Côte d’Ivoire. Il passe en revue ses actions et propose ses recettes pour un changement de mentalités chez les jeunes dans l’optique de l’avènement de l’Ivoirien nouveau. Entretien !
D’où vous est venue l’idée de la mise sur pied d’une Ong et quels en sont ses objectifs?
L’idée nous est venue suite à un constat selon lequel il y a une sorte d’abandon de tout ce qui constitue les valeurs cardinales de notre société au profit de la facilité, du gout du gain facile et de la médiocrité. Donc nous avons estimé qu’il était nécessaire de mettre en place une association, une organisation qui puisse un tant soit peu conscientiser la jeunesse, conscientiser les femmes et amener une bonne partie de la population ivoirienne à s’approprier les vertus de la rigueur, du travail bien fait et du gout du mérite. Il est clair que si on veut amener des jeunes à avoir le gout du mérite et à rejeter la facilité, il faut les amener à se prendre en charge, à être autonome. Nous avons donc mis cette organisation en place pour un tant soit peu permettre à la jeunesse de changer de cap. C’est ainsi que nous avons décidé de nous orienter résolument vers la création d’activités génératrices de revenu au niveau des jeunes et des femmes. Ceux-là même qui constituent la tranche la plus importante de la population ivoirienne.
L’ONG CNI vise d’abord à permettre aux jeunes et aux femmes de Côte d’Ivoire de se prendre en charge, d’avoir le gout de l’entrepreneuriat.
Vous voulez dire que votre action est essentiellement ciblée vers la jeunesse, mais y a-t-il d’autres couches de la société qui sont concernées ?
Bien sûr ! Nous avons estimé qu’il fallait prendre le mal par la racine c’est pourquoi nous avons pensé à la jeunesse, mais aujourd’hui nous avons des ainés qui sont en face de nous et qui s’adonnent à des pratiques qui n’honorent pas la Côte d’Ivoire, qui n’honorent pas l’Afrique à savoir la corruption, le népotisme etc. monnaie courante sous nos yeux. C’est-à-dire, on entendra dire que quelqu’un a détourné des milliards. Après ce sont les gens qui vont faire une délégationpouraller demander auPrésident de la républiquede le réintégré, c’est quand même grave ca. Heureusement que le président de la république n’en tient pas compte trèssouvent, mais cela est dû ànotre sens, à un certains abandon de la morale.
Maintenant que nous avons réalisé qu’il était nécessaire de changer de cap, il fallait commencer à attaquer le mal par la racine, donc il fallait s’orienter vers les jeunes et les amener à comprendre que tout le monde ne peut pas travailler à la fonction publique. De même que tout le monde ne peut être employé dans une usine. Mais nous pouvons nous même créer notre emploi et offrir du travail à des centaines ou des milliers de jeunes. Nous voulons à tout prix amener une bonne tranche de la population à se dire qu’a tout moment, toute jeunesse, toute personne consciente peut se réaliser si elle prend conscience que sa valeur est indéniable et que seul le gout du mérite doit être sa vision dans sa quête de réussite.
Dans cette quête de réussite, est-ce que vous avez mené des actions concrètes ? Lesquelles ?
Evidement nous avons mené des actions concrètes.Si on se limitait seulement qu’à parler, je pense qu’on n’irait pas loin. Comme je l’ai dit, depuis 2009 nous existons, si nous continuons de parler et de citer des actions c’est que quelque part nous avons eu à les mener. Et par exemple dans le cas de l’autonomisation des jeunes et des femmes, nous avons mis en place deux secrétariats chargés l’un des femmes et l’autre des jeunes. Et ces deux secrétariatsœuvrent chacun à mettre en place des projets viables pour ces différentes couches de la société ivoirienne.
Donc au niveau des jeunes par exemple, nous avons initié dans un premier temps un projet de permis de conduire. Ce projet est différent des autres projets que vous connaissez, qui à la réalité ne sont que de « l’arnaque organisée ».Moi-même, j’ai fait l’amère expérience, au moment où notre ONG ne fonctionnait pas encore. J’ai inscrit un frère à l’aide d’un de ces bons. Là où il était indiqué que je devais payer que 30.0000 F CFA, je me suis trouver à débourser 90.000 FCFA. Pendant ce temps, une autre personne s’est renseignée pour savoir combien il payerait s’il s’inscrivait à son propre compte. Ils lui ont répondu 90.000 F CFA. C’est pourquoi je dis que c’est une arnaque organisée. C’est-à-dire, on fait la publicité gratuite pour un individu qui prétend offrir des bons de permis de conduire à des jeunes. Alors, on enrichit un imprimeur qui édite les différents bons, et ensuite on fait la publicité d’une auto-école quelconque en orientant des personnes vers celle-ci. Nous avons décidé de faire les choses autrement sans démagogie.C’est en cela que nous avons lancé un appel à candidature pour sélectionner des jeunes qui respectent certains nombres de critères, pour les prendre en compte afin qu’ils passent le permis dont les frais sont supporter par notre structure. Avec cette politique, nous avons permis à une soixantaine de jeunes d’avoir un permis de conduire.Ils sont 15 dans la deuxième vague, et ils vont commencer dans deux semaines. On les a inscrits dans des auto-écoles et on paye intégralement tout ce qui est frais relatif au permis de conduire sauf leur déplacement pour aller suivre les cours dans les auto-écoles .
Comment se fait la sélection ?
La sélection se fait de façonsimple. Pas par affinité, la preuve c’est le secrétariat chargé des jeunes qui fait la sélection sur des critères bien définis par l’assemblée générale de l’ONG. Et par la suite, on lance des communiqués dans certaines radios de proximités, sur les journaux de la place pour appeler les uns et les autres à venir s’inscrire,et l’inscription se fait par téléphone. Celui qui reçoit les appels ne connait mêmepas celui qui est au bout du fil. Il s’inscrit et comme on a descritères internes, on évalue et puis le chargé des permis les appelle. Ils viennent, il les écouteet essaie de voir si effectivement les critères qu’on a mis en place sont respectés à savoir que la personne ne doit pas avoir plus de 40 ans, il doit être ivoirien, ne pas être quelqu’un qui a lui-même les moyens de se faire un permis.Parce que nous voulons aider ceux qui sont dans le besoin.
Parallèlement à cela, nous avons aussi notre volonté d’aider les jeunes à se prendre en charge. Et pour ce faire, nous possédons trois mécanismes de financements des projets jeunes. Le secrétariat chargé des projets jeunes réceptionne les demandeurs des projets avec des critères bien établis, les faits valider par le comité d’experts, ensuite les projets qui sont retenus sont classés. Si ce sont des projets que nous pouvons nous-mêmes financer sur fonds propre, les projets sont orientés vers nous de sorte qu’on puisse commencer à les financer. Et c’est dans ce cadre je crois que deux ou trois mois de cela on a donné des chèques à des jeunes et qui ont commencé à travailler, et heureusement pour montrer que les mentalités ont commencé à changer ils ont commencé à rembourser.Pour ceux dont les montants sont trop élevés pour pouvoir les financer nous-même, nous les aidons à monter un business plan assez sérieux et nous les orientons vers le ministère chargé de l’emploi jeune qui est outillé, qui a assez de moyens pour pouvoir les prendre en charge.
A Combien peut-on estimer aujourd’hui les moyens financiers que vous avez dégagés dans les différents projets ? Et d’où tirez-vous ces moyens?
C’est un peu difficile à croire mais 90% sinon 100% de ces financements sont sur fonds propre, parce que vous le savez, une ONG est une association à but non lucratif et d’intérêt publique. Ce qui signifie, qu’on ne fait pas du commerce, on ne vend pas.Au meilleur des cas on peut avoir des soutiens. Mais pour l’instant, nous fonctionnons sur la base de nos petites cotisations, des dons des uns et des autres en particulier de moi-même. Ainsi c’est sur la base de notre propre apport que nous sommes entrain d’aider ces jeunes et nous voulons que cela face tache d’huile pour que les uns et les autres comprennent qu’avec un peu on peut aider si seulement on a la volonté réelle d’aider, si on est sincèredans notre volonté d’aider les jeunes. Si ce n’est pas la démagogie que nous voulons faire,avec un peu de moyens nous pourrons soulager un bon nombre de jeunes et un bon nombre de femmes. Et donc c’est de façon personnelle et sur fond propre comme lestipule la règle de gestion des ONG.
Je vous ai dit qu’on a fait plus d’une soixantaine de permis de conduire , et donc mathématiquement si vous faites 60 multiplié par 100.000 FCFA ça fait déjà 6.000.000 de FCFA pour les permis , et maintenant pour les prêts on avoisine aussi les 6.000.000 de FCFA pour l’instant. Maintenant,hormis ça il y a des dons que nous faisons tels que l’encouragement à l’excellence Comme nous l’avons dit à l’entame de nos propos. Donc l’année passée nous avons récompensé tous les meilleurs bacheliers de la commune de Yopougon avec la remise un diplôme d’honneur et des bons d’achats qui les permettaient d’aller dans une librairie partenaire pour l’acquisition de manuels scolaires. Et les deux meilleurs bacheliers ont été pris en compte dans leurs inscriptions dans lesuniversités, rien que pour les encourager et pour permettre aux autres de pouvoir les prendre pour modèle, et ainsicontribution à la construction de l’Ivoirien nouveau pour lequel nous sommes entrain d’œuvrer avec le gouvernement.
Au vu de tout ce que vous faites, avez-vous des ambitions politiques ?
Peut-être que cela peut arriver mais pour ne pas trahir une promesse, personnelle,je n’ai pas d’ambition politique.Je n’ai pas envie de diriger, mais si cela arrivait soyez rassurés que ce ne sera pas venu de nous.Certainement d’autres personnes qui auraient que notre action en faveur de la jeunesse et des femmes pourrait être plus efficace en exerçant une responsabilité politique.
On peut donc croire que vous n’avez pas d’ambitions politiques.
Pas du tout.D’ailleurs toutes mes actions ont commencé à Yopougon.Les gens pensaient que j’allais briguer un poste politique, je leur ai réponduqu’il n’en était pas question. Beaucoup ont pensé que lorsque je m’en vais aider des enfants orphelins dans certaines écoles, de façon personnelle, c’est à cause de la politique. Je prends certains enfants en charge, mais est-ce que ce sont ces orphelins qui vont voter ? Quand j’organise un arbre de Noël pour les enfants de la cité, est-ce que ce sont ces enfants qui vont voter si je devais me présenter ? Non ! Si je dois être candidat un jour, ce sera peut-êtredans ma région natale.
Quelles sont les activités qui sont en vue ?
Comme je vous le disais tantôt notre objectif est de conscientiser la jeunesse et les femmes à la création d’emploi. Donc on ne va jamais s’arrêter parce qu’il y aura toujours des jeunes qui auront besoin de nous, il y aura toujours des dames qui auront besoin de nous, il y aura toujours des personnes qui ont besoin d’être éveillées de façon continu pour qu’elles se mettent sur le chemin du développement et qu’elles accompagnent les actions gouvernementales.
Quel message avez-vous à lancer à l’endroit du gouvernement à qui vous apportez un appui à travers vos actions?
Je vous dire merci pour l’opportunité que vous m’offrez. Effectivement, je ne peux pas ne pas avoir un message à l’endroit du gouvernement parce que c’est lui qui nous dirige. Les actions des ONG sont des compléments aux actions du gouvernement. Nous,ce que nous voulons lancer comme appel c’est de dire aux gouvernants d’être regardants objectivement sur les activités des uns et des autres, surtout quand il s’agit de ceux qui veulent les soutenir. Je pense que les gouvernants et nous avons à y gagner étant donné que l’objectif d’un gouvernement à ce que je sache c’est de mener le pays vers des horizons meilleurs.