Célikpa Djeckou De Sylva – Afrique Matin.Net
Les armes lourdes ont encore crépité dans la forêt classée de Goin Débé située à Guiglo dans l’ouest de la Côte d’Ivoire à environ 600 km d’Abidjan. Et ce, depuis le 27 septembre entre les wê, propriétaires terriens et les baoulés venus du centre de la Côte d’Ivoire pour occuper cette vaste étendue de la forêt classée. Cette immense forêt classée depuis des lustres, a toujours été infestée de clandestins, Baoulés et burkinabés notamment des mossis. Mais comment est-on arrivé à cet affrontement de ces populations ?
À la faveur de la crise ivoirienne, un burkinabé nommé Salam, présenté comme un seigneur de guerre des Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (Frci), fait introduire une forte communauté de burkinabés sur la rive-est du Goin, l’une des rivières qui donne son nom à cette forêt classée. Ils y cultivent plus de trois milles hectares de cacao. Les baoulés aussi en nombre suffisant, occupent la rive-ouest de cette même rivière. Quant aux autochtones Wê, les moins nombreux, ils sont installés à la périphérie de la forêt classée.
En 2014, Salam et ses hommes puissamment armés affrontent les baoulés. Ceux-ci contestent sa suprématie et veulent expulser les burkinabés. Cet affrontement fait plusieurs morts parmi la population baoulé. A la suite de cet affrontement, Salam, le seigneur de guerre mossi est condamné à dix ans d’emprisonnement et à cinq ans d’interdiction de séjour en Côte d’Ivoire. Ses compagnons sont dégagés de la zone. Ainsi, les baoulés s’emparent de leurs plantations. Depuis ce jour, un certain Prince de la communauté baoulé lui aussi déverse ses « parents » dans la zone préalablement occupée par Salam et ses frères burkinabés déguerpis.
Depuis sa prison, Salam écrit aux chefs coutumiers wê. Pour l’ancien chef de guerre, les plantations créent par lui et ses hommes doivent revenir aux propriétaires terriens que sont les wê. L’affaire est portée devant Koné Messamba ponte de l’ex-rébellion ivoirienne et préfet de Guiglo. Il convoque les chefs des deux communautés. Mais les chefs baoulés refusent de répondre aux différentes convocations adressées par le Préfet de Région. Alors que le préfet attend les Baoulé pour régler la question, ceux-ci tentent de déloger les wê qui depuis cette information avaient commencé à s’installer sur les traces des burkinabés. Les wê, propriétaires terriens ripostent et repoussent les baoulés. Ils se réfugient à la préfecture de Guiglo pour échapper à la colère des wê.
Deux missions gouvernementales sont effectuées. La première, conduite par le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité. Quant à la seconde par, le ministre chargé de la Solidarité. Objectif, cerner les contours du conflit et apporter assistance du Gouvernement aux populations déplacées. A cette occasion, les populations ont reçu des dons en espèces, en vivres et en non vivres, d’un montant de 130 millions de francs CFA.
Au moment où nous mettions sous presse, un calme précaire régnait encore à Guiglo comme pour dire que le feu couve encore sous les cendres de la forêt classée de Goin-Débé, occupée illicitement par les populations ivoiriennes.