Correspondance particulière/afriquematin.net –Honoré Kouassi
Après de longues années d’attente et d’hésitation, le gouvernement de Côte d’Ivoire, à travers l’appui technique de son ministère du Patrimoine, du Portefeuille de l’Etat et des Entreprises Publiques, en liaison avec le ministère des Finances et du Budget ainsi que celui du Tourisme et des Loisirs, vient de donner son quitus, en vue de la rénovation, l’extension, l’exploitation et la maintenance d’un établissement hôtelier à Dimbokro. L’annonce a été faite, au cours du conseil des ministres du mercredi 16 octobre 2024.
Maintes fois évoquées dans des causeries, c’est la première fois que nous découvrions un patrimoine aussi historique, comme celui de l’ex-hôtel de Sietho de Dimbokro, qui retrace l’histoire des fêtes tournantes de la célébration de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, initiée par son premier Président Félix Houphouët-Boigny.
Une ville qui aura marqué les esprits pendant la lutte émancipatrice pour la liberté de tout un peuple. Elle symbolise l’épicentre des atrocités pendant la période d’avant les indépendances où peuples africains d’ailleurs et d’ici, sans aucune distinction de races et d’ethnies, combattaient ensemble.
La ville porte encore les séquelles d’une blessure lointaine, mais inoubliable, à travers le cimetière des martyrs où reposent en paix, d’anciens compagnons de lutte et fidèles du Président Félix Houphouët-Boigny qui ont choisi d’offrir leur poitrine face à l’oppresseur, pour une bonne cause.
D’autres villes ivoiriennes comme Bouaflé ou encore Séguéla, ont également subi les mêmes affres de la décolonisation où reposent également des martyrs. Ailleurs, l’on inscrirait lesdits sites dans le patrimoine historique du pays, afin de servir de témoignage aux générations à venir.
Mieux, ils devraient servir de lieux de pèlerinage pour d’autres peuples qui voudraient toucher de près, ce passé triste de l’histoire de la Côte d’Ivoire ; voire de toute l’Afrique noire. Ailleurs, ils auraient servi de sites d’études historiques pour les étudiants du monde entier. Mais quel souvenir garder de ces monuments historiques, une fois sur les lieux ? Que de remords !
Comme si ces personnes qui ont fait de la Côte d’Ivoire ce qu’elle est aujourd’hui, se sont sacrifiées pour rien. Alors, qu’elles avaient un devoir de mémoire devant l’humanité et les enfants de leur époque.
L’exemple de cet édifice de cette ville est très édifiant, pas besoin d’experts pour savoir que l’ex-hôtel Sietho, un des patrimoines historiques laissés par le Président Félix Houphouët-Boigny est à l’abandon.
L’histoire d’un complexe hôtelier dont personne n’en parlait
Le Président Félix Houphouët-Boigny, dans sa vision de doter les villes d’infrastructures modernes de développement, organisait la fête de l’indépendance, de façon tournante.
Les villes qui ont abrité les festivités n’ont pas été laissées pour compte. Des routes, des réceptifs hôteliers, l’adduction d’eau potable, école, collèges, dispensaires… y sont construits. C’est ainsi que Dimbokro a accueilli en 1975, les festivités de l’an 15 de la Côte d’Ivoire.
Plusieurs infrastructures dont cet hôtel, géré par l’ancienne Société Ivoirienne d’Exploitation Touristique et Hôtelière d’où le nom de Sietho en fait partie. Cet ancien réceptif, selon des témoignages, a reçu, des invités de marque du Président Félix Houphouët-Boigny, à l’occasion de la célébration de l’an 15 de l’accession à l’indépendance du pays (en 1975). L’établissement a fait ses beaux jours à partir 1974 avant qu’il ne sombre en 1984.
Aujourd’hui, le complexe hôtelier n’existe que de nom. Cet ancien joyau architectural est entièrement abandonné dans des broussailles indescriptibles, servant de lieux de refuge aux reptiles. Pourtant, l’existant y est. Le bâtiment tient encore. La piscine est encore intacte. Le site couvre un grand espace encore exploitable pour d’autres activités connexes (Voir image).
Des tentatives d’une reprise vaine !
Des ébauches pour une reprise du complexe hôtelier avaient eu lieu. La plus récente était sous le ministre du Tourisme, Charles Aké Atchimon, en 2011. Dans le cadre de la politique du gouvernement visant à professionnaliser et de mettre les réceptifs hôteliers et restaurants à niveau international, la tutelle avait promis la reprise de par des privés.
« Il s’agit de confier la gestion des établissements d’hébergement et de restauration à une structure privée pour un meilleur rendement de l’activité. A travers cette session l’Etat entend renforcer la notoriété des établissements d’hébergement et de restauration grâce à la renommée de l’enseigne, améliorer le taux d’occupation de ces établissements, former et professionnaliser le personnel, assurer la maintenance de ces établissements et renforcer les capacités opérationnelles de ces établissements », assurait le ministre d’alors, prédécesseur de Siandou Fofana.
Cette grande restructuration de la gestion des complexes hôteliers qui n’avaient en ce moment précis pas encore fait l’objet d’aucune privatisation, figuraient plusieurs établissements au nombre desquels l’hôtel Sietho.
Emboitant le pas à son prédécesseur, le ministre Siandou Fofana a fait la promesse de remettre le complexe en état. En effet, invité en tant que parrain, de la 8ème édition du Festival du tourisme de Festourdim qui s’est tenue du 30 mai au 1er juin 2019 à Dimbokro, le ministre avait inscrit la réhabilitation du complexe hôtelier dans ses priorités, dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie de «Sublime Côte d’Ivoire », au plan intérieur.
De toutes ces tentatives et annonces, le complexe reste l’ombre de lui-même.
Bien que sa rénovation ne dépendrait pas de la compétence directe du ministère du Tourisme et des Loisirs, selon des sources proches dudit ministère, mais ce joyau architectural qui retrace l’histoire de toute une région, de toute une Nation ne saurait disparaitre pour une quelconque motif.
Les yeux rivés vers les collectivités territoriales, cadres de la région
Deux options pour reprendre le complexe hôtelier, ce qui éviterait de faire oublier le passage du Président Félix Houphouët-Boigny à Dimbokro. La première, même si elle n’est pas trop plausible, concerne les cadres de la région qui doivent juger la nécessité de remettre en état le complexe, signe d’une réhabilitation du passage du Premier président de Côte d’Ivoire à Dimbokro, ville hôte de la célébration du 15ème anniversaire de l’indépendance du pays.
La deuxième option, sur conseil des sources proches du ministère du Tourisme et des Loisirs, c’est aux collectivités décentralisées de voir la faisabilité de la reprise du complexe à travers un partenariat public-privé. La tutelle ne viendra en à point techniquement que lorsqu’elle est sollicitée.
En clair, elle n’intervient pas directement. Ce qui ramène à se demander, « A quoi sert la politique nationale de valorisation et promotion des patrimoines historiques et touristiques dont fait partie l’hôtel Sietho ? ».
Là où on décaisse des milliards pour sortir des terres de nouveaux bâtiments au frais de l’Etat, pourquoi ne pas réhabiliter l’existant qui coûterait moins qu’un bâtiment flambant neuf ?
Et enfin, l’hôtel renaîtra à nouveau
C’est plus qu’un ouf de soulagement pour la population de la capitale de l’ancienne boucle du Cacao et du secteur du tourisme de savoir que l’ex- hôtel Siétho reprendra, pour très bientôt, ses activités. Une convention de concession pour sa rénovation, extension, exploitation et sa maintenance a été conclue entre l’Etat de Côte d’Ivoire et une structure privée qui a en charge, la réhabilitation des bâtiments existant, la construction de nouveaux bâtiments afin d’augmenter la capacité d’accueil, l’exploitation, l’entretien, la maintenance et le renouvellement des biens-pour un coût global de trois (03) milliards de francs CFA.
Celle-ci intervient un mois après une publication récente, parue dans un organe de la presse papier, le 4 septembre 2024 où nous évoquions le cas de l’ex-complexe hôtelier, Siétho. Dans ladite publication, il avait été question que le patrimoine laissé par le Président Félix Houphouët-Boigny, ne saurait être abandonné.